Dans cette nouvelle édition d'Euronews Debates, notre panel d'experts se penche sur le futur de l'urbanisme, entre durabilité et inclusivité.
Aujourd’hui, 56 % de la population mondiale vit en milieu urbain, et ce chiffre ne cesse d’augmenter, entraînant des défis croissants en matière d’urbanisation durable.
La planification urbaine a transformé le visage de nombreuses métropoles à travers le monde, notamment en repensant de manière notable la mobilité et l’écologie.
Les grands événements, tels que les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, ont remodelé et transformé certaines villes, en particulier dans le domaine de la mobilité urbaine.
En Chine, les Jeux Olympiques de 2008 et ceux de 2022 ont été, eux aussi, de formidables catalyseurs pour verdir et décarboner les grandes villes.
Pour aborder cette thématique, Euronews et CGTN français ont invité quatre experts à débattre, dont Vassilia Pirierros, architecte, Géry Leloutre, architecte urbaniste belge, Ding Yifan, économiste chinois, et Fabrice Fourcade, président d’EDF Chine.
Les grands événements transforment les villes
L’architecte Géry Leloutre nous explique que les Jeux Olympiques de Paris 2024 ont surtout contribué à renforcer les structures urbaines déjà existantes.
Cette réhabilitation a permis de corriger une certaine inégalité sociale dans l’espace parisien. Notamment en Seine-Saint-Denis, un département situé au nord de Paris et touché par la pauvreté.
La réorganisation du réseau de transport parisien a permis de relier les zones périphériques à Paris grâce à cet important projet du Grand Paris express.
L’événement sportif mondial a également contribué à l’accélération de la mobilité douce. Ce qui a permis le partage de l’espace public entre la mobilité automobile et les mobilités de transports en commun, de cyclistes et de piétons.
Comment l’urbanisme arrive-t-il à allier la modernité et l’héritage historique des grandes villes ?
L’architecte Vassilia Pirierros, installée en Chine, nous invite à d’abord nous pencher sur l’urbanisation chinoise, qui a connu un bon entre 1970 et 2020.
Elle explique que « le taux en 50 ans d’urbanisation est passé de 20 % à 60 % », alors qu’à la même période en France, « il est passé de 70 % à 80 % ».
Pour elle, « ces chiffres mettent en lumière des scénarios très différents », car « la Chine fait face à des pressions urbaines énormes ». Dès les années 60, les autorités du pays se sont préoccupées de l'étalement urbain et de sa délimitation.
Pour lutter contre le développement irrationnel des villes, le gouvernement chinois a adopté, dans le cadre du Plan Ligne rouge de protection écologique, la protection de 30 % de ses terres. Grâce à ce dispositif, les écosystèmes ont été restaurés.
La France, quant à elle, a adopté une loi pour atteindre en 2050 la nullité de l'artificialisation nette des sols. Le pays envisage déjà de diminuer de moitié la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers dans une dizaine d'années.
En ce qui concerne, l’héritage et le patrimoine d’une ville, ils ne résident pas uniquement dans l’aspect architectural.
Il faut également prendre en considération « le patrimoine urbain, mais aussi le patrimoine paysager », c’est cet ensemble qui fonde l’identité physique et culturelle d’une ville.
Créer l’harmonie entre la nature et l’homme
Cela fait 5 ans que certaines grandes villes du pays comme Pékin ou encore Shanghai bénéficient de l’agencement de centaines de petits espaces verts. Ils permettent aux habitants, qui vivent dans des grands bâtiments, de se retrouver ensemble pour profiter de la végétation.
Selon l’économiste Ding Yifan, le nouveau plan d’urbanisation chinois a pour objectif de renverser la tendance de villes toujours plus grandes.
Le gouvernement prévoit la construction de milliers de petites villes en faisant la part belle au verdissement. Cela permettra aux populations de renouer avec la nature.
Des villes plus écologiques
Pour atteindre l’objectif de sobriété, l’efficacité thermique des bâtiments est primordiale. Le président de la société Électricité de France (EDF) en Chine Fabrice Fourcade explique qu’un bâtiment mieux isolé consomme moins de chaleur en hiver et moins de froid en été.
Il est également nécessaire « de remplacer les énergies fossiles par des énergies renouvelables».
Une promotion très forte de la pompe à chaleur pour remplacer la traditionnelle chaudière à gaz est à l'œuvre en Europe.
La lutte contre les passoires thermiques est également un des leviers pour réduire la consommation d’énergies et son impact sur l’environnement.
En France, une nouvelle réglementation entrera en vigueur au 1ᵉʳ janvier 2025. Les logements pourvus d’un diagnostic de performance énergétique (DPE) seront interdits à la location.
L'éco-cité sino-française
Cette année marque le 60e anniversaire des relations diplomatiques entre la France et la Chine, mais également le 10ᵉ anniversaire de l’éco-cité sino-française de Caidian située dans la ville de Wuhan.
Comme le rappelle Fabrice Fourcade, la France et la Chine « travaillent main dans la main depuis les accords de Paris de 2015, sur le climat. »
L’éco-cité est l’un des projets phares qui témoignent de la coopération sino-française en matière de développement durable.
La Chine reste pionnière en matière d’énergies renouvelables. En 2023, selon le rapport de l’IRENA, le pays a représenté près de deux tiers de la progression mondiale des énergies renouvelables avec 297 GW.
L’avenir de l’urbanisme sera éco-responsable
Pour nos quatre experts, l’urbanisme doit être respectueux de l’environnement et prendre en compte les ressources locales. Il doit également considérer les attentes des habitants en intégrant leurs besoins sociaux.
Même si la participation des habitants est un objectif de l’agenda 21, l’adhésion des citoyens reste difficile à mettre en œuvre par les pouvoirs publics locaux.
En Belgique, la ville de Bruxelles est à l’avant-garde : elle a mis au cœur de sa politique de rénovation urbaine la participation citoyenne en adoptant un dispositif intitulé le contrat de quartier.
Des concertations ont lieu avec la municipalité, les habitants, les acteurs sociaux et les régies qui gèrent l’espace urbain (la propreté, le logement, les parcs…).
Ce plan a permis aux citoyens que leurs attentes soient prises en compte dans les projets d’aménagement proposés.
Au-delà de ses aspects importants, l’urbanisme devra relever le défi de l’inclusion en créant des espaces qui permettent de faire du lien, mais également de la mixité sociale.
La notion d’équilibre entre la nature et l’homme est une valeur cardinale pour l’avenir de l’urbanisme.