Paris 2024 : les travailleurs étrangers, perdants des Jeux olympiques

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Par Anelise Borges
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"Pourquoi on détruit toute une vie pour un mois ou deux ?"

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Plus vite, plus haut, plus fort. Cela pourrait être le mantra des centaines d'ouvriers qui sont à pied d'œuvre pour livrer à temps les équipements des Jeux olympiques. Mais dans la course aux JO 2024, certains ont l'impression d'être laissés en queue de peloton. C'est le cas de travailleurs migrants qui ont dû quitter leurs logements pour faire place au village olympique. Reportage en Seine-Saint-Denis de notre correspondante à Paris Anelise Borges.

Des bulldozers, des marteaux-piqueurs et des immenses tas de sable. Cela ne saute pas aux yeux, mais l'endroit sera bientôt le théâtre du plus grand événement sportif au monde. Cette banlieue nord de Paris accueillera les principales structures olympiques en 2024. Le plus grand héritage des JO de Paris sera ici, assurent les organisateurs.

Soucieux de ne pas laisser d'éléphants blancs, le comité d'organisation a promis de convertir la plupart des sites et de ne construire que ce qui est nécessaire : notamment une piscine olympique et un village olympique dans le département pauvre de la Seine-Saint-Denis, qui concentre 80 % des équipements pérennes.

Ces grands chantiers feront place à des boulevards bordés d'arbres, à des immeubles modernes et à des espaces de vie paisibles sur les rives de la Seine. Mais la zone de 52 hectares destinée à accueillir le village olympique abritait déjà des personnes qui ont été informées qu'elles devaient partir.

"Pourquoi on détruit toute une vie pour un mois ou deux ?"

"Là, c'est le bâtiment B, l'immeuble là-bas derrière". Boubakar Diallo montre du doigt le quartier de Saint-Ouen où il a vécu ces vingt derniers années. Ce foyer de travailleurs immigrés est en phase de démolition dans le cadre du projet de village des athlètes. L'immeuble est toujours debout, mais plus pour longtemps.

"Les Jeux olympiques ça dure quoi, un mois, maximum deux. Pourquoi on détruit toute une vie pour un mois ou deux ?", se demande celui qui est devenu le porte-voix des travailleurs étrangers qui se sont battus pour être traités dignement.

Près de 300 personnes vivaient ici. Certaines depuis des décennies. Mais elles n'ont eu que quelques mois pour évacuer les lieux. La SOLIDEO, l'entreprise publique chargée de livrer les infrastructures des JO de Paris mis a disposition des logements modulaires après un long bras de fer juridique entre les autorités et les résidents.

"Nous avons construit une résidence provisoire à 300 mètres de là, dans laquelle ils sont logés, car nous devions démolir cet immeuble avant la fin de l'année 2021" explique Nicolas Ferrand, le directeur général de la SOLIDEO.

"Je ne sais pas ce qu'ils utilisent, si c'est du carton, mais c'est très fragile", se plaint M. Diallo en frappant le mur d'un couloir, qui sonne creux. Or ce dernier craint que les autorités ne leur offrent pas de solution permanente d'ici 2022, comme le prévoit l'accord, maintenant qu'ils sont partis.

"Je pense que les Jeux olympiques, c'est un prétexte, car on a demandé à retourner sur le site après les JO et on nous a dit non. Les autorités profitent des événements comme ça pour transformer les quartiers et déménager des habitants qui ne doivent plus être là", dit-il.

Une fois l’événement sportif planétaire passé, cette zone devrait être à nouveau transformée en éco-quartier durable. Infrastructures, droits TV, tourisme... Paris espère gagner gros grâce aux Jeux olympiques. Mais alors que le coup d'envoi n'a pas encore été donné, certains ont l'impression d'avoir déjà perdu.

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