Une ex-ministre de Trudeau dénonce des "pressions" pour empêcher un procès

Une ex-ministre de Trudeau dénonce des "pressions" pour empêcher un procès
Par AFP
Partager cet articleDiscussion
Partager cet articleClose Button
Tous droits de reproduction et de représentation réservés. © 2024 - Agence France-Presse.
Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© 2024 - Agence France-Presse. Toutes les informations (texte, photo, vidéo, infographie fixe ou animée, contenu sonore ou multimédia) reproduites dans cette rubrique (ou sur cette page selon le cas) sont protégées par la législation en vigueur sur les droits de propriété intellectuelle. Par conséquent, toute reproduction, représentation, modification, traduction, exploitation commerciale ou réutilisation de quelque manière que ce soit est interdite sans l’accord préalable écrit de l’AFP, à l’exception de l’usage non commercial personnel. L’AFP ne pourra être tenue pour responsable des retards, erreurs, omissions qui ne peuvent être exclus dans le domaine des informations de presse, ni des conséquences des actions ou transactions effectuées sur la base de ces informations. AFP et son logo sont des marques déposées.

L'ex-ministre de la Justice de Justin Trudeau a affirmé mercredi avoir subi des pressions "inappropriées" et des menaces "voilées" de l'entourage du Premier ministre pour qu'elle intervienne dans une procédure judiciaire, un nouveau coup dur pour le chef du gouvernement canadien qui a immédiatement démenti ces accusations.

L'ancienne ministre Jody Wilson-Raybould s'exprimait pour la première fois publiquement dans cette affaire qui a éclaté il y a trois semaines. Ses déclarations risquent d'aggraver ce qui est déjà la pire crise du mandat du Premier ministre, et a entraîné la démission de son plus proche conseiller et celle de Mme Wilson-Raybould.

"Entre septembre et décembre 2018, j'ai subi des pressions constantes de la part de plusieurs personnes au sein du gouvernement pour intervenir politiquement (...) et de manière inappropriée afin de parvenir à un accord à l'amiable avec SNC-Lavalin", société canadienne impliquée dans un scandale de corruption en Libye, a témoigné Mme Wilson-Raybould, qui a répondu pendant plus de trois heures et demie aux questions des députés de la commission de la Justice.

Un tel accord hors cour aurait évité un long et coûteux procès à ce géant canadien du BTP. En cas de condamnation pénale, SNC-Lavalin, qui emploie 50.000 personnes dans le monde dont 9.000 au Canada, se verrait interdire tout contrat public pendant dix ans, ce qui risquerait de compromettre son avenir.

L'ancienne ministre a aussi affirmé avoir été l'objet de "menaces voilées" et s'être entendu dire par le plus haut fonctionnaire du pays qu'elle devrait "éviter un affrontement avec le Premier ministre" dans ce dossier.

Elle a également dit croire avoir été rétrogradée au poste de ministre des Anciens combattants, lors d'un remaniement en janvier, en raison de son refus d'intervenir dans ce dossier. Elle a finalement démissionné mi-février.

Justin Trudeau a réfuté la version des faits de Mme Wilson-Raybould lors d'une conférence de presse mercredi soir. "Je maintiens (...) que moi et mes employés avons toujours agi de façon appropriée et de façon professionnelle. Donc je suis totalement en désaccord avec la description des événements de l'ancienne procureure générale", a-t-il dit.

L'affaire embarrasse son gouvernement depuis que le quotidien Globe and Mail l'a révélée le 7 février.

Le groupe, établi à Montréal (où est élu M. Trudeau), est accusé depuis 2015 de corruption pour avoir versé 48 millions de dollars canadiens de pots de vin (32 millions d'euros) à des responsables libyens du temps du dictateur Mouammar Kadhafi, entre 2001 et 2011.

- "Trouver une solution pour SNC" -

Mme Wilson-Raybould a témoigné que onze hauts responsables, y compris le Premier ministre lui-même, étaient intervenus auprès d'elle à dix reprises pour qu'elle s'assure de l'abandon d'accusations au pénal contre SNC-Lavalin, en échange du paiement d'une amende.

Elle a précisé que le Premier ministre avait soulevé "immédiatement" la question de SNC-Lavalin avec elle lors d'une réunion qu'elle avait sollicitée le 17 septembre.

"Le Premier ministre m'a demandé de l'aider, de trouver une solution pour SNC en affirmant que s'il n'y avait pas de règlement hors cour, (le groupe) déménagerait de Montréal et qu'il y aurait plusieurs pertes d'emplois", a-t-elle soutenu devant la commission de la Justice.

"Je lui ai dit que j'avais fait mon travail, que mon idée était faite sur SNC et que je n'allais pas m'ingérer dans la décision du directeur" du bureau des procureurs, a-t-elle lancé.

Justin Trudeau a reconnu mercredi soir avoir discuté avec elle d'"une perte potentielle de 9.000 emplois" au Canada.

Le chef de l'opposition, le conservateur Andrew Scheer, a réclamé de son côté la "démission" immédiate du Premier ministre et demandé à la police fédérale l'ouverture d'une enquête, accusant M. Trudeau d'avoir "perdu l'autorité morale pour gouverner".

Selon le Globe and Mail, le groupe d'ingénierie aurait rencontré plus d'une cinquantaine de fois des fonctionnaires du gouvernement fédéral et parlementaires depuis 2017 pour évoquer des questions de "justice" et "d'application de la loi".

Mme Wilson-Raybould n'a finalement jamais dérogé de sa position et SNC-Lavalin devra faire face à un procès, à une date non encore déterminée.

PUBLICITÉ

Avec ses déclarations, Mme Wilson-Raybould vient de fournir aux partis d'opposition des munitions inespérées à huit mois des prochaines élections législatives d'octobre, qui s'annoncent serrées selon les derniers sondages.

Partager cet articleDiscussion

À découvrir également

L’info du jour | 16 avril - Matin

La centrale de Zaporijjia n'explosera probablement pas, mais l'Europe reste sur ses gardes

Guerre en Ukraine : Kyiv demande de nouvelles armes et munitions à ses alliés occidentaux