Latifa Ibn Ziaten : une main tendue à la jeunesse

Latifa Ibn Ziaten : une main tendue à la jeunesse
Tous droits réservés 
Par Valérie Gauriat
Partager cet articleDiscussion
Partager cet articleClose Button

Latifa Ibn Ziaten est la mère de Imad Ibn Ziaten, parachutiste qui fut l’une des 7 personnes assassinées par Mohamed Merah, auteur des tueries de Toulouse et Montauban en mars…

Latifa Ibn Ziaten est la mère de Imad Ibn Ziaten, parachutiste qui fut l’une des 7 personnes assassinées par Mohamed Merah, auteur des tueries de Toulouse et Montauban en mars 2012. Après le meurtre de son fils, Latifa Ibn Ziaten s’est lancée dans une croisade contre la radicalisation, à la tête de l’Association Imad Ibn Ziaten pour la Jeunesse et la Paix. Elle n’a de cesse de parcourir la France pour sensibiliser la jeune génération aux valeurs de la République et du vivre ensemble.

Nous l’avons rencontrée lors de l’une de ses interevntions, au Lycée Fulbert de Chartres.

Femme déterminée et courageuse, Latifa Ibn Ziaten parle ici, avec force et émotion, de son combat et de ses motivations, au micro de Valérie Gauriat.

Interview:

“A chaque intervention que je fais, chaque témoignage, il y a de l‘écoute. La seule chose je sens quand même, certains jeunes malheureusement ils sont perdus. Ils se sentent comme oubliés. Et ca me fait très mal parce que cette jeunesse on a besoin de lui tendre la main, on a besoin de les écouter, de les cadrer, parce que c’est l’avenir. C’est ce que je ressens moi personnellement. Il n’y a pas beaucoup d’espoir Et l’espoir, c’est le plus important. Quand un jeune a de l’espoir, il peut aller loin. Mais s’il n’y a pas d’espoir c’est très difficile. Parce que ca m’arrive de poser des questions aux jeunes. Avez-vous des rèves, ou de l’espoir? Alors l’espoir peu, et le rève pas du tout. Et je pose la question:pourquoi? “On ne peut pas rèver quelque chose qu’on ne peut pas avoir Madame”. Et ça c’est très difficile parce qu’il ferment eux-mêmes les portes. Parce qu’il sentent déjà d’avance qu’ils n’auront pas de chance. Et c’est pour cela que je n’arrète pas de dire à cette jeunesse, démarrez ce moteur, démarrez le. Si vous le démarrez, vous réussirez. Il n’y aura personne pour le démarrer à votre place. Et ça c’est important.

Ce sont des jeunes qui ont besoin aujourd’hui d‘être mis en confiance. Qu’on leur fasse confiance. Surtout il faut les écouter. Parce qu’ils ont plein d’idées, ils sont intelligents. Ils ont besoin juste d’un guide, un bon guide.

Si chacun de nous donne 5 pourcent de soi, le vivre ensemble, dès demain, sera là. Mais il faut le faire. Chacun de nous. Parce qui est-ce qui peut fait vivre le République? Qui est-ce qui peut fait vivre la France ? Qui peut donner de l’espoir à la France ? C’est la société. Et la société c’est elle qui peut donner de la lumière. Parce que l’Etat n’avancera pas seul. C’est à nous. C’est chacun de nous. On oublie les origines, on oublie les confessions, on pense, vraiment, à l’autre. D’aller vers l’autre, tendre la main à l’autre, et surtout le regard. Ce n’est pas grand chose. C’est pour cela que je dis, le regard, quand on regarde quelqu’un en face avec notre coeur. Et on regarde d’un regard sincère, et on a le sourire, on peut dire oui facilement, parce que c’et le coeur qui parle.

Il ne faut pas perdre l’espoir. Moi je ne perds pas espoir. Moi la seule chose que je dis, c’est: où ils sont ces français qui m’ont aidée? Où ils sont ces français qui m’ont fait aimer la France ? Où ils sont ces français qui m’ont appris la valeur? Où ils sont partis? Où ils sont ? Alors il faut qu’ils se réveillent, on a besoin d’eux. On a besoin d’eux, qu’ils disent “voilà, on est là”. C’est très important.

Moi, mon moteur, c’est que nos jeunes réussissent et ne tombent pas dans ce piege de Daech, c’est tres important. Ca me motive aussi d’aider nos jeunes et de les mettre en confiance. Ca me motive parce que j’avais un garçon qui était formidable, un garçon qui avait beaucoup de projets, plein d’espoir. Et je ne peux pas baisser les bras aujourd’hui, et ça c’est mon moteur.

La seule chose que j’ai dit a Imad, c’est “Mon fils, je vais te laisser partir, et tu vas te reposer en paix, et que j’espère que tu auras une place meilleure qu’ici. Mais moi je me battrai pour ta mémoire. Et j’aiderai tous ces jeunes qui ont besoin d’aide. Pour ne pas voir un autre Mérah. Pour ne pas voir une autre mère perdre son enfant comme je t’ai perdu aujourdhui. Jusqu‘à la fin de ma vie je te le promets Imad”. Et je lui ai pris la main. Je vous assure que je parle rarement de cela. Et quand j’ai pris sa main, on aurait dit qu’il dormait et souriait en même temps. Sa main était douce. Et je lui ai dit je te promets… Mes enfants commencaient à pleurer. Je me suis retournée et j’ai dit ne pleurez pas, il faut qu’on respecte Imad. Regardez, il sourit avec nous Alors on doit être tous à la hauteur, on sera tous pour lui et on va rester tous debout pour lui. Et pour toute cette jeunesse. Et quand je suis sortie de la morgue, je suis sortie à l’extérieur, j’ai crié tellement fort, je ne sais pas ce cri d’où il est sorti. Jusqu‘à ce que sorte de la mousse de mon nez. Toute cette force, elle est sortie en criant dehors. Les gens regardaient ce qui se passait, mais il fallait que je crie. Mais je pouvais pas pleurer devant mon fils. La seule chose, j’ai dit a Imad tu reposeras en paix mon fils, mais tu seras toujours là. Tu seras toujours ici. A chaque aide que j’apporterai, tu vas grandir. Il est toujours là, il n’est pas parti. Il n’est pas parti mon fils.

Partager cet articleDiscussion

À découvrir également

Vivre avec le terrorisme

Aide aux victimes : les leçons tirées des attentats du 13 novembre 2015 à Paris

Allemagne : la transition énergétique face aux résistances locales et aux lourdeurs administratives