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Lithium : tout savoir sur l'accord entre l'UE et la Serbie qui met les Serbes en colère

Manifestations serbes contre l'exploitation du lithium
Manifestations serbes contre l'exploitation du lithium Tous droits réservés Darko Vojinovic/Copyright 2024 The AP. All rights reserved
Tous droits réservés Darko Vojinovic/Copyright 2024 The AP. All rights reserved
Par Robert Hodgson
Publié le Mis à jour
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Cet article a été initialement publié en anglais

Des groupes écologistes s'apprêtent à manifester dans les rues de Belgrade ce week-end pour protester contre le projet d'ouverture d'une mine de lithium.

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Des groupes écologistes de Serbie ont appelé à ce qu'ils espèrent être une manifestation de masse à Belgrade demain (10 août) contre les projets d'ouverture de la plus grande exploitation minière de lithium d'Europe dans la vallée fertile du Jadar, dans l'ouest du pays, alors que la Chine - troisième producteur mondial - cherche également à s'implanter dans la région.

Le projet minier serbe est une source de malaise croissant depuis que le conglomérat minier anglo-australien Rio Tinto a découvert des gisements d'un nouveau minerai qu'il a baptisé Jadarite il y a vingt ans, mais les tensions ont atteint leur paroxysme en janvier 2022 lorsque le gouvernement du président Aleksandar Vučić a retiré son approbation du plan d'aménagement du territoire du projet minier.

Cette décision faisait suite à des mois de protestations suscitées par la crainte de l'impact environnemental drastique de l'exploitation prévue qui, selon la firme, pourrait produire annuellement quelque 58 000 tonnes de carbonate de lithium (la forme sous laquelle il est largement commercialisé, équivalant à environ 11 000 tonnes de lithium métal pur).

Selon les estimations disponibles, une batterie de voiture électrique typique de 60 kWh nécessite environ 50 kg de sel (contenant 9,4 kg de lithium pur), donc ce gisement est suffisant pour plus d'un million de véhicules de ce type.

Les VE représentant une part croissante des ventes annuelles de voitures (14,6 % des 10,5 millions d'unités vendues l'année dernière en Europe, selon l'association professionnelle ACEA), la valeur marchande du carbonate de lithium devrait augmenter, bien que les prix semblent s'être stabilisés pour l'instant à environ 13 dollars le kilo, après avoir grimpé à cinq fois ce prix en 2022.

Les analystes de BMI - qui fait partie du groupe Fitch, plus connu pour ses notations de crédit - prévoyaient fin juin une hausse plus modeste, mais néanmoins significative, pour atteindre plus de 15 dollars cette année, puis 20 dollars en 2025, l'augmentation de la production permettant de répondre en grande partie à la demande.

Mais le prix sur le marché mondial n'est pas la seule raison pour laquelle l'Europe veut extraire le minerai plus près de chez elle : elle veut éviter de dépendre de grands fournisseurs extérieurs à une époque de tensions géopolitiques croissantes - un fait qui se reflète le plus clairement dans les objectifs de production et de recyclage nationaux de la récente loi sur les matières premières critiques (CRM).

L'Australie est de loin le premier fournisseur mondial, avec ses 88 000 tonnes de lithium, soit près du double de la production du Chili, deuxième au classement, l'année dernière (l'UE a conclu un partenariat stratégique avec le géant minier des Antipodes peu de temps avant la Serbie).

La Chine a produit environ 33 000 tonnes l'année dernière, mais ce chiffre ne reflète pas son importance sur les marchés mondiaux.

Tianqi, une société chinoise qui fait partie des quatre premiers exploitants mondiaux de lithium, est fortement investie dans la production en Australie. Dans une interview accordée au South China Morning Post le mois dernier, le directeur général Frank Ha Chun Shing a déclaré que l'entreprise était en pourparlers avec des partenaires européens potentiels - y compris dans un pays de l'UE dont le nom n'a pas été dévoilé - en vue de se lancer dans la production de batteries.

L'entreprise chinoise Eve Power a commencé à recruter en mars pour sa nouvelle usine de batteries d'un milliard d'euros dans l'est de la Hongrie, tandis que le constructeur automobile chinois BYD a annoncé sa première usine européenne de production de voitures électriques dans le même pays à la fin de l'année dernière (plus récemment, il a annoncé qu'il ouvrirait une installation similaire en Turquie).

Les droits de douane récemment imposés par l'UE sur les véhicules électriques chinois étant peut-être un signe avant-coureur, les entreprises chinoises ont tout intérêt à rapprocher leur production du marché européen.

Les projets de production de lithium au sein de l'UE sont actuellement en suspens, les ambitions du seul producteur important, le Portugal (380 tonnes l'année dernière), d'augmenter considérablement sa production étant également entravées par l'opposition du public et, plus récemment, par desaccusations confusesde corruption.

Ce qui nous ramène à la Serbie, dont l'étude géologique américaine estime les réserves à 1,2 million de tonnes, contre 270 000 pour le Portugal. (L'Allemagne dispose de 3,8 millions de tonnes, selon l'agence gouvernementale américaine, et la Tchéquie de 1,3 million, ce qui soulève des questions intéressantes sur les hypothèses concernant l'acceptation par le public de l'exploitation du lithium trop près de chez lui).

Le 19 juillet, l'UE a signé un protocole d'accord avec Vučić lors d'un sommet de la CRM à Belgrade, en présence du chancelier de la superpuissance automobile européenne, l'Allemagne. Trois jours plus tôt, le gouvernement serbe avait rétabli la licence de Rio Tinto, débloquant ainsi le projet minier.

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Les manifestants s'étaient mobilisés avant même la décision de la Cour suprême du 11 juillet, qui a servi de prétexte à la volte-face du gouvernement et que les opposants au projet minier considéraient clairement comme acquise. Le "partenariat stratégique UE-Serbie sur les matières premières durables, les chaînes de valeur des batteries et les véhicules électriques" a déclenché une nouvelle série de manifestations qui devraient aboutir à ce que les organisateurs espèrent être une démonstration de force ce week-end.

Sources additionnelles • adaptation : Serge Duchêne

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