Pas de tir d'Ariane 6 : un chantier et des ambitions immenses

Pas de tir d'Ariane 6 : un chantier et des ambitions immenses
Par Euronews
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La course à la construction du nouveau pas de tir dédié à Ariane 6 est lancée à Kourou en Guyane.

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Dans cette édition de Space, nous entrons dans les coulisses d’un chantier colossal au Centre spatial européen de Kourou en Guyane française. Un pas de tir est en train de sortir de terre en vue du vol inaugural d’Ariane 6 programmé en juillet 2020. Grâce à ce projet, l’Europe se relance dans la compétition mondiale qui oppose les acteurs du secteur spatial.

Sur la côte nord-est de l’Amérique du Sud, à Kourou en Guyane, des ingénieurs européens s’affairent à la construction du nouveau pas de tir d’Ariane 6. Ce chantier colossal doit répondre à un objectif simple : diviser par deux, les coûts de lancement par rapport à son modèle précédent. Pour y parvenir, il faut d’abord une quantité astronomique de béton, d’acier et de main-d’oeuvre.

Frédéric Munoz du Centre national d’Etudes spatiales (CNES) est responsable de site pour le nouvel Ensemble de Lancement dédié à Ariane 6 (ELA 4). Il nous précise que les travaux d’infrastructure sont en cours. “Actuellement, environ 500 personnes opèrent pour construire le génie civil, c’est-à-dire le béton qui va permettre de lancer la fusée Ariane 6,” indique-t-il.

Juillet 2020 : premier décollage, c’est l‘échéance que tout le monde a en tête sur place. Les équipes se relaient de six heures du matin à dix heures du soir pour façonner la zone de lancement dans le sol granitique guyanais. Actuellement, elles réalisent le dispositif d‘évacuation des jets des moteurs.

“Quand le lanceur décolle, les jets des moteurs vont impacter un déflecteur des jets au fond du carneau, au fond du trou, précise Frédéric Munoz. Et par les deux tunnels – la grande structure en béton qui fait 200 mètres de long par 20 mètres de haut et 20 mètres de large -, les flammes – les gaz en fait – vont pouvoir s‘échapper,” ajoute-t-il.

Réduction des coûts

Tout a été pensé pour réduire la durée et le coût des procédures de lancement. Par exemple, la construction des fusées elles-mêmes évolue : elles seront assemblées horizontalement et non plus verticalement comme Ariane 5.

Didier Coulon, responsable du programme pour l’Ensemble de lancement ELA4 (Agence spatiale européenne), nous en dit plus : “On a un assemblage à l’horizontale du lanceur qui permet d’avoir des bâtiments de dimensions beaucoup plus réduites, donc en termes de climatisation, on diminue les coûts d’exploitation, etc. Et une fois qu’on a assemblé ce lanceur, il est mis sur un transbordeur et on l’envoit en zone de lancement, poursuit-il. Sur place, il sera érigé à la verticale et on viendra approcher les booster : à ce moment-là, on fera un contrôle global du lanceur et cela donnera le feu vert d’apporter le composite supérieur avec les satellites, dit-il. Une fois qu’on a fait tout cela, indique-t-il, on retire le grand portique mobile de 90 mètres de haut et on pourra procéder au lancement.”

Cela fait 50 ans que des fusées décollent de cette base de Guyane, située très proche de l‘équateur et à proximité de l’océan : elle offre à l’Europe son propre accès à l’espace. Mais, dans ce secteur, la concurrence s’est durcie avec l’arrivée de nouveaux compétiteurs comme SpaceX soutenu par la NASA.

“Space X arrive avec une conception plus moderne et des coûts attractifs, donc on fait Ariane 6 pour baisser les coûts, insiste Didier Faivre, directeur du Centre spatial guyanais (CNES). La fiabilité d’Ariane 5 est parfaite, Soyuz et Vega n’ont eu aucun échec depuis les vols inauguraux, la disponibilité est bonne, on tire 11 à 12 fois par an et les plannings sont tenus, admet-il avant d’ajouter : Mais Ariane 6, avec une conception plus moderne et plus modulaire, doit permettre de réduire les coûts et de s’approcher – et si possible d‘être meilleurs – que la proposition aujourd’hui que fait SpaceX aux clients commerciaux," renchérit-il.

Sur la période 2020-2023, 34 lancements institutionnels pourraient être dédiés à Ariane 6 (25) et à Vega C (9). Avec la préférence européenne, Arianespace lutterait enfin avec les armes que #SpaceX notamment.https://t.co/8SXGWgdrUo

— Béatrice BERTRAND (@beabertrand) 27 novembre 2017

Modularité et innovation

Pour répondre à la demande des clients, Ariane 6 a notamment, deux atouts : le moteur placé dans son étage supérieur pourra se rallumer plusieurs fois dans l’espace, ce qui lui permettra de positionner les satellites sur tous types d’orbites et la fusée sera déclinée en deux versions.

“L’avantage d’Ariane 6, c’est qu’on a deux versions, la 62 et la 64 : 62, c’est deux boosters et 64, quatre boosters, détaille Bruno Gérard, directeur d’ Arianespace en Guyane. Donc avec les 4 boosters, on a la performance maximum : généralement, on pourra mettre deux satellites en orbite de transfert géostationnaire ou un satellite extrêmement lourd et en Ariane 62, avec moins de puissance, donc moins de coûts, on pourra adresser un satellite sur une orbite très spécifique,” affirme-t-il.

Dans ce projet, les innovations flambent : le nouveau lanceur utilisera des composants des modèles actuels du Vega et d’Ariane 5 comme le moteur Vulcain et l’un des éléments clés, c’est le propulseur à poudre P120 qui est actuellement en cours de test.

“On a fabriqué du propergol, on l’a chargé en propergol, fait remarquer Massimo Epifani, directeur de site pour Regulus & Europropulsion. Et en ce moment, on se prépare dans ce bâtiment à réaliser des contrôles très détaillés, avec une installation radiographique très puissante : on va contrôler dans la masse que le moteur soit complètement conforme aux spécifications,” assure-t-il.

Sur le site de construction, on ne relâche pas la pression : de nouveaux éléments du pas de tir arrivent sans cesse. “En janvier, on va voir arriver en Guyane, la table de lancement qui sera un énorme élément : il pèsera plus de 500 tonnes, précise Didier Coulon. Il va falloir assembler tout cela en zone de préparation ; puis il va falloir ripper tout cet ensemble au dessus du carneau,” dit-il.

#Ariane 6 : la construction du pas de tir en chiffres
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— Futura (@futurasciences) 7 août 2017

Production d’Ariane 6 en Europe

Et tandis que le chantier suit son cours en Guyane, la production des premières fusées Ariane 6 débutera très bientôt sur le continent européen.

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“Notre objectif, déclare Daniel Neuenschwander, directeur des lanceurs de l’ESA, c’est de démarrer la première tranche de production au printemps prochain : donc aujourd’hui, on peut dire que les industriels sont prêts, ils sont lancés à pleine vitesse et nous commencerons à produire Ariane 6 à partir de l’année prochaine,” se félicite-t-il.

Quand ce pas de tir sera achevé, la préparation sur site d’une fusée Ariane 6 en vue de son décollage ne prendra que neuf jours contre trente pour sa version précédente.

Jeremy Wilks avec Stéphanie Lafourcatère

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