L'Iran, les Occidentaux et l'atome de discorde

L'Iran, les Occidentaux et l'atome de discorde
Par Euronews
Partager cet articleDiscussion
Partager cet articleClose Button
PUBLICITÉ

Il y a quelques jours, Mahmoud Ahmadinejad, qui cèdera sa place en juin après 8 ans à la tête de l’Iran, assistait à son dernier “jour des armées”, une démonstration de force annuelle et l’occasion toujours d’exercer sa rhétorique belliqueuse à l‘égard des Etats-Unis et d’Israël. Cette fois n’a pas fait exception. Le dirigeant iranien qualifiant les menaces d’Israël de frapper ses sites nucléaires d’“aboiements d’un chien inoffensif”.

Quelques jours plus tard, le Secrétaire américain à la Défense venait dans la région, en partie pour y vendre des armes. Beaucoup d’armes à son allié israélien mais aussi aux ennemis de Téhéran, les Emirats et l’Arabie Saoudite. D‘énormes contrats qui selon Chuck Hagel envoient à Téhéran un “signal très clair”.

La rhétorique de part et d’autre n’a donc pas avancé, pas plus que les discussions avec l’Agence Internationale de l‘énergie atomique qui reprendront le 15 mai, ni les négociations diplomatiques avec les grandes puissances occidentales.

Loin de mettre en veille son programme nucléaire, l’Iran l’intensifie. En début de mois, deux nouvelles mines d’uranium ont été inaugurées. Le minerai extrait servira à la production du “yellow cake”, du concentré d’uranium utilisé dans les centrifugeuses justement pour l’enrichir.

Et alors que le président Ahmadinejad se félicite de contrôler désormais l’ensemble de la chaîne de production de l‘énergie nucléaire”, les dernières négociations entre Iraniens et membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU se sont à nouveau soldées par un échec.

Téhéran maintient sa ligne : la fabrication d’uranium enrichi sert son programme civil et non la fabrication de l’arme atomique comme le soupçonnent les Occidentaux.

Europe et Etats unis ont durci les sanctions -embargo pétrolier et bancaire – qui coûtent cher à l’Iran. L’inflation est montée au-delà de 30%, les prix des denrées importées sont les plus touchées. Mais le pays ne renoncera pas à ses ambitions pour autant.

En tous cas pas avec Ahmadinejad à sa tête. L’élection présidentielle de juin, à laquelle il ne peut se représenter après deux mandats aura lieu dans un contexte économique et social qui n’aura jamais été aussi difficile et tendu, et les clés de l’avenir de la région pourrait bien être dans les urnes.

L’interview : Ali Bagheri, vice-secrétaire du Conseil national de sécurité iranien

Masoud Imani Kalesar, euronews :

Une conférence sur le respect du traité de non-prolifération nucléaire s’est ouverte lundi à Genève, en Suisse. L’Iran était évidemment au coeur des discussions. Dès le premier jour des débats, le délégué américain, Thomas Countryman, a affirmé que le programme nucléaire iranien constituait la plus grande menace à la crédibilité du traité.

Avec nous pour en discuter, Ali Bagheri, vice-secrétaire du Conseil national de sécurité iranien, qui participe aussi à la conférence de Genève. Ali Bagheri, l’Iran est un des signataires du traité de non-prolifération. Comment expliquez-vous le manque de confiance de l’Occident et pourquoi les Etats-Unis perçoivent-ils l’Iran comme la plus grande menace à la crédibilité du traité ?

Ali Bagheri, vice-secrétaire du Conseil national de sécurité iranien

Ces dernières années, certains pays occidentaux, dont les Etats-Unis, ont adopté une approche non constructive et illogique qui montre qu’ils sont, en fait, opposé à ce que les Iraniens bénéficient de leurs droits, y compris dans le cadre du traité de non-prolifération.

Les inspections et les autres outils mobilisés par l’Agence internationale de l‘énergie atomique dans les installations nucléaires iraniennes, de même que la supervision en continu par l’AIEA de ces activités, n’ont pas donné matière à inquiétude pour ce qui est des activités nucléaires de la République islamique d’Iran. Pas plus que d’autres pays qui ont des activités nucléaires pacifiques similaires sous la supervision de l’Agence.

Masoud Imani Kalesar, euronews :

Monsieur Bagheri, la politique internationale et la diplomatie sont décrites comme une arène où l’on donne et l’on prend. Comment justifier le prix économique et politique pour l’Iran du programme d’enrichissement d’uranium, je parle notamment des mesures d’embargo, mais aussi de la méfiance, par exemple, après les attentats de Boston aux Etats-unis, le Canada a déjoué un attentat qu’il a dit téléguidé par des éléments d’al Qaïda basés en Iran.

Ali Bagheri, vice-secrétaire du Conseil national de sécurité iranien

PUBLICITÉ

C’est justement la preuve de l’approche non constructive et illogique de certains de ces pays occidentaux. Je me souviens que quand l’Union européenne était sur le point de rayer la rébellion des Moudjahidines du peuple de sa liste d’organisations terroristes, à l‘époque, nous avons essayé de dire aux responsables européens que ce petit groupe était un groupe terroriste et qu’il avait commis des dizaines de crimes terroristes. Ils nous ont répondu que tant que nous ne travaillerions pas avec eux et que nous ne cédions pas à leurs exigences, ils utiliseraient tous les moyens de pression à leur disposition contre nous.

Nous avons une longue histoire d’attitudes négatives de certains pays occidentaux vis à vis de la République islamique d’Iran. Une des raisons de leur échec à traiter des questions concernant l’Iran est leur manque de connaissances de ces questions et leurs mauvais calculs. Quiconque connaît et les bases du chiisme et les bases du salafisme, sait que ces deux croyances non seulement n’ont pas de principes communs, mais ont aussi de très sérieux différends.

Masoud Imani Kalesar, euronews :

L’Iran aura bientôt un nouveau Président et un nouveau gouvernement. A votre avis, auront-ils une nouvelle approche sur la question nucléaire ? S’il doit y avoir un tel changement, qui en décidera : le gouvernement et le président ou plutôt le guide suprême,
I’Ayatollah Ali Khamenei?

Ali Bagheri, vice-secrétaire du Conseil national de sécurité iranien

PUBLICITÉ

“Je suis sûr que l‘élection présidentielle ouvrira une nouvelle porte sur le dossier nucléaire et que la République islamique d’Iran apparaîtra plus forte sur la scène des pourparlers sur le nucléaire. Et je suis sûr que l’Iran se fera entendre avec force et autorité dans d’autres domaines, et se montrera prêt à coopérer avec d’autres pays, y compris les 5+1 – Etats-Unis, Russie, Chine, France, Grande-Bretagne et Allemange – dans différents domaines, y compris le nucléaire.”

Partager cet articleDiscussion

À découvrir également

Nucléaire : accord entre Engie et l’État belge sur la prolongation de deux réacteurs

Un aimant géant envoyé par la Russie, malgré les sanctions le programme Iter continue

Polynésie : Emmanuel Macron attendu sur le dossier des essais nucléaires