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Bûchers, cris et lumière : les meilleurs albums de 2025

Le meilleur de la musique 2025
Le meilleur de la musique 2025 Tous droits réservés  Columbia Records - Dead Air Records - ALC - Shrimptech Enterprises
Tous droits réservés Columbia Records - Dead Air Records - ALC - Shrimptech Enterprises
Par Theo Farrant & David Mouriquand
Publié le
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Rejoignez-nous pour le compte à rebours d’Euronews Culture jusqu’à la révélation de notre album préféré de l’année. Combien en avez-vous écouté ?

C’est de nouveau cette période de l’année où nous rassemblons nos favoris et lançons le compte à rebours vers le Meilleur album de 2025.

L’année musicale a été mouvementée, entre réunions Britpop, retours manqués, l’administration Trump en bisbille avec Bad Bunny et Sabrina Carpenter, aucun « tube de l’été » discernable, et une sacrée quantité de bouillie agressive pour les oreilles due à des « artistes » générés par l’IA comme The Velvet Sundown, Xania Monet et Breaking Rust.

On a aussi vu une rafale d’albums vraiment ringards aux titres tout aussi médiocres, preuve que le déterminisme nominatif se porte bien. Parmi les principaux coupables : l’album de Morgan Wallen opportunément intitulé « I’m The Problem » ; le très gênant « $ome $exy $ongs 4 U » de Drake et PARTYNEXTDOOR ; « You’ll Be Alright, Kid » d’Alex Warren (peut-être, Alex, mais les auditeurs, eux, ne le seront pas, monstre !) ; et « Lost Americana » de MJK, absolument sans vie.

Ajoutez une proposition étonnamment fade de Tame Impala et un douzième effort en demi-teinte de Taylor Swift, qui échoue à entrer dans notre Top 20 pour la deuxième année de suite, et l’ensemble compose l’image d’une année 2025 compliquée.

Mais assez de négativité. Nous sommes là pour célébrer le meilleur de l’année, et nombreux sont les albums qui ont su nous enthousiasmer et nous maintenir (à peu près) sains d’esprit.

Sans plus attendre, voici le compte à rebours jusqu’à l’album préféré d’Euronews Culture des 12 derniers mois, en commençant par...

20) Olivia Dean - The Art of Loving

Olivia Dean - The Art of Loving
Olivia Dean - The Art of Loving Capitol - Polydor

C’est un très bon moment pour les chanteuses britanniques - Charli XCX, RAYE, PinkPantheress et d’autres se taillent un sérieux espace - mais Olivia Dean s’impose comme l’une des nouvelles voix les plus captivantes de l’année. Son deuxième album long format est une exploration chaleureuse, aux accents rétro, de l’amour sous toutes ses formes - des relations romantiques aux amitiés, en passant par la famille et l’amour de soi. Si quelques titres, comme « Baby Steps » et « Something in Between », flirtent un peu trop avec le registre pop de café (sûr, agréable, et peut-être un brin oubliable), les moments forts du disque compensent largement. La mélancolique et incroyablement accrocheuse « Nice to Each Other », la malicieuse « Man I Need » portée par le piano, et l’attraction feutrée et intime de « A Couple Minutes » révèlent une artiste de 26 ans dotée d’un talent évident pour les mélodies instantanément mémorables et une écriture d’apparence trompeusement facile. Un album qui annonce une trajectoire clairement ascendante - cette nominée aux Grammy du Meilleur nouvel artiste ne fait que commencer. TF

19) Ichiko Aoba - Luminescent Creatures

Ichiko Aoba - Luminiscent Creatures
Ichiko Aoba - Luminiscent Creatures Hermine

2025 a été une année tumultueuse et implacable - marquée par les conflits mondiaux, l’anxiété liée à l’IA, les troubles politiques et une crise environnementale qui s’aggrave sans cesse. Au milieu de ce chaos, le dernier album d’Ichiko Aoba offre une denrée rare : la quiétude. Un refuge doux loin du bruit. Avec « Luminescent Creatures », la chanteuse-auteure japonaise invite les auditeurs dans un délicat rêve de conte de fées, tissé de voix angéliques, de mélodies orchestrales envoûtantes et des doux murmures de la nature. Inspiré par la faune marine lumineuse qu’elle a découverte en plongée dans les îles Ryukyu au Japon, son huitième album studio explore la frontière entre la vie et la mort, la lumière et l’obscurité. C’est le genre de disque taillé pour rêver, dormir, vagabonder et disparaître un moment. TF

18) Florence + The Machine - Everybody Scream

Florence + The Machine - Everybody Scream
Florence + The Machine - Everybody Scream Republic Records

« It’s your troubled hero / Back for season six », chante Florence Welch sur « The Old Religion » - rappelant qu’il s’est écoulé 16 ans depuis ses débuts et qu’elle en connaît un rayon sur les pressions de la lumière des projecteurs. Et c’est cette expérience chèrement acquise qui est au cœur de « Everybody Scream », un album qui semble parler de paganisme, de rituels et de sorcellerie mais explore en réalité les traumatismes personnels et la résilience professionnelle. Ses titres théâtraux, portés par la voix sirène inimitable de Welch, évoquent les sacrifices nécessaires pour être une femme dans un milieu / un monde dominé par les hommes. On dirait une forme d’exorcisme - quelque chose que Welch a confirmé en révélant avant la sortie de l’album qu’un catalyseur de l’écriture avait été une grossesse extra-utérine mortelle pendant une tournée. « Everybody Scream » est sa mise à l’épreuve, un album puissant, plein de refrains culminants, qui plaide pour ne pas hésiter à pousser un hurlement magistral en temps de tourments émotionnels. DM

17) DJ Haram – Beside Myself

DJ Haram - Beside Myself
DJ Haram - Beside Myself Hyperdub

Accrochez-vous pour celui-ci, il va vous faire fondre l’esprit autant que l’ouvrir. La New-Yorkaise DJ Haram signe un premier album ambitieux qui fusionne beats club, sons électroniques abrasifs, percussions live et samples moyen-orientaux, le tout propulsé par une énergie inquiète à la fois contagieuse et déstabilisante. Les morceaux bourrés d’invités alternent tubes taillés pour le club (« Loneliness Epidemic »), titres rap (« Fishnets », « Stenography »), moments d’une beauté menaçante (le piano de « Who Needs Enemies When These Are Your Allies? »), lamentations poignantes (point culminant de l’album, « Remaining », avec la trompette de mauvais augure d’Aquiles Navarro et les vers arabes de Dakn), beats électro glitch sur tambours de darbuka (« Sahel ») - le tout tissant une riche tapisserie qui traduit un refus de se conformer ou de compromettre. « Beside Myself » ploie parfois sous le poids de ses nombreuses influences, et son indiscipline en fait une écoute exigeante. Cependant, pour ceux qui veulent savoir à quoi ressemble une rave dystopique, voilà l’album éclectique et franchement bravache qu’il vous faut. DM

16) Freddie Gibbs And The Alchemist - Alfredo 2

Freddie Gibbs and The Alchemist - Alfredo 2
Freddie Gibbs and The Alchemist - Alfredo 2 ALC

Cinq ans après leur premier triomphe collaboratif, Freddie Gibbs et The Alchemist se retrouvent avec « Alfredo 2 », une suite qui échange la brume nocturne d’« Alfredo » (2020) pour une vision de la rue ensoleillée et aérienne. The Alchemist, véritable magicien du crate-digging, marie des boucles soul poussiéreuses et des beats boom-bap à des élans de jazz cinématographiques et des extraits de films japonais insolites, maintenant l’album imprévisible de bout en bout. Gibbs, comme toujours, domine : brut, affûté et techniquement fluide, il tisse des récits de sexe, de drogue et de survie avec un humour noir. « Ever since they showed my ultrasound, bitch, I’ve been Hell-bound », grogne-t-il sur « Gas Station Sushi ». Les moments en collaboration, notamment Anderson .Paak sur « Ensalada » et JID sur « Gold Feet », épousent parfaitement l’assurance détendue du projet. Comme on pourrait s’y attendre du ramen en couverture, « Alfredo 2 » arrive fumant, parfaitement assaisonné et touche juste. TF

15) Erika de Casier – Lifetime

Erika de Casier – Lifetime
Erika de Casier – Lifetime Independent Jeep Music

Le minimalisme n’a pas sonné plus juste cette année que sur le quatrième album studio d’Erika de Casier, « Lifetime ». Paru seulement un an après « Still », la chanteuse-auteure-compositrice portugaise d’origine et danoise desserre son emprise sur le R’n’B Y2K pour mieux embrasser les sonorités du trip hop des années 90. Ce n’est pas un exercice rance de nostalgie ; il s’agit de livrer une collection épurée et intime de chansons qui vous plonge dans un état onirique. Et tandis que vous flottez et vous retrouvez dans ses récits des angoisses du dating moderne (surtout sur « The Chase » - « Minuit sonne / Pas même un texto pour me tenir chaud »), vous vous surprendrez à céder à la sensualité que de Casier invoque, tant l’atmosphère séductrice qui imprègne « Lifetime » est addictive. Nulle part elle n’est plus puissante que sur la sulfureuse « You Got It ! » et « Moan », thrène nocturne sur la manière de gérer un cœur lourd en « vivant de tout cœur ». Alors, laissez-vous envoûter par un LP qui prouve que parfois, moins, c’est définitivement mieux. DM

14) The Last Dinner Party – From The Pyre

The Last Dinner Party - From The Pyre
The Last Dinner Party - From The Pyre Island Records Group

Si leur premier album 2024 « Prelude to Ecstasy » ne vous avait pas converti, The Last Dinner Party s’assurent que l’Acte II laisse tout le monde en adoration à leur autel. Le titre de leur deuxième album fait référence à un symbole à la fois de destruction et de renaissance, et si le bûcher en question n’annonce pas un changement radical de son pour le quintette britannique, il confirme que leur baptême du feu n’était pas un feu de paille. Tout aussi théâtral mais plus riche sur le plan sonore que son prédécesseur, le groupe a affiné son pop-rock baroque et peaufiné l’art du crescendo grandiose. « This Is The Killer Speaking » - ballade de meurtre sur le ghosting - et « The Scythe » et son refrain euphorisant sont peut-être les évidences immédiates, mais « From The Pyre » n’a aucun poids mort. Les dix titres sur l’amour, la perte et la poussière d’un brasier sont énergisants et richement cinématographiques - une indication claire que The Last Dinner Party sont là pour durer. DM

13) Cate Le Bon – Michelangelo Dying

Cate Le Bon – Michelangelo Dying
Cate Le Bon – Michelangelo Dying Mexican Summer

« Peut-être qu’un jour je rentrerai à la maison, vaincue, battue. Mais pas tant que je peux transformer mes chagrins en histoires, la beauté en tristesse. » On ne sait pas si Cate Le Bon est une lectrice assidue de Sylvia Plath, mais les mots de l’autrice semblent appropriés pour son septième album, composé dans le sillage d’un chagrin. Dans « Michelangelo Dying », la musicienne galloise façonne la beauté à partir du chagrin, mettant à l’épreuve ses stylings pop avant-gardistes en grattant des plaies à vif. Ou « une amputation qu’on ne veut pas vraiment, mais dont on sait qu’elle vous sauvera », comme elle l’a décrit au Guardian - une image qui refait surface sur « Pieces Of My Heart », quand Le Bon chante « This is how you break a leg / You let the shadow lead the shape ». Alors qu’il aurait pu être un album de rupture conventionnel plein de larmoiements, Le Bon déjoue les clichés et mène l’auditeur à la réalisation que l’amour ne va nulle part quand il meurt. Il reste en vous, laisse une cicatrice, et espérons que le chaos émotionnel mène à une catharsis qui sonne aussi sublime que « About Time » et « Heaven Is No Feeling ». Et peut-être qu’avec le temps, l’après-coup de toute cette douleur aura quelque chose d’aussi mystérieusement exaltant que « Michelangelo Dying ». DM

12) FKA twigs – EUSEXUA

FKA twigs - EUSEXUA
FKA twigs - EUSEXUA Young - Atlantic

« EUSEXUA », son troisième album, marque un virage significatif pour la chanteuse-auteure britannique - un voyage étourdissant, sensuel et extatique à travers pistes de danse, chambres et paysages de rêve. Au fil de 11 titres, elle mêle avec maestria expérimentation électronique, sensibilité pop, textures à la Aphex Twin et rythmes calibrés pour le club, pour un disque qui célèbre l’intimité, le désir sans filtre et la féminité. Les sommets comme « Perfect Stranger » et « Girl Feels Good » sont euphorisants et enjoués, tandis que des morceaux comme « Keep It, Hold It » et le final « Wanderlust » offrent une réflexion apaisée, prouvant que twigs excelle aussi bien dans les extrêmes du son et de l’émotion. À la fois voyage introspectif et rave extatique, « EUSEXUA » est sans conteste l’une des sorties les plus ambitieuses et exaltantes de l’année. TF

11) Lausse The Cat - The Mocking Stars

Lausse The Cat - The Mocking Stars 
Lausse The Cat - The Mocking Stars  Velvet Blues

Sept ans après son premier album follement créatif « The Girl, the Cat & the Tree », le rappeur et producteur franco-britannique anonyme signe un retour très attendu, mais inattendu, avec « The Mocking Stars ». Reprenant là où il s’était arrêté, Lausse invite sa base de fans quasi culte, patiente, à replonger dans le monde de son protagoniste félin existentialiste, qui dérive dans un univers surréaliste en déliquescence à la recherche de sens. Là où ses débuts ressemblaient à une fable fantasque d’apprentissage, ce disque propulse le chat dans une odyssée cosmique psychédélique - trébuchant d’étoiles en lunes et en soleils, dansant avec des Chapeliers fous à des goûters chaotiques, et basculant à travers des rêveries inspirées d’Alice au pays des merveilles - avant de retomber lentement sur Terre. Des instrumentaux teintés de jazz, des rythmes de bossa nova, des cuivres live scintillants et des batteries hip-hop britanniques tourbillonnent sous son phrasé doux, offrant à la fois jeu théâtral et mélancolie, tandis qu’il affronte la dépression, l’aliénation, l’évasion et des romances fugitives. C’est sans aucun doute l’un des projets les plus imaginatifs et conceptuellement intéressants de l’année. TF

10) Little Simz – Lotus

Little Simz - Lotus
Little Simz - Lotus AWAL

Sur « Lotus », son sixième album, Little Simz transforme les démêlés juridiques et les retombées personnelles en carburant créatif. À la suite d’une rupture amère avec son partenariat créatif de longue date avec son amie d’enfance Inflo - qu’elle a poursuivie pour un prêt impayé présumé -, elle s’allie au producteur Miles Clinton James pour bâtir un disque qui glisse avec aisance d’humeurs en genres. Il y a l’ouverture venimeuse « Thief », ciblée directement sur Inflo ; l’assurance afro-funk de « Lion » ; et la bossa nova légère de « Only ». Les participations de Sampha, Wretch 32, Yussef Dayes et Michael Kiwanuka enrichissent le son sans jamais détourner l’attention. Tout du long, Simz garde fermement la main, livrant des punchlines percutantes et des flows maîtrisés pour raconter une histoire de persévérance, de trahison et d’autonomisation. Un album manifeste - maîtrisé, féroce, et un rappel que Simz opère à un niveau complètement différent de la plupart. TF

9) Pulp – More

Pulp - More
Pulp - More Rough Trade Records

Tout le monde tombait en pâmoison devant la réunion d’Oasis cette année, mais le vrai retour des années 90 est venu des figures de proue réticentes de la Britpop. Sorti à temps pour le 30e anniversaire de leur album le plus célébré, « Different Class » (1995), Pulp est revenu après 24 ans d’absence... et l’attente en valait la peine. Si « More » ne réinvente pas la roue et ne convertira pas forcément ceux qui ne sont pas déjà fans de Jarvis Cocker et de sa joyeuse bande, cet album splendide mérite d’être chéri. Doté de cordes luxuriantes et abordant les thèmes du vieillissement et de l’illusion de soi avec esprit et humour, Pulp livre un LP qui est tout ce que l’on attend d’un album de Pulp. Mieux encore, il dépasse les attentes, prouvant que même s’ils sont désormais bien adultes, ils restent dans une classe à part. Espérons que nous n’aurons pas à attendre un autre quart de siècle pour en avoir davantage. DM

8) Jane Remover – Revengeseekerz

Jane Remover - Revengeseekerz
Jane Remover - Revengeseekerz Dead Air Records

À seulement 22 ans, l’artiste Jane Remover s’est déjà fait un nom comme producteur, auteur-compositeur, multi-instrumentiste et rappeur, avec une étonnante capacité à sauter d’un genre à l’autre. À l’écoute de son opus 2025, les albums précédents « Frailty » (2021) et « Census Designated » (2023) donnent l’impression d’avoir été réalisés par un tout autre artiste. Avec « Revengeseekerz », Remover plonge l’auditeur tête la première dans un mélange abrasif de rap, emo, digicore et EDM, greffé de sons glitch de jeux vidéo - le tout avec des hooks hyperpop puissants. C’est beaucoup à encaisser et ça sonne souvent comme le chaos, mais ça marche. Ce qui aurait dû donner le tournis s’assemble en une bande-son cohérente, audacieuse et addictive pour une nuit vraiment déchaînée. En clair : ça claque. Fort. DM

7) Bad Bunny – DeBÍ TiRAR MáS FOToS

Bad Bunny – DeBÍ TiRAR MáS FOToS
Bad Bunny – DeBÍ TiRAR MáS FOToS Rimas Entertainment

Dans le sillage de l’immense succès d’« Un Verano Sin Ti », « DeBÍ TiRAR MáS FOToS » est le projet le plus ambitieux de Bad Bunny à ce jour - un hommage foisonnant et vibrant à son héritage musical portoricain et à la diaspora au sens large. Toujours ancré dans le reggaetón moderne qui a fait de l’artiste de 31 ans une superstar mondiale, l’album va bien au-delà des attentes, tissant des cuivres de salsa, des mélodies de boléro et les rythmes superposés de la plena traditionnelle. Nulle part cette fusion n’est plus exaltante que sur « BAILE INoLVIDABLE », qui s’ouvre sur des synthés modernes élégants avant d’exploser en salsa live à part entière. « DtMF », point fort en fin d’album, incarne aussi l’esprit du disque. Entraînant, festif et diablement amusant, c’est un album à jouer fort, et il n’est guère surprenant que Bad Bunny ait régné comme l’artiste le plus streamé de 2025. TF

6) Geese - Getting Killed

Geese - Getting Killed
Geese - Getting Killed Partisan Records

Sur « Getting Killed », l’étrange groupe new-yorkais Geese prend l’élan de la percée solo feutrée du chanteur Cameron Winter, « Heavy Metal », et le retourne en leur expérience la plus audacieuse à ce jour. L’album passe de l’explosif « Trinidad » à des jams portés par le groove, pleins de coups de cuivres, de chœurs en boucle et de riffs anguleux, tous traversés par les murmures cryptiques et les punchlines surréalistes de Winter. Le groupe sonne à la fois plus lâche et plus affûté que jamais, construisant des chansons qui ressemblent davantage à des climax prolongés qu’à des structures traditionnelles. Chaotique, malin, sans complexe, délicieusement bizarre et étrangement émouvant, « Getting Killed » confirme Geese comme l’un des rares groupes rock qui se poussent - et poussent leurs auditeurs - vers un territoire réellement nouveau. TF

5) Wednesday – Bleeds

Wednesday - Bleeds
Wednesday - Bleeds Dead Oceans

Après « Rat Saw God » - l’un de nos albums préférés de 2023 - le groupe de Caroline du Nord Wednesday est revenu cette année avec un autre collage d’indie rock crado sur l’amour, les décisions adolescentes stupides et le visionnage de The Human Centipede après un concert de Phish. Et c’est la meilleure chose qu’ils aient jamais sortie. Comme sur « Rat Saw God », le groupe délivre un mélange dynamique de hooks country et de grunge bruyant tout droit des années 90. Et, comme son prédécesseur, ce sont les paroles et la narration tragicomique qui font s’envoler ce projet. Qu’il s’agisse de pointer la « broke dick sincerity » sur l’ouverture « Reality TV Argument Bleeds » ; de conclure que « même le meilleur champagne a toujours goût de vin de sureau » sur le single phare « Elderberry Wine » ; ou de se demander comment « tes dents sont restées si belles / alors que la seule chose que tu bois, c’est du Pepsi » sur le final « Gary’s II », les instantanés évocateurs de la chanteuse-auteure Karly Hartzman sentent le vécu et vous donneront envie d’y revenir. DM

4) Viagra Boys – Viagr Aboys

Viagra Boys - Viagr Aboys
Viagra Boys - Viagr Aboys Shrimptech Enterprises

Depuis leurs débuts en 2018, les post-punks suédois Viagra Boys se sont imposés comme les chroniqueurs absurdes de la désillusion du XXIe siècle dont nous avons tous besoin dans nos vies. Canalysant The Stooges, Dead Kennedys et DEVO, les post-punks ont ridiculisé à la perfection l’« enshittification » continue de la société - de la masculinité toxique et la rhétorique d’extrême droite aux théories du complot dopées par les réseaux sociaux. Ils ne s’écartent pas de leur plan de vol satirique établi pour leur quatrième album, « Viagr Aboys », mais s’éloignent des paysages d’enfer sociopolitiques pour se concentrer davantage sur les folies du quotidien. Des références à Matthew Perry (« Man Made of Meat ») aux frayeurs de santé (« Pyramid of Health »), en passant par des croûtons trouvés sous des futons (« Uno II ») et l’art perdu de lâcher des faits historiques tue-l’ambiance en soirée (« You N33d Me »), les paroles de « Viagr Aboys » sont surréalistes, hilarantes et parfois étonnamment émouvantes - surtout quand il s’agit du romantisme discret du morceau final « River King ». Sonorement, le groupe paraît plus poli que sur ses efforts précédents, mais l’énergie brute reste intacte. Plus encore, le frontman Sebastian Murphy et sa bande hétéroclite ont réussi quelque chose de vraiment spécial avec cet album : ils ont concocté une distillation puissante de tout ce qui fait d’eux une joie délirante à écouter et l’ont injectée directement dans votre veine centrale. Merci pour la dose, messieurs. DM

3) Annahstasia – Tether

Annahstasia - Tether
Annahstasia - Tether drink sum wtr

Il était notre choix n°3 à mi-parcours de 2025 et il y est resté, preuve que le « Tether » à faire chavirer d’Annahstasia est, de loin, le meilleur premier album de l’année. Le chemin a été rude toutefois, car la chanteuse-auteure américaine a dû batailler dur et longtemps pour que « Tether » sorte. Des responsables de label étaient désireux de l’éloigner du folk-soul intime qu’elle voulait créer pour la conduire vers des voies plus mainstream et commercialement viables. Combien ils ont eu tort de douter d’elle et de la maintenir dans les limbes, car ce premier disque, trop longtemps repoussé, est une collection instantanément captivante de chansons d’une beauté sidérante, portées par des instrumentaux élégants et sa somptueuse voix au vibrato d’acajou - quelque part entre Tracy Chapman et Nina Simone. « Can you be a believer », chante-t-elle sur le morceau final « Believer », « In all my possible possibility? ». Pour nous, c’est un oui franc et massif. DM

2) Kelela – In The Blue Light

Kelela - In The Blue Light
Kelela - In The Blue Light Warp

« In the Blue Light » capture Kelela s’éloignant de son univers de R’n’B futuriste et entrant dans la brume à la lueur des bougies du fameux Blue Note Jazz Club de New York, où elle réimagine complètement son catalogue avec une chaleur blues. L’ensemble mêle des originaux retravaillés de la chanteuse américaine à des hommages à Joni Mitchell et Betty Carter, le tout parcouru de bruissements de foule, de blagues sur scène et d’anecdotes tendres qui plongent l’auditeur directement dans la salle. La palette dépouillée - harpe, claviers, batterie, basse veloutée - laisse sa voix céleste au premier plan, révélant de nouvelles nuances émotionnelles dans des titres comme « Waitin’ », « Take Me Apart » et une réinvention à couper le souffle de « Better ». Tout concourt à une atmosphère si intime que l’on se sent assis à sa table. Un album pleinement digne d’une place de tête parmi les meilleurs de l’année. TF

1) Rosalia – LUX

Rosalia - LUX
Rosalia - LUX Columbia Records

S’il y a bien une qualité que l’on ne peut pas enlever à Rosalía, c’est de ne pas se reposer sur ses lauriers. Son premier album de 2017, « Los Ángeles », a introduit audacieusement le flamenco au XXIe siècle ; « El Mal Querer » (2018) a marié sonorités andalouses, pop et hip-hop ; et « Motomami » (2022) était un mélange sexy et transgressif de reggaeton, guitares folk et beats dansants. Pour son quatrième album, l’artiste espagnole de 33 ans signe son geste le plus audacieux à ce jour : un virage vers le classique.

Si ce cross-over peut sonner gadget, le résultat laisse bouche bée. Porté par le London Symphonic Orchestra et des artistes comme Björk, Yves Tumor et même Guy-Manuel de Homem-Christo, de Daft Punk, l’album est un opéra baroque expérimental, propulsé par des envolées de cordes, des beats électroniques et le soprano cristallin de Rosalía.

Agencé en quatre mouvements, Rosalía chante dans 13 langues différentes tout au long de « LUX », dont son catalan natal et l’espagnol (sur les splendides « Divinize » et « La Perla » respectivement), ainsi que l’allemand (« Berghain »), l’arabe (« La Yugular »), l’ukrainien (« De Madruga ») et le latin (« Porcelana »). Elle le fait pour mieux explorer des thèmes sans frontières - l’amour, le sexe, la spiritualité et le féminin sacré -, en s’immergeant dans les récits de saintes et mystiques à travers le monde et en les utilisant comme inspiration pour chaque morceau.

L’effet instaure une connexion divine, car il n’est pas nécessaire de comprendre toutes les paroles pour en apprécier la résonance émotionnelle. Les 18 titres transcendent les langues et existent dans un limbe sonore où l’imagerie religieuse et des élans wagnériens coexistent aux côtés d’histoires où la chanteuse remet « une médaille d’or en art d’être un sacré enfoiré », fustige les hommes qui veulent des femmes dociles, se verse un verre de Sauvignon Blanc bien mérité, et donne son cœur si souvent qu’elle en oublie qu’il fut un jour le sien (sur le morceau phare « Relíquia »).

Tout cela peut sembler beaucoup à absorber en une seule écoute - et ça l’est ; mais c’est une expérience galvanisante qui ne fait que gagner à être répétée. Et si vous choisissez de vous laisser porter par cette fusion épique du sacré et du profane, vous découvrirez qu’elle honore l’engagement qu’elle vous demande.

En termes de déclarations artistiques ambitieuses, « LUX » a des airs de « Vespertine » pour Rosalía - ce qui n’est pas peu dire, puisque cela demeure le chef-d’œuvre de Björk. Peu d’albums ont approché sa symphonie éthérée, une œuvre qui non seulement met en pièces les conventions de la pop contemporaine mais défie aussi les shoots de gratification rapide inhérents à une consommation musicale affamée d’attention et guidée par les algorithmes. Rosalía l’a d’ailleurs revendiqué, confiant au New York Times que « plus nous sommes dans l’ère de la dopamine, plus je veux être l’opposé ». « LUX » est cet opposé. Elle exige votre attention totale ; elle la réclame et la récompense. DM

Voilà.

Avons-nous oublié votre album de l’année ?

Peut-être figure-t-il dans nos mentions honorables de l’année, à savoir : Nourished By Time - « The Passionate Ones » ; Swans - « Birthing » ; Blood Orange - « Essex Honey » ; Sudan Archives - « The BPM » ; aya - « Hexed! » ; Wet Leg - « Moisturizer » ; Natalia La Fourcade - « Cancionera » ; CMAT - « Euro-Country » ; PinkPantheress - « Fancy That » ; Oklou - « choke enough ».

Ou peut-être est-il dans notre bilan de mi-parcours, la liste des Meilleurs albums de 2025... jusqu’ici.

Sinon, dites-le nous, nous vous écouterons et, avec un peu de chance, nous rectifierons. À défaut, nous vous suggérerons respectueusement que vous avez tort.

Restez à l’écoute d’Euronews Culture pour plus de Best Of 2025, dont notre prochain classement des meilleurs films de 2025.

Video editor • Joseph Allen

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