Production d'aluminium : comment mieux recycler les boues rouges ?

Production d'aluminium : comment mieux recycler les boues rouges ?
Par Julian GOMEZStéphanie Lafourcatère
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Que faire des boues rouges issues de la production d'aluminium primaire ? Les recycler grâce aux nouveaux procédés élaborés par des chercheurs européens !

Dans cette édition de Futuris, notre reporter Julián López Gómez commence par nous faire découvrir une usine métallurgique expérimentale : "Ces locaux sont utilisés par les scientifiques pour étudier comment recycler ce qu'on appelle les 'boues rouges', les résidus provenant de la production d'aluminium primaire, explique-t-il avant d'ajouter : Pour concevoir des pistes de réutilisation performantes et durables, les chercheurs ont besoin de fours qui peuvent atteindre une température de 1400°C."

Ces installations uniques accueillent des recherches menées dans le cadre d'un projet européen baptisé Red Mud : les résidus de la production d'aluminium primaire sont mélangés à du carbone avant d'être chauffés à de très hautes températures. La mixture qui est obtenue est précieuse car la sidérurgie peut la réutiliser.

"Les métaux de valeur nous intéressent"

"Évidemment, c'est la valeur des métaux dans les boues rouges qui nous intéresse, reconnaît Bernd Friedrich, expert en recyclage des métaux à l'institut allemand IME dédié aux procédés métallurgiques et au recyclage des métaux. Il peut y avoir un peu d'aluminium, de fer, de scandium - des métaux de haute technologie -, mais aussi du titane et d'autres métaux qui peuvent être des minéraux de terres rares," précise-t-il.

Chaque année, environ 150 millions de tonnes de boues rouges sont produites dans le monde, en particulier dans le sud de la France. Moins de 2% d'entre elles sont recyclées.

Une approche thermique vise à les transformer en un mélange très riche en fer. Mais c'est là que les difficultés commencent. "Pour récupérer du fer, on doit avoir recours à des températures très élevées pour que le métal fonde, explique Bernd Friedrich. On doit travailler avec des résidus qui sont à des états très divers : sec, chaud, acide, alcalin, poursuit-il. Nos études ont pour but de trouver les solutions optimales pour recycler ces boues rouges," souligne-t-il.

Verre à base de boues rouges

Des méthodes de recyclage plus inattendues sont aussi envisagées dans le cadre de ce projet.

Dans un laboratoire de Louvain en Belgique, une autre équipe chauffe les boues rouges à des températures plus faibles, aux environs de 1300°C, dans un but bien précis.

"Dans ce four de laboratoire, nous faisons fondre différents résidus de métaux et quand ils sont fondus, nous les refroidissons dans un seau, commente Tobias Hertel, minéralogiste à l'Université catholique de Louvain. Le produit final que nous récupérons est semblable au verre et il peut éventuellement être utilisé comme substance réactive dans la production de matériaux de construction par exemple," dit-il.

Le produit qui résulte de ce processus est tout d'abord analysé de manière approfondie pour déterminer sa composition.

"On peut mesurer la quantité exacte de chacun des éléments qu'il y a dedans et aussi établir leur concentration et on peut déceler de très faibles concentrations d'éléments comme le silicium, l'aluminium, le calcium, le sodium et l'oxygène," détaille Annelies Malflict, ingénieure métallurgiste au sein de la même université.

Ce verre à base de boues rouges est ensuite moulu et mélangé avec du sable et du graphite pour fabriquer des matériaux de construction comme des briques, des granulats légers, des tuiles de couverture et des dalles de sol.

Considération écologique et technique

"Pour nous, c'est important de réduire les rejets de CO2 en général, mais il n'y a pas que cela, fait remarquer le coordinateur de ce projet Red Mud, Ioannis Pontikis qui est aussi ingénieur chimiste à l'Université catholique de Louvain. Nous prenons aussi en considération l'empreinte de cette méthode sur l'environnement au sens large, assure-t-il avant d'ajouter : Ces produits sont plus 'écologiques' dans le sens où nous n'avons utilisé que des résidus. Dans le même temps, nous ne voulons pas nuire aux propriétés de ces produits : par exemple, à leur résistance mécanique et physique," conclut-il.

Les chercheurs espèrent que leurs travaux contribueront à multiplier par 5, la quantité de boues rouges recyclées d'ici dix ans.

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