L’agriculture française, un géant à requinquer

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Par Euronews
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L’agriculture française est toujours la première d’Europe. En surface cultivée, d’une part : même en baisse, elle est de 28 millions d’hectares. Soit la moitié de la France métropolitaine. Et autant que les terres agricoles de l’Allemagne et de l’Italie réunies.

Elle est également championne en valeur, autant dans les productions végétales (devant l’Italie) qu’animales (devant l’Allemagne). Avec ses céréales, fruits et légumes, vins et alcools, poulets, veaux, vaches, cochons, chevaux, lait et œufs, la « ferme France », c’est 69,2 milliards d’euros de production. Plus que le chiffre d’affaires d’Airbus, une fois et demie celui de Peugeot-Citroën.

Ceci étant, l’agriculture a perdu de son poids relatif. Dans la France des années 1950, c‘était un huitième de l‘économie française. Elle n’en représente qu’un peu moins de 3 % aujourd’hui. Mais il faut préciser qu’en parallèle à la marginalisation de la production des matières premières agricoles, c’est tout un univers de la transformation, celui de l’industrie agroalimentaire, qui a pris son essor. Avec ses 190 milliards d’euros de chiffre d’affaires, l’agroalimentaire est devenu un mastodonte de l’économie française. Le secteur produit encore plus que l‘énorme appétit des Français (140 milliards d’euros par an de dépenses des ménages dans l’alimentation).

Tout comme l’agroalimentaire, la « ferme France » reste un poids lourd du commerce extérieur : 58,7 milliards d’euros exportés avec un solde positif de 6,1 milliards en 2016. C’est cependant un résultat moins bon que l’année précédente. La campagne de céréales catastrophique (du fait des inondations dans plusieurs régions dont le Bassin parisien, hyper productif) n’explique pas tout. L‘économiste Louis Bourgeois tire la sonnette d’alarme : « Il faut s’inquiéter de voir se creuser chaque année davantage notre balance commerciale dans certains domaines. Ceux du poulet transformé, ou des fruits frais et en conserve, atteignent aujourd’hui 5 milliards ! »

Autre faiblesse, le manque de rentabilité des exploitations françaises. Sans subvention, 54 % d’entre elles seraient dans le rouge. La proportion atteint 57 % dans les bovins à lait, 69 % dans les céréales et oléoprotéagineux, 75 % dans les bovins mixtes (lait et viande), les moutons, brebis et chèvres. Et jusqu‘à 85 % dans les bovins à viande. Même après subventions – et l’agriculture française en reçoit pour 10 milliards par an, soit une moyenne de 30 000 euros par exploitation et par an – plus d’une exploitation sur dix reste déficitaire. D’ailleurs, alors que l’an dernier le nombre de défaillances d’entreprises a baissé de 8 % pour l’ensemble de l‘économie, il a augmenté de 4 % en agriculture (en particulier dans le lait et le porc).

Respecter la nature

Bonne ou mauvaise, la tendance est à la concentration des exploitations françaises : plus de 2 millions dans les années 1950, presque 500 000 en 2010, elles ne sont plus que 450 000 en 2013. Logiquement, la surface moyenne augmente : 43 hectares en 2000, 61 hectares aujourd’hui. Le nombre d’exploitants est au diapason : 764 000 en 2000, 578 000 en 2013, auxquels s’ajoutent environ 300 000 salariés. La part de l’agriculture dans l’emploi français a été divisée par dix depuis l’après-guerre.

Productivité du matériel, informatisation, qualité des prévisions météo, amélioration des semences et de la génétique des animaux… les gains de productivité sont galopants. Bientôt, serres à tomates réglées comme des Formule 1, robots pour distribuer le fourrage, labours par des tracteurs en pilote automatique seront choses banales. En espérant que soit réglé l’ultime défi : produire plus, vendre plus cher… sans que l’environnement ne reste, lui, dans le rouge. Du bio, du sain, des œufs, cochons, bovins, volailles produits dans le respect du bien-être animal, c’est la demande de plus en plus forte du consommateur, que la « ferme France » ne parvient pas, paradoxalement, à fournir en quantité suffisante. Définitivement plus qu’une niche, l’agriculture raisonnable est d’ailleurs désormais considérée comme un relais de croissance par le principal syndicat agricole, la FNSEA. Sa présidente par intérim actuelle, Christiane Lambert, qui pourrait succéder bientôt à Xavier Beulin, victime d’un décès soudain, évoque volontiers les « mille modèles » de l’agriculture française.

André Thomas, Ouest France

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