Rasmussen : "la Russie ne se comporte pas comme un partenaire de l'OTAN"

Rasmussen : "la Russie ne se comporte pas comme un partenaire de l'OTAN"
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Par Euronews
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Rencontre à Bruxelles avec Anders Fogh Rasmussen, le secrétaire général de l’Otan, qui achève un mandat de cinq ans à la tête de l’alliance.
Le norvégien Jens Stoltenberg lui succédera début octobre.

Andreï Beketov, euronews
Mr Rasmussen, vous êtes secrétaire général de l’Otan depuis plus de cinq ans. Quelle évaluation faites-vous de la situation concernant la sécurité en Europe ces derniers mois ?

Anders Fogh Rasmussen
L’environnement sécuritaire a considérablement changé. Les actions militaires illégales de la Russie en Ukraine sont une piqûre de rappel. Elles nous ont rappelé que nous ne pouvions pas considérer la sécurité comme acquise en Europe. Donc, bien sûr, nous devons nous adapter à cette nouvelle situation.

Andreï Beketov, euronews
Le président Poutine a dit cette semaine qu’il ne pouvait pas permettre l’installation des forces de l’Otan en Crimée et que c’est pour cela qu’il l’avait annexée. Avez-vous pris en considération les préoccupations de sécurité de la Russie ?

Anders Fogh Rasmussen
Oui. Mais nous n’avons jamais eu l’intention de déployer les forces de l’Otan en Crimée. Donc c’est vraiment une très, très, mauvaise excuse donnée pour l’annexion illégitime et illégale de la Crimée à la Russie. Il n’y a pas d’excuse valable. La Russie a enfreint de manière flagrante ses engagements internationaux et les principes fondamentaux de sa coopération avec l’Otan.

Andreï Beketov, euronews
Pensez-vous toujours que la Russie soit impliquée dans l’est de l’Ukraine et comment voyez-vous ce conflit armé qui semble plongé dans l’impasse ?

Anders Fogh Rasmussen
Cela ne fait pas de doute : la Russie est lourdement impliquée dans la déstabilisation de l’est de l’Ukraine. Elle permet qu’un flux d’armes, d‘équipements et de combattants passe sa frontière pour se rendre en Ukraine. Nous appelons la Russie à arrêter de soutenir les groupes séparatistes. Et nous appelons la Russie à retirer ses troupes de la frontière russo-ukrainienne. Nous avons constaté récemment un nouveau renforcement de ces troupes.

Andreï Beketov, euronews
Est-ce que l’Otan renforce sa présence aux confins de la Russie ?

Anders Fogh Rasmussen
Nous avons accru nos surveillances aériennes dans les trois Etats baltes, déployé des navires dans la mer Baltique et dans la mer Noire et nous avons accru les exercices militaires en Pologne et dans les Etats baltes. Donc effectivement, que ce soit en mer, dans les airs, ou au sol, la présence de l’Otan se fait plus visible. La volonté n’est pas offensive mais défensive pour assurer une protection efficace de nos alliés.

Andreï Beketov, euronews
Comment voyez-vous la Russie ? Comme un partenaire ou à présent davantage comme un adversaire ?

Anders Fogh Rasmussen
Nous avons passé plus de vingt ans à mettre sur pied une relation constructive avec la Russie. Mais je dois bien reconnaître que la Russie ne se comporte pas comme l’un de nos partenaires. Des documents militaires russes attestent que la Russie voit l’Otan comme un adversaire et nous devons évidemment en tenir compte.

Andreï Beketov, euronews
Quelles leçons tirez-vous de la tactique militaire de la Russie vis à vis de l’Ukraine ?

Anders Fogh Rasmussen
Nous avons vu les forces armées russes agir très rapidement. Nous avons vu aussi que ces forces bénéficiaient d‘équipements plus modernes que lors de l’attaque de la Géorgie en 2008. C’est la raison pour laquelle j’exhorte les membres de l’Otan à augmenter leurs dépenses de défense et à lancer la modernisation de nos forces armées. Ces cinq dernières années, la Russie a augmenté son budget de défense de 50% alors que les pays de l’Otan ont, en moyenne, diminué le leur de 20%. Cela ne peut pas durer. Ce qui s’est passé en Ukraine a changé la donne. Et l’heure est donc venue d’arrêter les coupes budgétaires, d’inverser la tendance et d’augmenter progressivement les dépenses liées à la défense.

Andreï Beketov, euronews
Nous parlons de la sécurité en Europe. Quelle évaluation faites-vous de la menace venue des insurgés sunnites qui ont conquis certaines zones d’Irak et de Syrie? L’Otan peut-elle y faire quelque chose ?

Anders Fogh Rasmussen
L’Otan se concentre sur la défense et la protection de ses alliés. C’est pour cela que nous avons déployé des missiles Patriot en Turquie pour que la Turquie puisse se protéger contre des attaques de missiles venus de Syrie. Bien sûr, ce qui se passe dans la région est un sujet de grave préoccupation. Il est de notoriété publique que le gouvernement irakien a appelé à l’aide des membres de l’Otan, mais de manière individuelle.

Andreï Beketov, euronews
Nous avons pu voir des avions iraniens et russes opérer avec des appareils américains. Cela veut-il dire que l’Otan collabore avec ces pays ?

Anders Fogh Rasmussen
Il ne s’agit pas de l’Otan ici, mais de pays membres de l’Otan qui se sont engagés à titre individuel. Ce que l’on observe actuellement, c’est à quelle point la communauté internationale est préoccupée par la situation et par la propagation de l’extrémisme et du terrorisme. Cela nécessite une réponse unifiée de la communauté internationale au-delà des lignes de fracture traditionnelles.

Andreï Beketov, euronews
Enfin, une question concernant votre mandat de secrétaire général de l’Otan. Quelle a été votre principale réussite ?

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Anders Fogh Rasmussen
Nous avons une Otan plus forte, plus opérationnelle et plus rapide. Malgré les coupes dans les budgets de la défense, l’alliance est plus forte aujourd’hui. Grâce aux opérations en Afghanistan, au Kosovo ou ailleurs, nos forces armées ont désormais l’habitude de travailler ensemble. Elles ont des liens plus étroits que jamais et elles sont plus que jamais prêtes au combat. En même temps, nous avons investi dans de nouveaux équipements, entre autres, nous avons commencé à mettre sur pied la défense antimissiles. Nous avons également renforcé notre cyber-défense. Donc, je dirais qu’au final nous avons perdu de la graisse et gagné en muscles. C’est pour cela que l’Otan est plus forte aujourd’hui.

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