France : nouvel espoir d'ouverture des archives présidentielles sur le Rwanda

Le génocide des Tutsis au Rwanda en 1994 a fait entre 800 000 et un million de morts.
Le génocide des Tutsis au Rwanda en 1994 a fait entre 800 000 et un million de morts. Tous droits réservés Ben Curtis/Copyright 2020 The Associated Press. All rights reserved.
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Par Raphaelle Vivent avec AFP
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Le chercheur et auteur François Graner, membre de l'association Survie, demande depuis cinq ans l’ouverture des archives de l'Elysée sur le Rwanda, pour mieux comprendre le rôle des responsables politiques français de l'époque.

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Plus de 25 ans après le génocide des Tutsis au Rwanda, le rôle de la France reste une source de polémique dans le pays. Aujourd'hui encore, de nombreux documents demeurent interdits au public, compliquant le travail des chercheurs et empêchant un débat serein.

Mais cette situation pourrait changer : la rapporteuse publique du Conseil d’Etat, Anne Iljic, s’est prononcée en faveur du chercheur et auteur François Graner, membre de l'association Survie, qui demande depuis cinq ans l’ouverture des archives de l'Elysée sur le Rwanda.

Il s'agit d'une première victoire pour le chercheur : "Rien que le fait que la rapporteuse ait suivi tous nos avis, c'est quelque chose de très important, c'est une grande reconnaissance", estime-t-il. "Elle dit que le travail que nous faisons est quelque chose de vraiment important pour la démocratie. Donc ça peut servir d'argumentaire pour d'autres chercheurs et pour la démocratie en général."

"Comprendre ce que les décideurs politiques savaient"

Comme l'explique le site de l'association Survie, François Graner souhaite accéder à 11 dossiers, "sur des sujets comme l’attentat du 6 avril 1994, la préparation de l’opération Turquoise autour du 15 juin 1994, les rescapés tutsis de Bisesero que l’armée française a abandonné aux tueurs entre le 27 et le 30 juin 1994, ou la fuite au Zaïre du gouvernement du génocide autour du 17 juillet 1994."

"On ne recherche pas de scoop. Ce qu'on veut, c'est pouvoir faire un travail historique de fond. Ce qu'on veut, c'est comprendre ce que les décideurs politiques de l'époque savaient - François Mitterand et ses conseillers - comprendre quelles informations ils avaient quand ils ont pris les décisions qui ont été contestées depuis, et qui impliquent la France pendant, avant et après le génocide des Tutsis en 1994", explique le chercheur.

Ces documents lui ont jusqu'ici été refusés, malgré la promesse de François Hollande en 2015 d'ouvrir les archives aux chercheurs d'ici la fin de l'année 2016.

Pour François Graner, l'accès à ces documents est indispensable pour que la France reconnaisse réellement sa part de responsabilité dans le génocide : "Pour nous, au vu de ce qu'on a pu établir d'après les documents que l'on possède, c'est une complicité. C'est-à-direune connaissance de ce qui s'est passé, un soutien actif, qui a eu un effet sur le crime. Donc ça caractérise une complicité", détaille François Graner."Ce qui ne veut pas dire intention génocidaire. On n'a vu nulle part chez les responsables français une intention de génocide des Tutsis. Simplement, on a vu une intention de maintenir le Rwanda dans la zone d'influence à tout prix, et à tout prix, ça passait par le soutien à des génocidaires."

Une décision qui pourrait faire jurisprudence

En 2019, Emmanuel Macron, a annoncé l'ouverture des archives françaises concernant le Rwanda entre 1990 et 1994, mais seulement à une commission d'historiens choisie par le gouvernement.

D'abord favorable à cette commission Duclerc, l'association Survie s'est dernièrement montrée bien plus critique : " Au mois d'avril 2020, elle a rédigé une note intermédiaire, expliquant qu'elle était neutre et qu'elle n'avait pas d'avis préconçue, ce qui est très bien. Et puis, elle a ajouté des choses montrant qu'elle avait un avis déjà très tranchée sur ce qu'elle allait trouver dans les archives. En gros, elle dédouanait déjà l'armée française et le gouvernement français de toute responsabilité politique", explique François Graner. "Sur cette question, la rapporteuse du Conseil d'Etat a souligné que cette commission avait un rôle important, mais qu'on ne pouvait pas lui laisser le monopole. Elle fera peut-être du bon travail, mais notre rôle à nous est tout aussi important".

Le Conseil d'Etat, qui suit généralement les avis du rapporteur public, devrait rendre sa décision d'ici trois semaines. Celle-ci pourrait faire jurisprudence et permettre à d'autres historiens et citoyens d'accéder aux archives gouvernementales.

Si les recommandations de la rapporteuse sont suivies, l'exécutif aura trois mois pour autoriser M. Graner à consulter les archives.

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