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Michel Barnier encensé à Bruxelles, son influence pourrait lui être fort utile

Jean-Claude Juncker, à gauche, et Michel Barnier.
Jean-Claude Juncker, à gauche, et Michel Barnier. Tous droits réservés AP Photo/Geert Vanden Wijngaert
Tous droits réservés AP Photo/Geert Vanden Wijngaert
Par Shona Murray
Publié le Mis à jour
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Cet article a été initialement publié en anglais

Bien qu'il se soit retiré de la vie politique ces dernières années, le nouveau Premier ministre français a gagné beaucoup de respect à Bruxelles en tant que principal négociateur du Brexit.

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Deux mois après les législatives anticipées qui ont abouti à une assemblée fragmentée en trois blocs, le président français Emmanuel Macron a nommé jeudi Michel Barnier au poste de Premier ministre, déclarant qu'il souhaitait créer "un gouvernement de rassemblement au service du pays".

Alors que ce Savoyard de 73 ans a déjà entamé ses premières consultations vendredi matin, ses anciens collègues font la queue pour le féliciter pour son retour au cœur de la politique européenne.

"Je suis très heureux de la nomination de Michel Barnier", a déclaré l'ancien président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, à Euronews.

"Je l'ai nommé négociateur en chef pour le Brexit, et pendant cette période, j'ai ressenti son talent à écouter et à parler de manière compréhensive à ceux qui l'écoutaient. Il était très intelligent, et aussi très bien préparé."

"Dans les détails des négociations (du Brexit), il a été le meilleur que l'on pouvait imaginer - il a un vrai talent de négociateur parce qu'il l'a fait d'une manière différente. Il parlait à ses homologues britanniques, à tous les Premiers ministres, au Parlement, à la Commission plusieurs fois par semaine", a déclaré M. Juncker, qui s'est également opposé à la caricature de M. Barnier en tant qu'"ennemi de la Grande-Bretagne" faite par les politiciens pro-Brexit.

"Il avait une idée positive du Royaume-Uni et voulait seulement tirer le meilleur des négociations", a déclaré l'ancien président de la Commission de 2014 à 2019.

Il a l'habitude de négocier

Michel Barnier n'était pas a priori le premier choix d'Emmanuel Macron. Le président français avait d'abord envisagé la candidature du social-démocrate et ex-Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve, ainsi que le président de centre-droit de la région Hauts-de-France, Xavier Bertrand. Le maire de Cannes, David Lisnard, un homme de droite, aurait également été pressenti.

Mais aucun de ces candidats n'était considéré comme susceptible d'obtenir l'approbation du Parlement, étant donné les divisions politiques de plus en plus marquées en France.

Michel Barnier y parviendra-t-il ? Selon ceux qui ont travaillé en étroite collaboration avec lui, notamment durant les douloureuses négociations du Brexit, l'ancien commissaire Barnier dispose des atouts nécessaires pour au moins essayer de combler le fossé.

Michel Barnier et Emmanuel Macron en 2019.
Michel Barnier et Emmanuel Macron en 2019.Michel Euler/Copyright 2019 The AP. All rights reserved.

Jean-Claude Juncker a prédit qu'il "essaierait de réunir des gens qui ne peuvent pas imaginer qu'ils peuvent travailler ensemble".

"Il a l'habitude de négocier avec des gouvernements de coalition dans toute l'Europe. Et il n'est pas d'extrême droite, il est du centre droit modéré", a insisté l'ancien président.

Interrogé sur la possibilité que M. Barnier parvienne à tempérer les divisions profondément enracinées auxquelles la France est actuellement confrontée, M. Juncker s'est montré optimiste.

"N'exagérons pas l'influence qu'il peut avoir sur la situation en France. Mais il est sans aucun doute l'un des meilleurs choix à l'heure actuelle."

Maintenir l'unité de l'UE

Georg Riekeles, conseiller diplomatique de M. Barnier pendant le Brexit, a déclaré pour sa part que la réussite de son patron à "stabiliser le navire" après le choc du Brexit en 2016 était sa "plus grande réussite".

"Nous n'y pensons plus aujourd'hui, mais en 2016, on se demandait si le Brexit n'était pas le début d'un mouvement européen plus large en faveur des référendums. Des dirigeants politiques disaient : "C'est notre moment". C'était perçu comme un moment existentiel pour l'UE".

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"L'une des choses qu'il a réussies dans le cadre de l'effort d'équipe a été de faire en sorte que les 27 (États membres) se serrent les coudes.

M. Riekeles affirme que Bruxelles craignait que le référendum sur le Brexit ne déclenche rien de moins que la disparition de l'UE et que l'unité qui a émergé au cours des négociations ultérieures était "loin d'être acquise".

Michel Barnier lors de la passation de pouvoir avec Gabriel Attal, le Premier ministre sortant.
Michel Barnier lors de la passation de pouvoir avec Gabriel Attal, le Premier ministre sortant.Sarah Meyssonnier/AP

"La question à l'époque était de savoir si l'UE pouvait rester unie, avec un seul négociateur, ou si les États membres, grands ou petits, feraient cavalier seul pour essayer d'obtenir le meilleur accord possible", se souvient M. Riekeles, qui est aujourd'hui directeur associé du groupe de réflexion European Policy Centre, basé à Bruxelles.

"Il a construit une plate-forme commune avec des principes fondamentaux, il a rallié et compris les enjeux pour l'Irlande et l'Irlande du Nord. Et si une question était existentielle pour un pays, elle l'était aussi pour tous. Il a fait valoir qu'il n'y avait aucun intérêt à faire partie d'une union dans le cas contraire".

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De même, le message de "protection de l'intégrité du marché unique" - il a été l'architecte de cette unité".

Le budget de la France sous étroite surveillance

Les louanges adressées à M. Barnier par Bruxelles constituent un changement radical par rapport à l'image dévalorisée qu'il avait il y a quelques semaines à peine. En effet, malgré tout le crédit qu'il a reçu au cours du processus de Brexit, il semblait jusqu'à présent que la carrière de M. Barnier était arrivée au bout du chemin.

Bien qu'il ait occupé plusieurs postes importants dans les gouvernements précédents - notamment ministre des Affaires étrangères, ministre de l'Agriculture et ministre délégué aux Affaires européennes - il était souvent décrit comme n'ayant pas un profil de premier rang en France.

Comme l'a indiqué l'ancien diplomate britannique Peter Ricketts sur X : "Je connais Barnier par intermittence depuis 30 ans, depuis qu'il a été ministre de l'Europe pour Chirac en 1995. C'est un technocrate compétent, formel, inflexible, qui n'est pas très connu en France, car il a passé des décennies à occuper divers postes à Bruxelles."

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"Son principal avantage pour Macron est probablement qu'il a moins d'ennemis que d'autres. C'est essentiel car sa tâche consiste à mettre en place un gouvernement qui survivra à une motion de censure, puis à faire adopter un budget".

Le budget : l'alpha et l'oméga du prochain gouvernement français dont le déficit excessif et la dette abyssale valent aujourd'hui à la France une surveillance renforcée de la Commission et des marchés financiers. Grâce à son réseau et à son influence, Michel Barnier va devoir non seulement convaincre les députés français, mais aussi la Commission européenne et l'Eurogroupe concernant la nouvelle trajectoire budgétaire du pays.

Au-delà du concert d'applaudissement à l'annonce de sa nomination, les anciens collègues de Michel Barnier, qui l'admirent, ont évité de mentionner le virage spectaculaire vers la droite populiste qu'il a opéré lors de sa candidature malheureuse à l'investiture de son parti pour la présidence française en 2021.

Michel Barnier avait alors appelé à un "moratoire sur l'immigration" et à un resserrement des critères de regroupement familial. Il a également demandé que le droit français prime sur le droit européen ou international, que la France retrouve sa "souveraineté juridique pour ne plus être soumise aux arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne". Des déclarations qui avaient pour le moins intrigué de nombreux observateurs bruxellois.

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Au final, sa candidature était tombée à l'eau et les Républicains avaient fini par écarter sa candidature. Michel Barnier avait alors disparu de la scène politique pendant quelques années, jusqu'à son retour soudain cette semaine.

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