Drogues en France : politique répressive et forte consommation de cannabis

Drogues en France : politique répressive et forte consommation de cannabis
Par Marie Jamet
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Drogues les plus consommées

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Le cannabis reste, en France, la drogue illicite la plus consommée. En 2010, 13,4 millions de Français âgés de 11 à 75 ans ont expérimenté le cannabis au moins une fois dans leur vie, dont un tiers en a fait usage au moins une fois dans l’année. 1,2 million d’entre eux sont des usagers quotidiens de cannabis. Pour toutes les autres drogues, les estimations sont bien plus faibles. La diffusion de la cocaïne dans la population est dix fois plus faible que le cannabis avec seulement 1,5 million de Français ayant pris de la cocaïne au moins une fois dans leur vie. Ils sont 1,1 million pour l’ecstasy et 500 000 pour l’héroïne. Ils sont encore moins à avoir consommé ces produits dans l’année (400 000) ; il s’agit surtout de consommation de cocaïne et de poppers.

Qui ?

Une première ligne de différenciation est le sexe. La consommation de drogues illicites est plutôt le fait des hommes que des femmes. Les hommes (de 18 à 64 ans) sont par exemple quatre fois plus nombreux à consommer régulièrement du cannabis que les femmes (3,4% contre 0,9%).

Autre marqueur : l’âge. La jeunesse correspond à une période d’expérimentation des drogues illicites. Les chiffres montrent que l’expérimentation diminue avec l’âge et disparaît presque après 55 ans. Si on exclut le cannabis, l’expérimentation de produits plus rares est peu répandue chez les moins de 15 ans. Le cannabis reste la drogue illicite la plus expérimentée (41,5%) et la plus consommée régulièrement (6,5%) par les jeunes. L’âge moyen de l’initiation au cannabis est 15,3 ans.

Cadre légal

La France a une politique parmi les plus répressives d’Europe en matière de drogue. La loi en vigueur date de 1970. Un consommateur encourt un an d’emprisonnement et/ou 3 750 euros d’amende. Cet usager encourt également, à titre de peine complémentaire, l’obligation d’accomplir un stage payant de sensibilisation aux dangers des produits stupéfiants.
La détention de stupéfiants, même en petite quantité, et la culture sont assimilées par la justice à l’usage de stupéfiants et sont donc condamnables.
Deux lois complètent celles de 1970 concernant les usagers-revendeurs, ou usagers-trafiquants. Ces usagers risquent plus, sauf s’ils dénoncent leurs complices, et sont écartés de l’alternative sanitaire.
Par ailleurs, « le procureur peut enjoindre à un usager, même mineur, de se soigner. » Cette injonction thérapeutique suspend les poursuites.

Dans la réalité des faits, ces peines très lourdes sont peu infligées en l’état. Les magistrats disposent de nombreuses alternatives à la prison et aux poursuites.

Cette politique répressive se traduit par de nombreuses condamnations : 50 092 en 2011. Celles-ci ne sont pas détaillées par substance. Mais 90% des interpellations pour infraction à la législation sur les stupéfiants mettent en cause le cannabis. L’usage compte pour 58% des condamnations et 30% de celles-ci sont des peines de prison (ferme ou avec sursis). La détention et l’acquisition de produits stupéfiants représentent 20% des condamnations quand le trafic et la revente comptent pour 21% d’entre elles.

La dépénalisation est en débat mais est très loin d’être adoptée (lire notre article sur le sujet). La question divise les hommes politiques au sein même des partis.

En 2012, les autorités ont saisi 54,4 tonnes de cannabis (résine ou herbe), provenant à 94% du Maroc. En 2012 toujours, 701 kg d’héroïne, 5,6 tonnes de cocaïne et 157 000 comprimés d’ecstasy ont été saisis. Pour ces trois produits, les saisies diminuent après des années de hausse.

Prévention et soins

Depuis la loi de 1970, le soin fait partie de la lutte contre les toxicomanies.
Les usagers peuvent chercher de l’aide ou être envoyés dans un peu plus de 400 centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA). Une quarantaine d’entre eux proposent des cures de plusieurs semaines.
Nombre d’usagers font aussi appel aux services d’urgence, à leur médecin généraliste ou à des associations, nombreuses et se fondant sur des valeurs parfois très différentes.
Les jeunes peuvent se tourner vers les consultations jeunes consommateurs (CJC) dispensées par la plupart des CSAPA. En termes de prévention, l’action politique dans ce domaine se donne quatre objectifs : « décourager l’initiation, repousser l’âge des premières consommations, éviter l’usage nocif et réduire les conséquences sanitaires et sociales des consommations au plan individuel et collectif ».

Cela passe par des outils traditionnels de communication, comme des sites web (Drogues info service et MiDLT), et des lignes téléphoniques d’écoute ainsi que des campagnes de prévention dans les médias dont le web. Des actions diverses sont menées auprès des familles mais aussi des milieux scolaire, universitaire, professionnel, sportif et de loisirs.
Mais dorénavant, cette logique est comprise aussi en termes de réduction des risques. Le projet, repoussé pour le moment, d’ouverture test d’une salle de shoot à Paris s’inscrit dans cette démarche. Les soins suivent cette tendance. A ce sujet, lire notre article sur le Centre d’addictologie de l’hôpital de l’Arbresle.

Sources

L’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) a publié ses rapports annuels en juin et juillet derniers. Chiffres

Politique et lois

Prévention et soins

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