En Israël, un "MeToo" au sein de la communauté juive ultra-orthodoxe

Les témoignages de victimes d'abus sexuels
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Par Euronews avec AFP
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A la suite de révélations d'abus sexuels au sein de cette communauté religieuse fermée, les victimes décident d'élever leur voix.

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"Tu ne te tairas point!" Ce commandement commence à souffler au sein de la communauté juive ultra-orthodoxe en Israël, secouée par une série de révélations d'abus sexuels sans précédent.

Fin décembre, Haim Walder, un auteur à succès ultra-orthodoxe, s'est suicidé après que le quotidien Haaretz a publié des accusations – qu'il a rejetées – de crimes sexuels à son encontre sur une vingtaine de personnes dont des enfants.

Les allégations contre cette "icône culturelle incontournable" ont eu l'effet d'un cataclysme dans la communauté ultra-orthodoxe, explique à l'AFP Avigayil Heilbronn, une militante de 33 ans se qualifiant de juive "orthodoxe moderne".

Cette mère de deux enfants divorcée a fondé en 2015 l'association "Lo Tishtok" ("Tu ne te tairas point" en hébreu) pour porter la voix des victimes d'agressions sexuelles dans le monde ultra-orthodoxe réputé fermé.

Les Haredim, littéralement les "craignant Dieu", représentent environ 12% des quelque neuf millions d'Israéliens. Chaque aspect de leur vie est gouverné par des principes religieux et ils vivent souvent en vase clos.

Quand Haim Walder, qui a vendu des centaines de milliers d'exemplaires de livres pour enfants, a été accusé dans la presse, "les gens ont pris une claque incroyable car si lui peut agresser, alors comment avoir confiance en qui que ce soit ?", poursuit Avigayil Heilbronn.

"Par un proche"

En mars, un premier scandale avait déjà ébranlé cette communauté après que Haaretz a publié des accusations d'agressions sexuelles et de viols sur adultes et mineurs à l'encontre de Yehuda Meshi-Zahav, autre figure charismatique du monde orthodoxe.

Quelques heures avant la diffusion de nouvelles accusations, cette fois par la chaîne N12, ce fondateur de l'organisation caritative ZAKA, qui dénonce une campagne de "mensonges", a tenté de se pendre dans son appartement.

Un porte-parole de la police a indiqué à l'AFP qu'une enquête avait été ouverte sur les allégations contre M. Meshi-Zahav, mais n'a pas dit si des investigations étaient en cours dans l'affaire Walder au moment de sa mort.

Par ailleurs, début janvier, le quotidien Yediot Aharonot a publié les accusations de trois femmes - dont une mineure au moment des faits allégués - à l'encontre d'un animateur de radio ultra-orthodoxe.

J'étais seul, j'avais extrêmement honte et je me sentais coupable car j'avais accepté
Adiel Bar Shaul
Victime d'abus sexuels

Ces accusations ont rappelé de bien mauvais souvenirs à Adiel Bar Shaul, 43 ans, un orthodoxe de Bnei Brak, ville ou vivent majoritairement des Haredim, près de Tel-Aviv.

Alors qu'il n'avait que 10 ans, Adiel a été violé chez lui, un soir de shabbat, puis à plusieurs reprises pendant une année par un proche de la famille, également ultra-orthodoxe, qui l'hébergeait.

"Il a commencé à me donner des autocollants, puis après plusieurs fois, il m'a demandé (en échange) de poser ma main sur son pantalon, j'étais enfant, je ne comprenais pas", se souvient l'homme qui s'est ensuite muré des années dans le silence avant de le briser il y a quelques années.

"J'étais seul, j'avais extrêmement honte et je me sentais coupable car j'avais accepté" ces gestes pour des autocollants, dit celui qui vient aujourd'hui en aide à des victimes de violences sexuelles.

Souvent, les victimes se taisent car "elles ont peur de ce que diront les gens, les voisins, à la synagogue ou à l'école", explique Josiane Paris, bénévole au centre de crise Tahel, basé à Jérusalem et qui vient en aide aux femmes vivant dans des milieux religieux.

500 appels par mois

A son ouverture il y a 30 ans, le centre a mis en place une ligne d'écoute téléphonique dédiée aux victimes de violences conjugales, d'agressions sexuelles et de viols.

Au début, cette ligne recevait peu d'appels, mais ces dernières années, le nombre n'a fait qu'augmenter : aujourd'hui, il dénombre 500 appels par jour, preuve que le mouvement #MeToo gagne du terrain, même au sein des milieux religieux les plus fermés.

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