Le professeur de politique européenne Alberto Alemanno estime que les règles éthiques du Parlement européen ne permettent pas de répondre aux risques de corruption, mais que cela ne nuit pas à l'image de l'UE dans son ensemble.
La nouvelle enquête pour corruption présumée impliquant des membres du Parlement européen et l'entreprise chinoise Huawei montre que le système d'éthique actuel de l'UE n'est pas adapté, selon l'expert en politique de l'UE Alberto Alemanno, professeur de droit européen à HEC Paris.
En 2022, des députés européens et des assistants ont été poursuivis pour avoir prétendument accepté des pots-de-vin afin d'agir dans l'intérêt d'acteurs étrangers tels que le Qatar et le Maroc, dans le cadre d'un scandale surnommé "Qatargate".
Cette semaine, les enquêteurs belges ont perquisitionné le domicile de plusieurs membres du Parlement ainsi que le siège bruxellois de Huawei, soupçonnant l'entreprise chinoise d'avoir payé des eurodéputés pour influencer la législation au Parlement européen. Huawei nie tout acte répréhensible.
Actuellement, l'application des règles sur le lobbying est entre les mains du Parlement européen et d'autres institutions européennes. Il s'agit donc d'un système d'auto-surveillance, a déclaré Alberto Alemanno lors d'un entretien avec Euronews.
"De par sa conception, le système ne fonctionne pas et est conçu pour ne pas fonctionner, parce qu'il n'y a pas d'incitations politiques pour la présidente du Parlement européen, qui est également membre d'un parti politique, à appliquer ces règles, parce que si elles sont appliquées, elles pourraient également l'être contre son parti politique", affirme-t-il.
Un risque important de conflits d'intérêts
Selon Alberto Alemanno, le lobbying au Parlement européen est susceptible de créer des conflits d'intérêts.
"Les membres du Parlement européen d'aujourd'hui sont toujours autorisés à avoir des emplois secondaires afin d'être eurodéputés, mais aussi avocats, lobbyistes et défenseurs de différents types de causes dans la société qui les placent dans une situation de conflit d'intérêt", estime-t-il.
Toutefois, malgré les scandales répétés de corruption et de transparence, Alberto Alemanno ne pense pas que la réputation de l'UE soit menacée.
"Il est très facile de considérer que l'Union européenne dans son ensemble est une organisation très corrompue, mais en réalité, même ces scandales prouvent le contraire", considère-t-il.
"Ce n'est pas l'Union européenne en tant que telle qui est une institution corrompue, mais certains de ses membres, un très petit nombre de membres du Parlement européen, qui est l'une des institutions, qui se seraient prêtés à une tentative de corruption", conclut l'expert.