Un message posté sur X affirme que le Parlement européen a adopté un "pacte sur les migrations et l'asile" qui obligerait tous les États membres à accepter les migrants en situation irrégulière sous peine de se voir infliger de lourdes amendes. Mais que disent réellement les mesures ?
Le Parlement européen a-t-il approuvé un nouveau "Pacte sur les migrations et l'asile" qui obligera tous les États membres de l'UE à accepter les migrants en situation irrégulière ? C'est ce qu'affirme un post partagé sur X vu plus de 112 000 fois. Selon lui, de lourdes amendes pourraient même être infligées aux États qui ne respecteraient pas la loi.
La vidéo partagée avec le post date du 10 avril 2024, et montre des activistes perturber une session de vote au Parlement, date à laquelle les eurodéputés se sont prononcés sur un autre pacte migratoire. "Ce plan tue, votez non ! Ce plan tue, votez non !", crient les manifestants.
La réalité est toute autre. Le Parlement européen n'a approuvé aucune législation en ce sens. Au contraire, les mesures approuvées le lundi 8 décembre accélère en fait l'expulsion des migrants en situation irrégulière.
L'affirmation selon laquelle les États membres s'exposent à des amendes est également mal interprétée.
Un "nouveau pacte migratoire" ?
Lundi, les ministres de l'intérieur de l'UE se sont réunis à Bruxelles et ont approuvé un ensemble de mesures plus strictes en matière d'immigration. Cette décision fait suite aux pressions exercées par les partis de droite et d'extrême droite pour accélérer le retour des migrants en situation irrégulière, c'est-à-dire des personnes qui n'ont pas obtenu de permis de séjour.
Les mesures doivent encore être approuvées par le Parlement européen, ce qui pourrait permettre leur entrée en vigueur en 2026.
Le règlement dit "retour" introduit des mesures visant à augmenter le taux de retour dans l'UE pour les personnes sans permis de séjour. La directive actualise trois propositions antérieures de la Commission européenne visant à renforcer les contrôles sur l'arrivée et l'éloignement des migrants. Elle prévoit également des sanctions plus sévères pour les personnes qui refusent de quitter le territoire de l'UE, comme des périodes de détention plus longues.
Ces mesures permettraient également aux demandeurs d'asile d'être envoyés dans d'autres pays que le leur si l'UE les jugeait "sûrs", et ouvriraient la voie à des "centres de retours", c'est-à-dire des centres situés en dehors de l'UE pour les migrants dont la demande d'asile a été rejetée.
Les pays de l'UE disposeront d'une liste commune de pays d'origine sûrs comprenant le Bangladesh, la Colombie, l'Égypte, l'Inde, le Kosovo, le Maroc et la Tunisie. Outre ces sept pays, la Commission européenne considère également comme sûrs les pays candidats à l'adhésion à l'UE, tels que la Turquie et la Géorgie.
"L'accord permettra à l'UE et à un ou plusieurs États membres de conclure un arrangement ou un accord avec un pays tiers sur les centres de retour", a déclaré le ministre danois de l'Immigration, Rasmus Stoklund.
Un fonds de solidarité ou une amende ?
Parmi les mesures, le plan prévoit un "fonds de solidarité" qui permettra aux États membres de soutenir les pays confrontés à la plus forte pression migratoire, soit en relocalisant 21 000 demandeurs d'asile, soit en leur apportant une aide financière.
La Commission européenne a identifié "Chypre, la Grèce, l'Italie et l'Espagne comme des pays soumis à une pression particulière". Chaque État membre peut choisir entre trois types de contributions : relocalisation, aide financière ou mesures de solidarité alternatives.
Par exemple, la Belgique, qui devrait accueillir des demandeurs d'asile supplémentaires, a choisi de fournir 13 millions d'euros aux États membres soumis à une forte pression migratoire.
Le Premier ministre hongrois, Viktor Orbán, a vivement critiqué le fonds de solidarité proposé par X, accusant Bruxelles de "forcer la Hongrie à payer encore plus ou à accueillir des migrants". Il a qualifié ces projets d'"inacceptables" et a déclaré que la Hongrie "n'accueillera pas un seul migrant et ne paiera pas pour d'autres migrants".
Ce n'est pas la première fois que la Hongrie refuse de se conformer aux règles de l'UE en matière de migration. En juin 2024, la Cour de justice de l'Union européenne a ordonné à Budapest de verser un million d'euros par jour, en plus d'une somme forfaitaire de 200 millions d'euros, jusqu'à ce qu'elle se conforme à la législation de l'UE garantissant aux réfugiés le droit de demander l'asile à l'intérieur de ses frontières.
Balázs Orbán, directeur politique de Viktor Orbán, a critiqué la Commission européenne, l'accusant de sous-estimer la pression migratoire à laquelle la Hongrie est confrontée. Il a décrit la mesure comme n'étant "pas une évaluation objective, mais un message politique : seuls ceux qui se conforment à l'agenda de Bruxelles reçoivent un soutien".
L'une des raisons pour lesquelles la Hongrie ne figure pas sur la liste des pays susceptibles de recevoir des fonds de solidarité est qu'elle n'est pas considérée comme le pays le plus touché par les premières arrivées.
Selon les données de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) sur les flux migratoires vers l'Europe par voie maritime et terrestre, les pays les plus touchés par les migrants de première arrivée en Europe en 2025 sont l'Italie, suivie de la Grèce, de l'Espagne, de Chypre, de la Bulgarie et de Malte. Pour la seule année 2025, ces pays ont accueilli 145 592 migrants.
En réponse à la position de la Hongrie, Magnus Brunner, commissaire européen chargé des Affaires intérieures et de la migration, s'est dit "attristé que la Hongrie ne soutienne pas le pacte, qui améliorerait la situation de tous les États membres de l'UE". Il a ajouté que "la solidarité est souple d'un côté, mais obligatoire de l'autre", et a souligné que "les décisions prises ne peuvent être évaluées ou jugées isolément, mais doivent être considérées collectivement".