Mieux vaudra bientôt rouler à l'essence que carburer à l'eau

Mieux vaudra bientôt rouler à l'essence que carburer à l'eau
Par Anne Glémarec avec REUTERS, AFP, PRESSE BRITANNIQUE
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Un dicton qui pourrait devenir réalité selon le Royal Automobile Club britannique. Si la chute des cours du brut se poursuit - et que la livre sterling résiste contre dollar - l'essence coûtera mo

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L’essence pourrait bientôt coûter moins cher que l’eau en bouteille : c’est ce qu’affirme le très respecté Royal Automobile Club britannique. L’organisation aux 8 millions de membres, dont les activités vont de l’assurance à la prévention routière en passant par le lobbyisme et le gentlemen’s club, voulait surtout attirer l’attention sur le fait que le diesel est pénalisé par les taxes Outre-Manche. Ainsi, alors que la chute des cours du brut est répercutée sur les prix à la pompe du Sans plomb – moins taxé et donc bientôt moins cher que l’eau – elle ne l’est pas sur les prix du gasoil.

Mais par sa petite phrase, le RAC nous a surtout donné à nous, journalistes, une opportunité en or de vous parler de l’effondrement des marchés pétroliers sous un autre angle.

Vous reprendrez au moins un verre d’essence ?

Pour l’heure, l’essence reste 2,3 fois plus chère que l’eau Outre-Manche. Mais à 1,36 euros le litre, elle coûte déjà dix centimes de moins qu’un litre de Coca-Cola – l’un ne pouvant se substituer à l’autre, nous sommes bien d’accord. Comme vous pouvez le constater en jouant avec l’infographie interactive ci-dessous, essence et Coca sont au même prix aux Etats-Unis. Et l’essence reste plus chère que le fameux soda en France.

Pour amusantes qu’elles soient, ces comparaisons reflètent le profond malaise qui hante les marchés pétroliers depuis juin 2014. Rappelez-vous, à l‘époque, le baril de Brent de la Mer du Nord touchait un plus haut de 115 dollars. Ce jeudi matin, dans un contexte de volatilité extrême, il a même plongé sous le seuil des 30 dollars avant de se ressaisir et de prendre timidement la direction des 31 dollars. Une tentative de rallye liée à des informations sur une possible réduction de la production russe.

Offre excédentaire

Car l’explication de la chute des cours pourrait tenir en deux mots : offre excédentaire. Offre excédentaire, d’abord, parce que les pays producteurs de pétrole se livrent une guerre sans merci aux parts de marché. L’exploitation du pétrole de schiste en Amérique du Nord est venue ébranler la suprématie de l’OPEP, qui dictait autrefois les prix. Le Cartel n’assure plus que 42 % de l’offre mondiale. Une part qui menace de s’effriter alors que les Etats-Unis ont récemment levé l’interdiction d’exporter leur pétrole, en vigueur depuis les années 70.

Au sein de l’OPEP toutefois, c’est son premier producteur, l’Arabie Saoudite, qui fait la loi. Or, le Royaume a les épaules assez larges pour supporter des prix planchers sur une longue période. Dans l’espoir d‘éliminer la concurrence américaine et russe, il a imposé à ses pairs une stratégie qui consiste à inonder le marché pour faire baisser les prix. Elle porte certes partiellement ses fruits : les faillites se multiplient en Amérique du Nord et la Russie se prépare à tailler dans son budget qui a été bâti sur la base d’un baril à 50 dollars. Mais elle met aussi à genoux les petits producteurs du Cartel.

A cela s’ajoutent les tensions irano-saoudiennes au sein de l’OPEP. L’Iran entend bien retrouver ses parts de marché sacrifiées sur l’autel des sanctions internationales. Téhéran exportera 500.000 barils de plus par jour dans la semaine qui suivra leur levée, levée qui pourrait intervenir d’ici à dimanche. Or, Riyad a exclu d’adapter sa propre production au retour de l’Iran.

Le baril à 10 dollars

Cerise sur le gâteau, voilà que l‘économie chinoise, principal moteur de la demande de matières premières, commence à ralentir. De là à anticiper une chute de la demande mondiale de pétrole, il n’y a qu’un pas, que les opérateurs de marché ont vaillamment franchi.

Jusqu’où ira la chute ? Le sémillant Justin Urquhart Stewart, courtier chez Seven Investment Management le reconnaît, “ il est très difficile de dire clairement où la chute s’arrêtera, si ce n’est à zéro. Les deux facteurs clés à suivre sont : primo, les capacités de stockage qui commencent à manquer et font que tous les marchés sont inondés. Secondo, la hausse annoncée de l’offre iranienne. Ces deux critères pourraient accentuer la chute des cours. “

Certains analystes, tels ceux de Standard Chartered, n’excluent plus de voir le baril de Brent s‘échanger à 10 dollars, comme ce fut le cas en 1998.

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