Deux films européens à ne pas manquer

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Par Euronews
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Alors que les films américains et français se taillent dans l’hexagone la part du lion, quelques films, plus discrets mais passionnants, sortent sur les écrans en provenance de pays européens dont on oublie qu’ils ont aussi de grandes cinématographies. L’Allemagne, avec Phoenix de Christian Petzold, et la Suède avec Snow Therapy en sont deux très bons exemples.

Snow Therapy lave plus blanc…

Ruben Öslund est considéré comme le nouveau trublion du cinéma suédois. Après son très polémique et politiquement incorrect Play qui mettait en scène un groupe de jeunes blacks qui rackettait des petits blancs à Göteborg, il s’attaque ici à l’image de la famille idéale et de l’homme triomphant occidental. Snow Therapy (paradoxalement il s’agit du titre français, le film s’intitulant en suédois Force Majeure) nous emmène dans une station de ski des Alpes françaises (Les Arcs) où une famille vient passer une semaine de vacances au grand air. La neige est bonne, le soleil brille, l’hôtel a au moins 4 étoiles mais lors d’un repas dans un restaurant d’altitude, une avalanche va briser le tableau idyllique. L’avalanche ne fera aucun dégât au sens propre mais sera le déclencheur d’une remise en cause en profondeur du couple. Le père rentre dans un processus de déni, refusant d’admettre sa lâcheté –il a en effet fuit avec son i-phone devant le danger plutôt que de protéger sa progéniture. L’épouse ne tardera pas à briser la glace et, en dessous, les failles sont béantes.
L’esthétique du film est très graphique et tend à isoler les personnages soit dans l’immensité des montagnes, soit dans l’hôtel hi-tech très clean aux lignes épurées. Pas grand-chose de charnel se dégage du couple qui évolue sans se toucher et dont la distance ne fera que croître jusqu’à la scène finale où l’on se rend compte qu’il ne suffit pas de marcher sur la même route pour aller dans la même direction. Bref, l’incommunicabilité est au centre de ce film glaçant et grinçant dans ce qu’il montre des relations humaines où le langage et l’échange sont remplacés par les non-dits, le refoulement et l’individualisme forcené. Ultra-moderne solitude chantait Alain Souchon…

Phoenix, après la mort, la vie…

Voici l’un des plus beaux films de ce début d’année signé Christian Petzold, à qui l’on doit aussi Barbara, situé dans l’Allemagne de l’Est des années 80, et interprété déjà par Nina Hoss, son actrice devenue fétiche, et qui incarne dans Phoenix Nelly, une jeune femme survivante des camps, et défigurée. Mais de son visage on ne verra rien, comme si l’horreur ne pouvait être montrée. De retour chez elle (sans bandelette mais avec une nouvelle figure) elle n’aura de cesse de chercher son mari qui, pourtant, est peut-être celui qui l’a trahie et dénoncée aux nazis… Lorsqu’elle le retrouve, il la prend pour une autre, mais lui trouve une ressemblance avec celle qu’il croît morte. Il va alors lui proposer un plan diabolique… Sur une trame romantique –même si le fond est tragique- Phoenix est le parcours d’une femme qui ne veut pas laisser l’amour mourir. Car c’est ce sentiment qui l’a fait survivre à l’horreur, l’espoir de revoir l’être aimé, devenu son unique raison de vivre dans les camps de la mort. Nelly sera incomprise par son amie qui l’a recueillie à son retour, et qui ne comprend qu’elle accepte de rentrer dans le jeu de son mari veule et sans scrupule. En creux, Petzold nous donne à voir une Allemagne oublieuse et à genoux, un Berlin fantomatique où les revenants côtoient les vivants qui n’ont qu’une peur, celle de se retourner sur leur passé immédiat. Nelly remarque plusieurs fois dans le film que personne ne lui demande comme c’était « là-bas », dans les camps de l’horreur. Cette Allemagne de l’après-guerre fait comme si de rien n’était, empressée de faire renaître un Phoenix clinquant et insouciant, à l’image du nom de la boîte de jazz où Nelly retrouvera pour la première fois son mari. La ville est évoquée par des scènes de nuits où des ombres errent au milieu d’un champ de ruines. La reconstitution n’est pas forcément fidèle, à l’instar d’un Polanski dans Le Pianiste ou d’un Spielberg dans La Liste de Schindler. Le cinéaste préfère ici l‘évocation, voire la théâtralité, pour montrer la désolation des lieux comme des âmes. Une magistrale réussite due en grande partie à l’interprétation toute en émotion retenue de Nina Hoss.

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