Intox en pagaille dans le débat présidentiel Le Pen-Macron

Intox en pagaille dans le débat présidentiel Le Pen-Macron
Tous droits réservés 
Par Euronews
Partager cet articleDiscussion
Partager cet articleClose Button

Brexit, aménagements de peine, chômage, ECU, numerus clausus... Les inexactitudes, contre-vérités et imprécisions des deux candidats du second tour de la présidentielle.

PUBLICITÉ

Le débat entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron a apporté son lot d’inexactitudes, de contre-vérités et d’imprécisions, des intox, des fake-news qui ont pollué le débat et ses 16,5 millions de téléspectateurs. En voici une liste sans doute non-exhaustive… Vous pouvez en ajouter en commentaires.

Brexit et économie du Royaume-Uni

L‘économie britannique ne s’est jamais aussi bien portée que depuis que les Britanniques ont décidé de reprendre leur liberté“, a assuré Marine Le Pen.

Celle-ci veut ainsi rassurer les Français par rapport à un éventuel Frexit, mais c’est une affirmation trompeuse et exagéré, même si les effets du Brexit sur l‘économie britannique ont été jusqu‘à présent moins importants que ce que la plupart des économistes avaient anticipé,

Le produit intérieur brut britannique a bien augmenté d’1,8% en 2016, nettement plus que la France (1,1 %), mais cela c‘était avant le Brexit.

Le FMI a récemment revu à la hausse sa prévision de croissance outre-Manche pour 2017, à 2 % au lieu d’1,5 % précédemment, mais ce premier trimestre a enregistré un net ralentissement.

Le rythme de croissance de l‘économie britannique reste toutefois inférieur à celui atteint par le passé : 2,3 % en 2015, 2,6 % en 2014 et des taux supérieurs à 3 % au début des années 2000.

Et première conséquence directe pour les Britanniques, l’inflation affecte leurs dépenses et pèse sur l’activité.

Contribution nette de la France au budget européen

Lors du débat, Marine Le Pen a déclaré que la participation nette française au budget européen était de 9 milliards d’euros. Et c’est notamment sur ce chiffre qu’elle estime pouvoir s’appuyer pour négocier avec Bruxelles en cas de victoire.

Mais ce chiffre est sur-évalué et réducteur.

En 2015, 14,47 milliards d’euros de crédits de l’Union européenne ont été dépensés en France. La France a versé 19,01 milliards d’euros au budget de l’Union européenne. Elle a aussi perçu 2,08 milliards d’euros en droits de douane et en prélèvements agricoles pour le compte de l’Union européenne, dont elle peut retenir 25 % au titre des frais administratifs. Soit une contribution nette de 4,5 milliards d’euros, à laquelle on peut rajouter 1,599 milliards d’euros en prenant en compte le montant des ressources propres traditionnelles transférées au budget européen. Soit environ 6,1 milliards d’euros. Ce qui est en-dessous du chiffre annoncé par Marine Le Pen et pratiquement celui d’Emmanuel Macron.

Pour en savoir plus sur la contribution française au budget européen.

L’euro, l’ECU ?

Marine Le Pen a déclaré que “de 1993 à 2002, toutes les grandes entreprises françaises pouvaient payer en euros“.

C’est faux. L’euro a d’abord été introduit sous sa forme immatérielle, mais c‘était le 1er janvier 1999, et non en 1993. La monnaie commune n’a existé réellement que de 1999 à 2002, pendant la transition des monnaies nationales à l’euro, avec des taux de change fixes de celles-ci vers la nouvelle monnaie.

Puis, elle s’est défendu en disant que les entreprises pouvaient payer leurs homologues européennes en ECU, ancêtre de l’euro.

C’est faux. L’ECU, créé en 1979 dans le cadre du système monétaire européen (SME), était un panier de monnaies, destiné à stabiliser les taux de change entre les différentes monnaies européennes. Il n’a jamais été utilisé par des acteurs privés pour des échanges internationaux.

PUBLICITÉ

L’euro et l’augmentation des prix

Marine Le Pen a parlé d’une augmentation spectaculaire des prix depuis l’arrivée de l’euro. Selon l’INSEE, l’indice des prix à la consommation augmente, mais il n’y a pas eu de point du rupture dans la hausse au moment de l’arrivée de l’euro. Cependant, il est vrai que les ménages ont pu constater des hausses des prix, de manière très fluctuante, sans que les salaires suivent cette hausse (inflation), comme l’indique ce graphique de l’INSEE.

Chômage, les chiffres

Emmanuel Macron a affirmé qu’il y avait “plus de chômeurs” dans les années 1990 qu’aujourd’hui. C’est faux si l’on tient compte du nombre de chômeurs, vrai si l’on prend en compte le taux de chômage.

Le nombre de chômeurs est légèrement plus élévé maintenant qu’au début des années 1990 : 2,783 millions fin 2016 en métropole, contre 2,622 millions au deuxième trimestre 1994. Mais le taux de chômage était plus élevé à l‘époque : 10,4 % au deuxième trimestre 1994, contre 9,7 % fin 2016.

PUBLICITÉ

Vente de SFR et des chantiers navals de St Nazaire

Contrairement à ce qu’a dit Marine Le Pen, Emmanuel Macron n‘était pas ministre de l’Economie, mais secrétaire général adjoint de l’Elysée, quand la vente de SFR, propriété de Vivendi, à Numericable, propriété de Patrick Drahi (groupe dont fait partie BFMTV) a été décidée le 5 avril 2014.

Mais l’opération s‘était effectivement officiellement conclue en novembre 2014, trois mois après l’arrivée à Bercy de Macron.
Pour info, Emmanuel Macron s‘était ensuite opposé publiquement au rachat de Bouygues par SFR-Numericable.

Concernant une autre vente épinglée par Mme Le Pen, Macron n‘était plus ministre quand le groupe italien Fincantieri a obtenu le 6 avril le feu vert du gouvernement français à la reprise des chantiers navals de Saint-Nazaire, qui appartenaient alors au groupe sud-coréen STX, placé en redressement judiciaire en 2016.

Loi Taubira de 2014 sur la justice

PUBLICITÉ

Les deux candidats ont attribué faussement à la loi dite Taubira la possibilité d’aménager les peines de prison ferme de moins deux ans.
Cette possibilité d’aménager les peines de prison ferme de moins de deux ans, contre un an auparavant, a en fait été introduite par la loi Dati de 2009, durant le quinquennat de Nicolas Sarkozy. La loi Taubira de 2014 a, elle, introduit la contrainte pénale et supprimé les peines plancher.
Concernant la double peine, elle n’a pas été supprimée, mais la loi a prévu davantage d’exceptions.

Santé : numerus clausus et Jean-Jacques Mourad

Contrairement à ce qu’affirme Marine Le Pen, le gouvernement en place a relevé le numerus clausus, c’est-à-dire le nombre d‘étudiants accédant à la deuxième année d‘études de médecine pendant ce quinquennat.

En 2016, 131 places supplémentaires ont été créées dans 10 régions en manque de médecins, et en 2017 478 places supplémentaires dans 22 facultés.

Marine Le Pen a par ailleurs reproché à Emmanuel Macron d’avoir comme conseiller santé un lobbyiste du laboratoire pharmaceutique Servier. Celui-ci, Jean-Jacques Mourad, a démissionné en mars de son équipe après des révélations sur un possible conflit d’intérêt. Au moment où il avait été sélectionné comme conseiller santé, cet enseignant-chercheur n’avait pas déclaré des vacations faites pour le laboratoire Servier.

PUBLICITÉ

Terrorisme et accusations

Mme Le Pen a aussi réitéré ses attaques concernant Mohamed Saou, référent d’En Marche! dans le Val d’Oise. Mais celui-ci, dès qu’il a été soupçonné de liens avec le fondamentalisme islamiste, a été mis en retrait de ses fonctions.

Concernant l’attaque de Paris, juste avant le premier tour, le 20 avril, Karim Cheurfi, qui a tué un policier sur les Champs-Elysées, n‘était pas sous contrôle judiciaire et ne violait pas ses obligations depuis un an et demi, comme l’a affirmé Marine Le Pen.

Il était sous un régime de sursis mise à l‘épreuve, pour un vol aggravé commis en octobre 2013. Condamné à quatre ans de prison dont deux avec sursis mise à l‘épreuve, il avait été libéré le 14 octobre 2015. Il s‘était rendu de mi-janvier à mi-février 2017 en Algérie, sans avertir la justice comme il aurait dû le faire. Il avait alors été rappelé à l’ordre mais son sursis n’avait pas été révoqué.

Par ailleurs, le parquet de Paris avait ouvert le 9 mars une enquête pour entreprise individuelle terroriste contre lui.

PUBLICITÉ

Avec AFP et Les Décodeurs

Partager cet articleDiscussion

À découvrir également

Débat de l'entre-deux tours : "un flot d'invectives"

Apre débat et attaque en règle : Le Pen-Macron à J-4

Matteo Salvini a rassemblé ses alliés populistes à Rome avant les élections européennes