Les abus sexuels sur les enfants sont un problème croissant et les crimes commis sur Internet rendent la lutte contre ce fléau beaucoup plus difficile. L’UE révise ses règles afin de criminaliser les comportements en ligne et dans le monde réel.
On estime qu’un enfant sur cinq est victime de crimes sexuels en ligne et hors ligne. Les États membres de l’UE ont avancé dans l’élaboration de règles visant à criminaliser ces abus à la fin de l’année 2024. Cela dit, ils n’ont pas réussi à se mettre d’accord sur les contrôles concernant le partage d’images en ligne, car ceux-ci pourraient avoir une incidence sur les droits liés à la confidentialité des données.
Les députés européens et les États membres travaillent sur deux séries de règlements. La directive relative aux abus sexuels sur les enfants définira les crimes commis en ligne, par exemple, la diffusion en direct d’abus sexuels ou le partage de contenu pédophile, y compris les images générées par l’intelligence artificielle.
Le second règlement concerne le matériel pédopornographique. Il fixera des obligations pour les entreprises proposant des services en ligne, en particulier des services de chat et de messagerie, où de telles infractions sont souvent commises.
« Le règlement obligerait les réseaux sociaux et les plateformes de messagerie à détecter mais aussi à supprimer tout contenu relatif à des abus sexuels commis sur des enfants qu’ils pourraient trouver, et le signaler à un nouveau centre de l’UE. Cela pourrait également inclure l’analyse des messages chiffrés qui étaient, jusqu’à présent, le moyen le plus confidentiel de communiquer en ligne », explique Romane Armangau, qui suit le processus législatif pour Euronews.
La recherche d’un juste équilibre entre la lutte contre ces crimes et la protection des droits liés à la confidentialité des données des internautes a suscité de vives controverses.
Le chiffrement est-il un obstacle ou un moyen de protection ?
L’accès réglementaire aux messages chiffrés sur des réseaux tels que WhatsApp et Signal s’avère très controversé. Les défenseurs d’une action accrue contre les abus sexuels commis sur des enfants affirment qu’il est essentiel d’inclure ces plateformes.
« Deux tiers des messages contenant des représentations d’abus sexuels sur des enfants sont échangés par le biais de la messagerie privée. Il s’agit d’un canal critique où les crimes sont commis et nous ne pouvons pas accepter de laisser les enfants dans un tel environnement », affirme Isaline Wittorski, d’ECPAT International, une organisation de la société civile qui œuvre pour mettre fin aux abus sexuels sur les enfants.
En parallèle, les défenseurs de la vie privée en ligne affirment que le fait de créer une brèche pourrait permettre aux gouvernements et aux pirates de mettre en place une surveillance de masse. « Les experts en chiffrement s’accordent à dire que l’ouverture ou la conception de backdoors est une mauvaise idée car, en fin de compte, elles finiront par être utilisées par des acteurs malveillants », explique David Frautschy, d’Internet Society, une association qui promeut le développement et l’utilisation ouverts d’Internet.
« Si vous enfreignez cette technologie, vous compromettez les communications entre les personnes, la possibilité d’entrer en contact avec la banque en toute sécurité, ainsi que le stockage de fichiers de données, qui doivent être chiffrés pour la sécurité des entreprises », ajoute-t-il.
Il faut trouver une solution le plus rapidement possible, car Europol et les autorités nationales d’enquête sont dans l’attente d’outils pour lutter contre ces crimes. Une dérogation aux règles de confidentialité permet aux fournisseurs d’accès en ligne de détecter, de signaler et de supprimer volontairement les contenus pédopornographiques. Cette dérogation prenant fin en avril 2026, de nouvelles règles devront être définies d’ici là.
La Pologne assurera la présidence du Conseil de l’UE au cours du premier semestre 2025 et mènera donc les négociations en cours sur la question en 2025.
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Journaliste : Isabel Marques da Silva
Production : Pilar Montero López
Production vidéo : Zacharia Vigneron
Graphisme : Loredana Dumitru
Coordination éditoriale : Ana Lázaro Bosch et Jeremy Fleming-Jones