Jimmy Lai a été reconnu coupable de sédition et de collusion avec l’étranger par un tribunal hongkongais. Cette figure du mouvement pro-démocratie risque la prison à perpétuité.
Jimmy Lai, ancien magnat de la presse pro-démocratique de Hong Kong et critique déclaré de Pékin, a été condamné lundi dans le cadre d'un procès historique sur la sécurité nationale, qui pourrait l'envoyer en prison pour le reste de sa vie.
Jimmy Lai a été reconnu coupable d’un chef d’accusation de sédition et de deux chefs d’accusation de collusion avec l’étranger. Il a plaidé non coupable pour tous les chefs d'accusation.
Cet ancien magnat des médias a été arrêté fin 2020 en vertu d'une loi sur la sécurité nationale imposée par Pékin qui avait été mise en œuvre à la suite de manifestations antigouvernementales massives en 2019.
Il a cofondé Apple Daily, un journal qui critiquait ouvertement le gouvernement de Hong Kong et Pékin, et qui a été contraint de fermer ses portes en 2021 après que la police a effectué une descente dans sa salle de rédaction et arrêté ses principaux journalistes, les autorités ayant gelé ses actifs.
Lisant un verdict de 855 pages, la juge Esther Toh a déclaré que Jimmy Lai avait adressé une "invitation constante" aux États-Unis pour qu'ils contribuent à faire tomber le gouvernement chinois, sous prétexte d'aider les Hongkongais.
Les avocats de Lai ont admis au cours du procès qu'il avait appelé à des sanctions avant l'entrée en vigueur de la loi, mais ont insisté sur le fait qu'il avait renoncé à ces appels pour se conformer à la loi. Mais les juges ont estimé que Lai n'avait jamais faibli dans son intention de déstabiliser le parti communiste chinois au pouvoir, "continuant même si c'est d'une manière moins explicite".
Son procès, qui s'est déroulé sans jury, a été suivi de près par les États-Unis, la Grande-Bretagne, l'Union européenne et les observateurs politiques, qui y voient un baromètre de la liberté des médias et de l'indépendance de la justice dans l'ancienne colonie britannique, revenue sous domination chinoise en 1997. Son verdict est également un test pour les liens diplomatiques de Pékin. Le président américain Donald Trump a déclaré avoir évoqué l'affaire avec la Chine, et le Premier ministre britannique Keir Starmer a déclaré que son gouvernement avait fait de la libération de Lai, qui est un citoyen britannique, une priorité.
Les ONG dénoncent le verdict
Au cours des 156 jours qu'a duré le procès de Lai, les procureurs l'ont accusé d'avoir conspiré avec des cadres supérieurs d'Apple Daily et d'autres personnes pour demander à des forces étrangères d'imposer des sanctions ou des blocus et de se livrer à d'autres activités hostiles à l'encontre de Hong Kong ou de la Chine.
L'accusation a également accusé Lai d'avoir fait de telles demandes, soulignant ses réunions avec l'ancien vice-président américain Mike Pence et l'ancien secrétaire d'État Mike Pompeo en juillet 2019, au plus fort des manifestations. Il a également présenté 161 publications, dont des articles de l'Apple Daily, au tribunal en tant que preuves, ainsi que des messages sur les médias sociaux et des SMS.
Jimmy Lai a témoigné pendant 52 jours pour sa propre défense, affirmant qu'il n'avait pas demandé de sanctions étrangères après l'adoption de la loi sur la sécurité en juin 2020.
Les groupes de défense des droits de l'homme, notamment Reporters sans frontières et Amnesty International, ont dénoncé le verdict. "Ce n'est pas un individu qui a été jugé, c'est la liberté de la presse elle-même, et avec ce verdict, elle a été anéantie", a déclaré Thibaut Bruttin, directeur général de Reporters sans frontières.
Le procès de Jimmy Lai était l'une des dernières affaires de sécurité nationale en cours après le mouvement de protestation de masse de 2019 à Hong Kong. L'année dernière, 45 militants de premier plan du mouvement pro-démocratique ont été condamnés à des peines de prison en vertu de la même loi sur la sécurité nationale. Des centaines de militants, d'avocats et d'hommes politiques ont été poursuivis et emprisonnés, ou contraints à l'exil.