Ayoub Kassem : "l'opération SOPHIA profite surtout aux trafiquants"

Ayoub Kassem : "l'opération SOPHIA profite surtout aux trafiquants"
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Par Valérie Gauriat
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Ayoub Kassem est le porte parole de la Marine Nationale en Libye. Il déplore le manque de moyens dont disposent les forces maritimes libyennes pour faire face à l'immigration clandestine, et dénonc

*Vidéo disponible en arabe uniquement

“Nous sommes esclaves de la méteo. Nos petits bateaux n’ont pas la capacité de se deplacer facilement si la mer est agitée. Quand la mer n’est pas calme on est impuissants. Parlons du matériel, malheureusement on a pas de materiel. On a demande plusieurs fois l’aide des gouvernements concernés. On a même demandé a l’Union européenne lors de plusieurs rencontres avec les responsables politiques et militaires européens quils nous rendent nos bateaux qu’ils gardent en Italie. Ils sont prêts depuis aout 2014 mais jusqu‘à maintenant il ne les ont pas rendus. Ils nous font beaucoup de promesses, mais nos capacités restent les mêmes, et les victimes de l’immigration clandestine sont de plus en plus nombreuses en mer.

Je ne vois pas de problème dans l’opération Sophia elle-même. Mais le plus grand problème c’est la volonté des politiciens européens qui veulent montrer à leur peuples qu’ils font tout pour les protéger de ce phénomène. Nous les militaires on suit les instructions; cette opération est plutôt une mise en scène médiatique. Le problème c’est la décision politique européenne qui l’a mise en place.

La présence de bateaux militaires près des côtes libyennes, et en plus celle des bateaux des ONGs, alors qu’il travaillent tous pour sauver les migrants, a certainement aidé a encourager les migrations clandestines.

Avant on sauvait des dizaines de personnes, là on doit en sauver des dizaines de milliers. Et quand le nombre de gens qui tentent de partir augmente, le nombre de victimes augmente aussi. C’est une conséquence normale. C’est n’importe quoi de dire qu’on aide les immigrants, alors que ce sont les victimes qui paient. On a bien remarqué que depuis que ces bateaux se sont approchés, et surtout les bateaux des ongs, que cette annee le nombre de victimes a augmenté.

Le nombre de migrants a augmenté, et ils sont devenus beaucoup plus audacieux. Même le nombre de familles et d’enfants a augmenté. En plus, beaucoup parmi eux se rebellent contre les bateaux libyens. Ils disent , “attendez! La-bas il y a des bateaux qui m’attendent pour m’emmener en Europe”. Parfois même ils se rebellent contre les gendarmes qui les arrêtent. Tout cela on l’a remarque dans l’année qui vient de s‘écouler. La proximité de ces bateaux influence les choses dans le mauvais sens. Parfois tu trouves des navires de l’opération Sophia à 12 miles nautiques seulement des côtes libyennes.

Les premiers bénéficiaires de l’opération SOPHIA ce n’est ni l’Europe, ni la Libye, mais les trafiquants.

L’immigration clandestine est devenu un commerce de plus en plus prospère, et les passeurs n’ont fait qu’augmenter leurs bénéfices.

Il faudrait exercer une pression sur les Etats frontaliers de la Libye comme le Niger ou le Tchad, pour qu’ils ferment leurs frontières. Ils étaient d’accord pour déployer des troupes aux frontières. Mais ils ont demandé un soutien logistique pour accomplir cette mission. Ces fonds dépensés dans l’opération de sauvetage en mer auraient pu être utilisés dans une opération de protection des frontières de la Libye pour lutter contre l’immigration illégale.

Pourquoi n’y aurait-il pas par ailleurs d’opérations de rapatriement dans les pays d’origine dès l’arrivée des migrants en Europe, afin de dissuader les autres de suivre le même chemin ?

Pouquoi ne fait-on pas d’enquète sur les ateliers et les entreprises qui fabriquent et exportent en Libye les bateaux qui servent à l’immigration clandestine ?

Beaucoup de ces zodiacs viennent d’Egypte, de Chine, de Turquie, et de quelques pays d’Europe. Et les services de renseignement européens le savent très bien.

Quand les migrants comprendront qu’ils ne pourront plus passer les frontières, parce qu’il n’y aura plus de bateaux par exemple, ils perdront espoir, et seront contraints de rentrer chez eux. Et cela convaincra les autres de ne pas venir.

Mais de garder les migrants en Europe, en fermant les yeux sur les flots de bateaux qui arrivent en Libye, et dont l’origine et les fabriquants sont bien connus en Europe, tout en pleurant sur le sort des victimes de naufrage, cela ne peut que maintenir un cercle vicieux.”

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