Joël Pruvot : "Tant que l'Afrique sera exploitée, le phénomène migratoire continuera"

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Par Euronews
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Joël Pruvot est l'un des reponsables du Refuge Solidaire, qui accueille les migrants arrivant d'Italie à Briançon. Il s'insurge contre l'absence de politique d'accueil et de répartition en Europe, au micro de Valérie Gauriat.

Joël Pruvot est l'un des reponsables du Refuge Solidaire, qui accueille les migrants arrivant d'Italie à Briançon. Il s'insurge contre l'absence de politique d'accueil et de répartition en Europe, au micro de Valérie Gauriat.

"La plupart des gens qui arrivent ici sont des gens originaires de l'Afrique de l'Ouest francophone. Ils ont tous effectué à peu près le même voyage. Ils ont traversé le Sahara ; ils sont allés en Libye, ils ont été torturés, rançonnés violés, pour les femmes, dans des conditions abominables. Ensuite il a fallu qu'ils traversent la Méditerranée sur des embarcations de fortune.

Une fois arrivés en Italie, ils sont "stockés" - on va dire - dans des "campos", des camps plus ou moins précaires, dans des conditions plus ou moins satisfaisantes selon qui les gère. Parce qu'il faut savoir qu'il y a aussi des membres de la mafia qui gèrent ces "campos". Donc vous imaginez les conditions dans lesquelles ils vivent.

Le problème, c'est que le règlement de Dublin oblige les migrants à demander l'asile dans le pays par lequel ils sont rentrés en Europe. Pour eux c'est forcément toujours l'Italie.

On dit régulièrement, qu'"un pays ne peut pas accueillir toute la misère du monde". Mais pour l'Italie ça ne pose pas de problème! Cela voudrait dire que l'Italie peut accueillir tous les migrants qui nous viennent d'Afrique? Voyez l'incohérence du discours.

L'Italie ne peut faire seule ce que devrait faire l'ensemble de l'Europe

Il n'y a pas de politique européenne d'accueil. Il y a pas de politique de répartition de ces migrants sur le territoire européen. Et donc ils arrivent en Italie, et l'ltalie fait face comme elle peut. Mais elle fait beaucoup déjà. Elle fait face comme elle peut, mais elle ne peut pas faire seule ce que devrait faire l'ensemble de l'Europe.

Ils sont là-bas, ils se retrouvent aussi a la rue, et ils ne parlent pas la langue.Ils viennent comme je l'ai dit d'Afrique francophone, donc ils vont aller dans le pays où ils peuvent se faire comprendre, comprendre ce qui se passe, et pouvoir s'intégrer au mieux.

Donc ils traversent la frontière,par deux cols, le col de l'Echelle et le col de Montgenèvre. Comme il y a une présence policière toujours plus importante, les conditions de passage du col sont de plus en plus difficiles pour eux, mais de toutes façons ils y arrivent. Même si la police les renvoie en Italie, ils vont passer une fois, deux fois, trois fois, quatre fois, cinq fois, jusqu'à ce qu'ils arrivent à traverser la frontière. Le problème c'est qu'ils prennent de plus en plus de risques, ils sont de plus en plus fatigués. Et du coup quand ils arrivent ici ils sont dans des états d'épuisement assez avancés.

On fait juste la chose suivante, on les met à l'abri pour ne pas qu'ils dorment dehors et qu'ils ne meurent pas de froid, c'est tout. Par contre effectivement il y aurait beaucoup à dire sur la politique du gouvernement qui ferme les yeux, les oreilles, qui ne veut pas se rendre compte du problème et qui dit "ça va bien s'arrêter un jour". Cela ne s'arrêtera pas un jour.

Tant que l'Afrique sera exploitée par les multinationales, en particulier françaises, et qu'on continuera a soutenir des dictateurs par tous les moyens y compris la corruption ou plus, - il faut se rappeler le Burkina Faso, où le Président a été assassiné avec la complicité des français-. Tant qu'on continuera à les mettre sous tutelle par l'intermédiaire du franc CFA, dont ils dépendent complètement, ils sont pieds et poings liés au niveau économique, ce phénomène migratoire continuera à s'accentuer. A s'accentuer parce qu'il va y avoir aussi maintenant les conséquences du réchauffement climatique, qui font qu'ils vont avoir de plus en plus de mal a avoir une agriculture productive dans ces pays-là. Il va y avoir des conséquences très négatives."

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