"Les gouvernements européens manquent une occasion incroyable de transformer l'économie"

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Par Stefan GrobeEuronews
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Les Etats membres de l’UE ont encore quelques semaines pour présenter aux institutions leur stratégie de reprise, financée en partie par des fonds européens. Or ces plans détermineront la société de demain.

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Le plan de relance de l’UE est une enveloppe de 750 milliards d’euros. A cet outil inédit et temporaire, né pour répondre à la crise économique provoquée par le covid-19, s’ajoute le budget européen à long terme. C’est en tout 1 800 milliards d’euros disponibles pour aider les Etats membres à relancer la machine économique et l’ensemble de la société.

Dans l’immédiat, pour ne pas enrayer la reprise la Commission européenne a prolongé les exemptions en matière de règles budgétaires afin d'atténuer le choc économique. "Retirer trop rapidement ces mesures de soutien serait une erreur politique", assure Paolo Gentiloni, Commissaire européen en charge de l’Economie.

Des orientations contestées

Une étude de Finance Watch, un réseau pan-européen d'ONG, souligne que les gouvernements se préparent à dépenser une très grande partie de cet argent pour soutenir des industries non-durables. L'UE se trouverait alors plus vulnérable au changement climatique et cela menacerait le niveau de vie, selon le rapport. Euronews a interrogé Benoît Lallemand, secrétaire général de Finance Watch.

Euronews :

Vous avez analysé de près le plan de relance européen et vous estimez qu'une grande partie de ces fonds serait en fait perdue. Comment est-ce possible ?

Benoît Lallemand :

En effet nous pensons que les gouvernements européens manquent une occasion incroyable de transformer l'économie, de rendre notre société plus résiliente. En résumé, ils éteignent un incendie plutôt que de reconstruire en meilleur. La plupart des dépenses en réponse à la pandémie se concentrent sur le maintien ou la réactivation de l'économie d'hier. Et parce que notre économie n'est pas durable, cela va entrainer plus de crises. Donc chaque euro dépensé pour un système économique non-durable ce n'est pas seulement du gâchis, cela va entraîner de lourdes pertes à l'avenir.

Euronews :

L'UE et les Etats membres ont dépensé beaucoup d'argent pour éviter une hémorragie sur le marché du travail et vous soulignez qu'ils sont sur la mauvaise voie. Quelles sont vos inquiétudes ?

Benoît Lallemand :

Tout d'abord nous appelons les gouvernements à aider les citoyens et les travailleurs quoi qu'il en coûte, c'est clair. Bien sûr il était nécessaire à court terme d'apporter une aide sociale et des compensations financières à cause du confinement. Il faut employer l'argent de la relance pour une société plus juste, qui respecte l'environnement, qui offre des formations aux salariés pour la transition et les emplois de demain, de l'argent pour reconstruire les filets sociaux de sécurité, pour soutenir directement les ménages en difficulté et les petites entreprises plutôt que les grandes sociétés qui en fait font davantage partie du problème.

Euronews :

Lorsque vous arrivez avec ces résultats, quelles sont les réactions à Bruxelles et dans les autres capitales en Europe? Les gouvernements vous écoutent ?

Benoît Lallemand :

La Commission et les Etats membres écoutent, certains font des efforts dans la bonne direction. Le problème est que tout le monde est bloqué dans un paradigme économique et politique qui est cassé, où toutes les décisions sont prises à court terme, une croissance du PIB à court terme, des cycles électoraux à court terme. Il est donc crucial que les citoyens fassent entendre leur voix pour que nous puissions réaliser des changements structurels.

Euronews :

La Commission européenne a publié des perspectives économiques plus optimistes pour la fin de l'année. Vous partagez cette analyse ?

Benoît Lallemand :

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Dans une certaine mesure oui mais honnêtement la croissance du PIB dans trois mois ou dans un an importe peu. Le Produit intérieur brut est un faible indicateur de prospérité, de bien-être et de résilience. Ce qui compte c'est où nous voulons être dans 30 ans et pas le trimestre prochain. Et honnêtement lorsque l'on regarde le changement climatique et la courbe vers un réchauffement de plus de 4 degrés que nous observons, cela va entrainer des catastrophes à une telle échelle que cette pandémie ressemblera à une blague. Nous demandons aux gouvernements de repenser la relance, de s'assurer que nous construisons la résilience plutôt que de courir vers la prochaine crise.

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