Le défi européen pour loger les sans-abris

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Par Isabel Marques da Silva
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Depuis la crise financière de 2008 la situation est toujours plus difficile pour trouver un logement. Les organisations appellent les pouvoirs publics à prendre le dossier à bras le corps et à venir en aide aux sans-abris.

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C'est avec le sourire que Kamel vous accueille chez lui. Après avoir passé 15 ans dans la rue, il vit désormais dans un appartement dans une des communes de la capitale belge. Il a emménagé au mois d'octobre et a pu passer l'hiver sous un véritable toit. Kamel fait partie des bénéficiaires de la campagne intitulée "400Toits". L'objectif est de trouver 400 logements d'ici 2020 pour les sans-abris. Cette initiative soutenue par les autorités de la région de Bruxelles et par 7 ONG s'inscrit dans un projet international qui veut faire du logement le premier pas vers la réintégration sociale. Avec un loyer de 610 euros plus les charges, Kamel débourse 700 euros par mois pour son logement. "C'est cher, mais comme j’ai vécu dans la rue, j’ai dit : Kamel, c’est ça ou retourner à la rue". Pour pouvoir se nourrir il n'hésite pas à se déplacer pour trouver des repas gratuits fournis par des associations ou les organismes sociaux.

Le logement représente le principal défi de la politique européenne de cohésion sociale. La surcharge est un problème croissant d'après le rapport 2019 de la Fédération Européenne des Associations Nationales Travaillant avec les Sans-Abri (FEANTSA). L'expression surcharge signifie que plus de 40% des revenus sont dédiés aux dépenses pour le logement. Dans l'Union européenne cela représente 10% des ménages et 40% des ménages en situation de pauvreté. En Grèce la moyenne de cette surcharge des coûts atteint 72% des revenus. Ce taux est aussi élevé dans les pays plus riches comme le Danemark et l'Allemagne.

Se loger pour se réintégrer

Coûteux, insalubre, surpeuplé ou temporaire, tous ces facteurs accentuent l'insécurité et les risques du mal-logement. Les services publics de la région de Bruxelles ont donc développé le projet Tivoli. Coincé entre la commune populaire de Molenbeek et le quartier huppé de Laeken, cet espace devait bientôt accueillir de nouveaux résidents. Dans de nombreux pays européens, les coûts du logement progressent plus vite que les revenus et amputent le budget des familles. Dans ce projet bruxellois, 70% des habitations sont conventionnelles et 30% sont des logements sociaux. De nombreux experts appellent à investir davantage dans cette approche sociale pour que le logement ne soit plus perçu comme un produit financier mais comme un droit fondamental.

La campagne "400Toits" propose aussi une solution intermédiaire, des unités modulables à bas-coûts, installés temporairement sur des terrains inexploités. La fondatrice de l'ONG HuNeeds défend ce projet qui pourrait obtenir un soutien financier du secteur privé et des pouvoirs publics. "Ceci permet un logement plus abordable, ça permet de sortir de la rue, de se réadapter un petit peu à la vie quotidienne", défend Nastasia Englebert.

Ryszarda vit dans la rue. Deux matins par semaine elle se rend à La Fontaine, un établissement géré par l'Ordre du Malte pour apporter des soins aux sans-abris. Pendant 15 ans Ryszarda a fait des ménages sans le moindre contrat. En 2014 elle a perdu son toit. "Tous les patrons ne sont pas d’accord pour déclarer (les travailleurs). Apres j’ai eu un autre travail, aussi sans contrat, j’ai pris un appartement et j’ai payé le loyer. Je n’ai plus d'appartement, parce que je suis malade", explique-t-elle.

L'action de l'UE

Il n'y a pas de données totalement fiables sur le nombre de sans-abris dans l'Union européenne. Les méthodes de calcul sont différentes d'un Etat membre à l'autre et sur des périodes différentes. En revanche toutes soulignent une aggravation de la situation dans le sillage de la crise économique comme en Irlande, au Luxembourg et en Belgique. Dans son rapport la Fédération Européenne des Associations Nationales Travaillant avec les Sans-Abri réclame davantage de moyens et de meilleurs services d'accueil. Si cette compétence relève des autorités nationales, les institutions européennes pourraient proposer des solutions. "La Commission européenne devrait collecter les données sur les sans-abris. C'est difficile mais pas impossible et cela permettrait d'agir grâce aux données nationales qui existent. Les SDF cachés, dormir dans la rue ou les accueils d'urgence ne sont que la partie visible de l'iceberg", insiste Ruth Owen, chargée de coordination politique de la FEANTSA. La Finlande est le seul Etat membre qui a vu le nombre de sans-abris diminuer au cours des 20 dernières années. Helsinki a mis en place une politique de priorité au logement, un projet suivi dans d'autres pays.

Journaliste • Grégoire Lory

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