Aeolus, le premier satellite qui observe les vents depuis l'espace

En partenariat avec ESA - The European Space Agency
Aeolus, le premier satellite qui observe les vents depuis l'espace
Par Jeremy WilksStéphanie Lafourcatère
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Dans cette édition de Space, nous découvrons la mission d'un satellite européen appelé Aeolus qui a été mis en orbite fin août. Il se prépare à mesurer les vents depuis l'espace : une première, synonyme d'avancée majeure pour les prévisions météo.

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Dans cette édition de Space, notre reporter Jeremy Wilks se trouve sur la côte du nord de la Norvège, au Centre spatial d'Andøya. Il rencontre des scientifiques qui travaillent sur un nouveau satellite appelé Aeolus. Sa mission : mesurer pour la première fois, les vents autour de notre planète. Actuellement, l'équipe est en train de calibrer et de valider toutes les mesures qu'ils reçoivent de l'espace.

Le grondement de la fusée Vega marque le début d'une mission révolutionnaire pour l'observation météo. À la fin août, le tant attendu Aeolus, un satellite de l'Agence spatiale européenne (ESA) a rejoint l'espace pour se placer à seulement 320 kilomètres au-dessus de nos têtes.

"Aeolus est en train de tourner autour de la Terre au moment où nous parlons : il se déplace du pôle Nord au pôle Sud avant de revenir au pôle Nord, il a ce qu'on appelle une orbite polaire," explique Anne Grete Straume, scientifique en charge de la mission Aeolus à l'ESA. "Et pendant qu'il tourne autour de la Terre," poursuit-elle, "la Terre tourne aussi : ce qui fait qu'Aeolus réalise des mesures autour de la Terre 16 fois par jour."

Technologie laser

Aeolus évalue grâce à un système laser appelé Lidar, la direction et la vitesse des vents depuis l'espace. Une première.

Aucune mission spatiale ne pouvant être menée seule, l'équipe scientifique basée en Norvège est là en soutien. Le Centre spatial d'Andøya, un observatoire atmosphérique doté de plusieurs instruments, est un site inédit situé à 300 km au nord du cercle polaire arctique.

Les données collectées sur place joueront un rôle essentiel dans le calibrage et la validation des relevés effectués sur les vents depuis l'espace.

"Quand on regarde la situation de notre observatoire - à 69 degrés nord -, il n'y en a aucun autre qui soit capable de réaliser des mesures en collaboration avec Aeolus," fait remarquer Michael Gausa, directeur scientifique au Centre spatial d'Andøya. "C'est vraiment le seul site qui réalise des mesures Lidar sur la vitesse et la direction des vents à cette latitude dans l'hémisphère nord," assure-t-il.

Des mesures terrestres en complément

Sur le site, on trouve deux télescopes appartenant à l'Institut Leibniz de physique atmosphérique qui fonctionnent comme le nouveau satellite européen : ils utilisent des lasers pour observer les vents. Anne Grete Straume de l'ESA peut s'y référer pour réaliser des comparaisons dans le cadre de la mission Aeolus.

​"C'est très important de vérifier que les mesures du satellite que nous recevons sont exactes pour tout type de temps comme des tempêtes qui se déclenchent ou de bonnes conditions météo," souligne Anne Grete Straume. "Nous avons besoin de les comparer avec ces mesures de grande qualité qui sont réalisées au sol et qui concernent tout type de temps et c'est pour cela que c'est important non pas de réaliser une mesure et de la comparer, mais de réaliser et comparer les mesures en continu," renchérit la scientifique.

​D'autres types de données sont utilisées pour évaluer la précision des instruments d'Aeolus comme celles provenant de ballons-sondes météo qui sur le site norvégien, sont lancés deux fois par jour. Ils recueillent des mesures locales sur la vitesse du vent, la température et l'humidité qui s'avèrent être des paramètres essentiels à la prévision météo.

"Grâce à ces ballons, nous collectons des mesures sur le vent in situ : c'est très important pour calibrer et valider les mesures du satellite," indique ​Ingrid Hanssen, ingénieur de direction au Centre spatial d'Andøya. "Comme cela, on peut savoir qu'on effectue des relevés à peu près dans la même zone : bien sûr, le ballon est poussé par le vent, mais on saura qu'on a la même couverture globale et qu'on peut comparer les mesures du satellite avec celles du ballon," dit-elle.

​​"Nous avons très peu de données sur les vents"

Aeolus est loin d'être le seul satellite météo dans l'espace : ils sont nombreux à scruter les températures et l'humidité.

Pour autant, aucun système de mesure des vents n'existe pour le moment à l'échelle de la planète. On peut observer les nuages, mais pas les mouvements atmopshériques.

Le vent est la pièce manquante du puzzle de la météo d'après Lars Isaksen du Centre européen pour les prévisions météorologiques à moyen terme (ECMWF) :​ "Certaines des plus grandes erreurs de prévision des cinq dernières années avaient un lien avec notre manque de connaissances sur les vents dans les régions tropicales," estime-t-il. "Nous n'avons aucune information sur les vents au-dessus des océans comme le Pacifique Sud et même dans l'Atlantique, nous avons très peu de données sur les vents," précise-t-il.

​Les mesures d'Aeolus sur les vents transiteront par ce centre pour être traitées et corrigées au regard d'autres relevés météo avant d'être transmises aux prévisionnistes.

Reste que cette mission de l'ESA est un test : elle doit encore faire ses preuves. "Personne ne sait pour l'instant si cela va marcher," reconnaît Lars Isaksen. "Si tout fonctionne bien, nous intégrerons les données à nos modèles numériques de prévision pour avoir plus d'informations sur la situation initiale - c'est le temps qu'il fait aujourd'hui -," indique-t-il. "Tout dépend du temps qu'il fait aujourd'hui : on renseigne ces conditions dans un modèle mathématique complexe qui avance dans le temps et on obtient des prévisions pour les jours à venir," détaille-t-il.

"C'est vraiment prometteur"

Aeolus est capable de mesurer la vitesse et la direction des vents du niveau du sol jusqu'à 30 km d'altitude. Jusqu'à présent, son instrument laser plutôt délicat semble fonctionner comme prévu.

"Quelques semaines à peine après le lancement dans l'espace et la vérification du satellite et de l'instrument, on l'a mis en route et on commence déjà à recevoir des données qui ressemblent à celles que nous aurons au final : donc c'est vraiment prometteur !" s'enthousiasme Anne Grete Straume, de l'ESA.

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Dans l'avenir, quand les scientifiques auront à leur disposition plusieurs années de données, ils espèrent utiliser Aeolus pour l'analyse du climat et de tendances à long terme.

"Comme le climat change actuellement, la différence de température entre l'Equateur et les pôles se réduit et cela change aussi la manière dont les vents se comportent dans l'atmosphère et transportent l'énergie," déclare la scientifique en charge de la mission. "Donc si l'on comprend cela plus en détail, on pourra mieux savoir de quelle manière le temps évoluera dans les conditions climatiques qu'il y aura dans l'avenir," espère-t-elle.

Si la mission Aeolus est un succès, d'autres satellites du même type pourraient être lancés pour prendre le relais.

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