C'est un véritable coup de théâtre qui s'est produit, ce jeudi, à l'Assemblée nationale. À une voix près, les députés ont adopté une proposition de résolution du RN dénonçant l'accord passé entre la France et l'Algérie en 1968. Un vote marqué par l'absence de plus de 200 députés.
Le Rassemblement national a remporté une victoire majeure, ce jeudi 30 octobre. À l'occasion de leur niche parlementaire, le parti à la flamme avait décidé d'inscrire une proposition de résolution visant à dénoncer l'accord franco-algérien conclu en 1968.
Grâce au soutien des Républicains et d'Horizons, le parti d'Édouard Philippe, le RN a fait adopter ce texte, par 185 voix contre 184.
"C'est une journée que l'on peut qualifier d'historique pour le RN", s'est félicité Marine Le Pen, précisant qu'il s'agit du premier texte présenté par son parti approuvé par l'Assemblée nationale. "Nous défendons depuis très longtemps la suppression de la convention franco-algérienne de 1968 et considérons qu'il n'y a rien, aujourd'hui, qui justifie le maintien de cette convention", a déclaré la cheffe des députés du Rassemblement national.
"Chacun devrait dénoncer cette convention, compte tenu du comportement du gouvernement algérien, qui embastille, sans aucune raison, deux de nos compatriotes", a-t-elle également dénoncé, mettant notamment en avant la situation de l'écrivain Boualem Sensal, détenu en Algérie.
Si ce vote n'est pas contraignant pour le gouvernement, Marine Le Pen assure qu'il doit "tenir compte du vote". La cheffe des députés d'extrême droite a ensuite rappelé au Premier ministre sa volonté de "respecter les décisions de l'Assemblée nationale". "Il peut immédiatement se mettre au travail pour faire connaître à l'Algérie le vote du peuple français", a-t-elle également jugé.
La gauche dénonce un texte "raciste"
La gauche a immédiatement dénoncé ce vote. "Avant, vos slogans, c'était la haine des Juifs. Hier, les Juifs, aujourd'hui, les Arabes. Et demain, à qui le tour ? Vous ne changez pas", a dénoncé le député socialiste Laurent Lhardit.
Le Parti socialiste, comme les autres partis de gauche, ont largement critiqué l'absence d'une grande partie des députés Ensemble pour la République, dont le chef du groupe Gabriel Attal, qui était en déplacement à un forum sur la transformation durable du tourisme. Au total, seuls 30 députés macronistes étaient présents pour voter contre la résolution du RN, trois autres se sont abstenus.
"Ils étaient où les macronistes ? Gabriel Attal absent !", s'est indigné, sur X, Olivier Faure, patron des socialistes.
"Il nous a manqué une voix. Cette voix qui nous a manqué pour faire face au RN, c'est celle de Gabriel Attal", a lancé, après la séance, Cyrielle Chatelain, présidente du groupe écologiste.
"Le texte pour en finir avec les accords de 1968 avec l’Algérie a été adopté par une alliance extrême droite, droite et les députés Horizon d’Edouard Philippe. Un texte raciste voté grâce à l’absence des macronistes. Jamais nous ne laisserons passer pareille infamie de la part des héritiers des tortionnaires d’Algériens", a écrit Mathilde Panot, présidente des Insoumis à l'Assemblée, sur X.
Si le groupe Ensemble pour la République s'était positionné contre le texte du Rassemblement national, Gabriel Attal avait malgré tout dénoncé l'accord franco-algérien et avait appelé, en janvier dernier, a "poser les limites" afin d'"assumer le rapport de force avec l'Algérie".
Cependant, quelque 200 députés étaient absents pour ce vote, dont un certain nombre à gauche. Seuls 52 députés LFI sur 72 étaient présents, 53 socialistes sur 69, 32 écologistes sur 38 et six députés du groupe communistes et ultramarin sur 17, selon un décompte de l'AFP. "Douze députés MoDem ont pris part au scrutin (dix contre, deux abstentions) et trois députés Liot sur 22 (deux pour, un contre)", indique aussi l'agence.
Des titres de séjour de 10 ans
L'accord signé le 27 décembre 1968 par les deux pays a été amendé à trois reprises : en 1985, 1994 et 2001. Ce texte a été progressivement détricoté, notamment sous l’influence de la guerre civile algérienne ou encore la mise en oeuvre de l’espace Schengen. De surcroît, les accords de 1968 pénalisent les étudiants algériens qui, contrairement aux autres, ne peuvent prétendre à un titre pluriannuel et doivent renouveler tous les ans leur visa.
Néanmoins, le texte permet aux ressortissants algériens d'obtenir un titre de séjour de 10 ans grâce à une procédure accélérée. Le conjoint d'un Français se voit également délivrer un certificat de résidence de même durée après un an de mariage et "le parent d'un enfant français l'obtient à l’échéance d'un premier certificat de résidence d'un an", rappelle le ministère de l'Intérieur.
L'entrée sur le territoire français est également facilitée pour les membres de familles qui rejoignent une personne présente en France. "Ils reçoivent donc un certificat de résidence valable 10 ans dès leur arrivée sur le territoire français si l'accueillant est porteur d'un tel titre de séjour", indique Beauvau.