Pollution plastique en Méditerranée : habitants et entreprises développent des solutions concrètes

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Par Guillaume Petit
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600 000 tonnes de déchets plastiques finissent chaque année dans la Méditerranée. Face à ce problème aux multiples causes, des habitants et entreprises du sud de la France ont développé des solutions concrètes pour limiter l'usage du plastique.

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La France est le premier producteur de déchets plastiques de la région et son taux de recyclage est inférieur à celui de ses voisins européens. La France visela fin du plastique jetable d'ici à 2040, mais certains habitants et entreprises de la région de Marseille ont décidé d'agir en développant eux-mêmes des solutions concrètes visant à limiter la pollution plastique et l'usage même des emballages plastiques. Reportage long format à Marseille de Guillaume Petit.

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Des déchets dans un parc de Marseilleeuronews

Il ne faut pas longtemps pour tomber dessus. Au détour du port de Marseille, dans les parcs ou au bord de mer... Le plastique s’invite dans ce paysage idyllique aux couleurs turquoises du sud de la France, qui attire des touristes du monde entier.

Et ils ne gâchent pas juste la belle carte postale. En finissant dans la mer Méditerranée, ces matières plastiques mettront plus de quatre siècles à se dégrader et contamineront toute la chaîne alimentaire. "Une fois dans l’océan, les plastiques se fragmentent et deviennent des microplastiques (diamètre inférieur à 5mm) et des nanoplastiques (inférieurs à un demimillimètre), qui sont si petits qu’ils peuvent pénétrer les membranes cellulaires "des animaux marins", rappelle Zero Waste France.

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Marseille (France)Green week - euronews - Guillaume Petit

Mais des habitants et entrepreneurs s'attachent à trouver des solutions concrètes. Brice et Kévin sont deux plongeurs aguerris. A l’instar de nombreuses associations, ils ramassent de nombreux déchets lors de leurs explorations sous-marines. Nous avons fait le test avec eux. Sur une plage de Marseille, nous avons plongé en bord de mer. En moins de trente minutes, les filets des deux plongeurs se remplissent d’emballages plastique : des canettes, des emballages plastiques, des briquets....

Mais Brice Masi veut aller plus loin. Ce biologiste et entrepreneur développe avec sa société Click Dive une application de science participative destinée tous les usagers de la mer, qui vise à cartographier la faune et la flore, mais aussi les déchets plastiques situés près des côtes. L'objectif, explique Brice Masi, est de donner à terme une portée nationale et internationale au projet et d'aider les organismes et "l'État" à prendre des décisions pour protéger les mers et océans.

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Marseille (France)Green Week - euronews - Guillaume Petit

La France en retard, le plastique faiblement recyclé

600 000 tonnes de déchets plastiques sont rejetées chaque année en Méditerranée et un rapport de WWF conclue que la France est le pays qui produit le plus déchets plastiques dans le pourtour méditerranéen. Les raisons sont multiples : dans cette zone à forte activité touristique, la population a augmenté ces dernières années.

Au-delà des incivilités, la collecte, le tri et le recyclage des déchets ne sont pas optimales. La métropole Aix-Marseille-Provence avance un taux de valorisation des déchets (tous types confondus) de 30%. Mais plus globalement, au niveau national, c’est la France qui est en retard en matière de recyclage du plastique : 24 % seulement des déchets plastiques sont recyclés, selon Plastics Europe,contre plus de 40% pour l’Espagne, l’Italie ou le Royaume-Uni.

Brice Masi - Click Dive
Plongée à la recherche de plastiqueBrice Masi - Click Dive

La France assure vouloir atteindre 100% de déchets recyclés en 2025. Problème, pour l’heure, les capacités de tri et de recyclage sont insuffisantes et une grande partie des emballages plastiques sont conçus avec des matériaux non recyclables. Environ 50% des emballages plastiques ne sont pas recyclables à l’heure actuelle, selon Zero Waste France.

Favoriser le tri (et la réduction du plastique) à la source

A Marseille, nous nous sommes rendus dans un centre de tri destiné aux professionnels. Les équipes s’activent comme chaque matin pour trier des kilos de déchets plastique ou carton en provenance d’entreprises ou de campus universitaires.

Mais cette société privée parisienne, qui s'est implantée à Marseille il y a quelques années, fait plus que collecter et trier les déchets avant de les envoyer dans des centre de recyclage situés en France. Elle les aide à mieux trier les déchets à la source, avec des poubelles clairement identifiables et des incitations. Avec cette machine par exemple, une bouteille plastique recyclée donne droit à un bon d’achat.

"L'approche traditionnelle c'est de dire plus on collecte de déchets, plus on gagne d'argent"

Mais l’objectif est aussi d’essayer de réduire au maximum le volume de déchets plastiques, qu’ils soit recyclable ou non. L'entreprise assure ne pas courir après le chiffre d'affaires. "L'approche traditionnelle c'est de dire plus on collecte de déchets, plus on gagne d'argent", relève Guillaume Pellegrin, directeur du centre de tri de Lemon Tri à Marseille. "Ici, notre approche vise à réduire à la source" : avant de collecter, nous mettons en place des stratégies pour réduire notre quantité de déchets".

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Lemon Tri facilite le tri des déchets à la source des entreprisesGreen Week - euronews - Guillaume Petit

Des commerçants se passent (presque) totalement du plastique

La solution serait bien sûr de moins consommer de plastique, pour moins en produire. Nous partons à Arles. A deux pas des arènes, Khadidja Thierry est restée ouverte ce jour-là, malgré la pluie. Après avoir travaillé dans la restauration toute sa carrière, cette habitante du sud de la France s’est lancé dans la vente à emporter il y a deux ans.

"Je ne veux pas oublier mon rôle de citoyen au nom du commerce"
Khadidja, commerçante qui réduit son utilisation du plastique

Elle tente aujourd'hui de se passer du plastique. Cette commerçante n’utilise plus de bouteilles en plastique et a fortement réduit sa quantité d’emballages."Je ne veux pas oublier mon rôle de citoyen au nom du commerce", souligne-t-elle. Mais l’idée de remplir une gourde à un point d’eau peut surprendre certains clients, et acheter des bouteilles en verre lui coûte plus cher.

La transition n'était pas évidente au départ. Mais le déclic est venu avec l’aide de Stéphanie Dick, designer d’objet, qui a lancé le Challenge zéro bouteille plastique. Son objectif est convaincre le plus grand nombre de commerçants d’Arles de se passer du plastique "en les aidant à identifier les freins, comme le budget".

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Des commerçants abandonnent progressivement le plastique à Arleseuronews - Green week - Guillaume Petit

Elle explique que les commerçants se rendent compte que d'acheter du verre à la place du plastique leur permet de moins acheter et que réduction du plastique n'est pas incompatible avec rentabilité.

Comme beaucoup de responsables associatifs, Stéphanie Dick met en garde contre le mythe du recyclage, qui a ses limites. "Même avec le recyclage, on continue à polluer, à avoir des pertes matérielles, à exploiter les ressources", souligne-t-elle. "Ce n'est pas une solution à long terme, donc nous devons aussi réduire notre consommation de plastique et passer du jetable au réutilisable."

Les représentants de l’industrie du plastique affirment que la production a quelque peu diminué en 2019. Le recyclage progresse, mais il faut aussi prendre en compte la délocalisation de la production hors de l’UE pour des raisons de coût.

La France s'est fixée l'objectif de tendre vers la sortie des emballages plastiques d'ici à 2040, mais sur une base incitative et sans donner de sanctions. Les associations environnementales jugent cet objectif pas assez contraignant et trop tardif, tandis que les fabricants d’emballage plastique le jugent irréaliste et mettent en garde contre le coût environnemental de l’aluminium, qui viendrait prendre le relais de certains emballages plastiques.

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Mais le secteur s’inquiète aussi de l’impact sur sa croissance. En Europe, l'industrie du plastique pesait en 2019 350 milliards d’euros.

Journaliste • Guillaume Petit

Video editor • Guillaume Petit

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