La satisfaction de Carla Del Ponte

La satisfaction de Carla Del Ponte
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Par Euronews
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Pendant huit ans en tant que procureure du Tribunal pénal international pour l’ancienne Yougoslavie (TPIY), Carla Del Ponte a enquêté sur les crimes contre l’humanité commis dans les années 1990 lors des guerres de Yougoslavie. Son travail a entrainé l’arrestation de responsables politiques et militaires. La condamnation de Ratko Mladic, l’ancien chef de l’armée des Serbes de Bosnie, est ainsi le fruit de ses efforts. Euronews a interrogé la magistrate suisse après la décision du tribunal, basé à La Haye.

Euronews:
“Vous avez mené le travail de fond qui a été utilisé pour arrêter Ratko Mladic, même si l’arrestation s’est déroulée en 2011, après votre mandat. A l’issue du verdict quelle est votre réaction?”

Carla Del Ponte:
“Je suis satisfaite, très satisfaite au nom des victimes car depuis la mort de Slobodan Milosevic, l’ancien président serbe, Ratko Mladic était le plus haut responsable pour ces crimes de guerre. Et je suis aussi satisfaite par la condamnation à perpétuité.”

Euronews:
“Vous avez mené des enquêtes contre de nombreux criminels de guerre et avant cela contre des membres de la mafia. Lorsque ces personnes étaient assises en face de vous, qu’est-ce qu’ils exprimaient? Est-ce qu’ils avaient des remords, de l’amertume?”

Carla Del Ponte:
“Quand les accusés s’exprimaient, on pouvait sentir leur idéologie, la discrimination raciale. Bien sûr personne ne s’est repenti. Je n’ai eu qu’un seul coupable qui avait des regrets, qui a admis ses crimes, et il s’est suicidé en prison. A part lui, personne n’a eu le moindre remord. Ils se considéraient comme des héros qui se sont sacrifiés en allant en prison.”

Euronews:
“Le TPIY s’est révélé plus concluant que d’autres tribunaux de guerre comme ceux pour le Rwanda ou le Soudan. Comment l’expliquer? Etait-ce à cause d’une plus grande couverture médiatique ou davantage de moyens?”

Carla Del Ponte:
“La raison principale est la volonté politique de la communauté internationale. Il n’y a pas de justice internationale possible sans volonté politique. On l’observe à l’heure actuelle à propos de la Syrie. Le Conseil de sécurité de l’ONU ne parvient pas à se décider sur la constitution d’un tribunal pénal international et par conséquence c’est l’impunité complète.”

Euronews:
“Lors de vos enquêtes en Yougoslavie, vous deviez parfois vous battre contre la raison d’Etat ou contre les médias. Quelle a été votre expérience la plus frustrante en tant que procureure?”

Carla Del Ponte:
“Je pense que l’expérience la plus frustrante a été la mort soudaine de Slobodan Milosevic. Nous étions à la fin du procès et j’avais déjà écrit une partie des accusations lorsque Milosevic est mort soudainement comme un ange dans son lit. C‘était frustrant.”

Euronews:
“Avec du recul qu’est-ce qui aurait pu être amélioré et quels sont les succès du tribunal pénal international pour l’ancienne Yougoslavie?”

Carla Del Ponte:
“Un grand succès est le fait que le tribunal a pu faire la lumière. Il est bien organisé et fonctionne très bien. C’est un instrument incroyable pour la justice internationale et nous l’avons prouvé. Ce que l’on peut améliorer ce sont les procédures car il n’est pas nécessaire que les procès prennent autant de temps. Cela peut certainement s’améliorer à l’avenir. Au-delà de ça c’est une institution fantastique.”

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