Située à Berlin, une statue qui rend hommage aux femmes forcées à se prostituer pour l’armée japonaise pendant la Seconde Guerre mondiale est à l’origine de tensions diplomatiques entre Berlin et Tokyo.
Située dans un quartier résidentiel du centre-ville de Berlin, cette statue, est au centre d'une polémique internationale. Elle commémore les milliers de femmes et de filles, originaires de 14 pays, et surtout de Corée du Sud, qui ont été violées par des soldats japonais pendant la Seconde Guerre mondiale.
Des victimes, parfois mineures, forcées à se prostituer et surnommées « femmes de réconfort ».
Le Japon a demandé que la statue soit retirée. Certains politiciens berlinois se rangent du côté de Tokyo.
L'ONG coréenne locale Korea Verband, à l'origine du mémorial, baptisé "statue de la paix", a menacé de poursuivre les autorités locales en justice si la statue était retirée. L'ONG affirme qu'il ne s'agit pas seulement de défendre les droits des femmes coréennes. Son combat serait bien plus global.
"Dans l'histoire, je pense que chaque femme peut imaginer ce qui peut arriver en temps de guerre si vous n'êtes pas protégée et que les soldats viennent vous violer. Toutes les femmes peuvent donc s'identifier à la statue de la paix", explique Nataly Han, présidente de l'association Korea Verband.
Une "représentation unilatérale"
Dans les années 1930 et jusqu’à 1945, environ 200 000 femmes et filles de différentes nationalités, ont servi d’esclaves sexuelles à l’armée japonaise. Et depuis, ce dossier envenime les relations entre le Japon et la Corée du Sud, d’où sont originaire la majorité des victimes.
Certaines d'entre elles, qui étaient très jeunes à l’époque, sont encore en vie. Et ce sujet tabou, longtemps resté caché, a été porté à l’attention du public en 1991 avec le témoignage d’une des victimes.
Son action a encouragé des centaines d’autres victimes à travers le monde, notamment en Chine, aux Philippines et aux Pays-Bas, à faire de même.
En novembre 2023, la justice coréenne a condamné le Japon à indemniser 16 victimes. Le tribunal de Séoul a ordonné qu’environ 141 000 euros soient versés à chacune des plaignantes.
Tokyo, qui a toujours refusé de comparaître devant la justice coréenne, nie être directement responsable de ces abus sexuels. Selon le Japon, les victimes ont été recrutées par des civils et les maisons de prostitution militaires étaient exploitées commercialement.
La statue de la paix a été inaugurée en 2020 à Berlin. Une dizaine d’autres ont été installées à travers le monde. La dernière date de juin dernier dans la région de Sardaigne, en Italie.
Face aux pressions exercées par le Japon pour la faire retirer à Berlin, les autorités locales avaient ordonné son retrait pour la fin du mois de septembre. Le Japon aurait même menacé de mettre fin à la relation de ville jumelle entre Berlin et Tokyo.
Dans un communiqué de presse publié en mai, le maire de Berlin a qualifié la statue de représentation unilatérale après avoir rencontré le ministre japonais des affaires étrangères à Tokyo.
Le gouvernement local de Berlin a déclaré à Euronews qu'il discutait avec le district de Mitte et le gouvernement fédéral pour remplacer la statue par un mémorial plus général pour les femmes qui ont subi des violences sexuelles pendant les conflits.
Interrogée par Euronews, l'ambassade du Japon affirme que la statue servait de symbole pour accuser le Japon et que le mémorial avait provoqué des troubles à Berlin.
Tout comme le maire de Berlin, l'ambassade a également qualifié cette décision d'unilatérale.
Une pétition en faveur du maintien de la statue a recueilli 3 000 signatures. Située à Berlin, une statue qui rend hommage aux femmes forcées à se prostituer pour l’armée japonaise pendant la Seconde Guerre mondiale est à l’origine de tensions diplomatiques.