Les leçons de Tchernobyl et Fukushima n'ont pas été tirées

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Par Euronews
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Près de 8 000 kilomètres et 25 ans séparent les catastrophes nucléaires de Tchernobyl et Fukushima. Bien que radicalement différentes sur de nombreux

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Près de 8 000 kilomètres et 25 ans séparent les catastrophes nucléaires de Tchernobyl et Fukushima. Bien que radicalement différentes sur de nombreux points, certaines similitudes entre ces deux tragédies peuvent également être relevées.

Les deux centrales nucléaires ont été inaugurées dans les années 1970 : 1971 pour Fukushima, et 1977 pour Tchernobyl. La centrale japonaise restera en activité pendant 40 ans, contre seulement neuf pour l’Ukrainienne. Au moment de l’explosion, six réacteurs étaient en marche à Fukushima, quatre à Tchernobyl.

Des causes différentes ?

Au premier abord, l’origine des deux accidents nucléaires est différente. L’explosion du réacteur nucléaire soviétique le 26 avril 1986 est le résultat d’une expérience réalisée par le personnel de la centrale alors que la catastrophe de Fukushima est due au tremblement de terre et au tsunami du 11 mars 2011.

Néanmoins, des erreurs de constructions et des négligences humaines ont été identifiées dans les deux cas.

Que s’est-il vraiment passé ?

A Fukushima, les dangers potentiels d’un important tsunami avaient été soulevés, mais en fin de compte ignorés. Le tremblement de terre de mars 2011 a détruit les lignes électriques et les générateurs de secours, empêchant le réacteur d‘être refroidi. Ne pouvant rien faire, les équipes de Tepco, ainsi que le monde entier, ont assisté à la fusion des réacteurs et leurs explosions.

En 1986, à Tchernobyl, les opérateurs de la centrale ont fait des erreurs durant un test qu’ils étaient en train de réaliser. Ces erreurs ont été initialement considérées comme étant la cause principale de la catastrophe. Mais l’Agence internationale de l‘énergie atomique a par la suite revu ses conclusions.

C’est la construction même du réacteur de grande puissance à tubes de force, utilisé à la centrale de Tchernobyl, qui est dorénavant jugée comme l’une des raisons de l’accident. Les concepteurs du réacteur numéro 4, à l’image des créateurs du Titanic, avaient estimé qu’une certaine combinaison d‘événements catastrophiques ne pouvait pas avoir lieu et, par conséquent, les systèmes de sécurité pour gérer une telle série de situations ne furent jamais développés. Mais cette réaction en chaîne a bien eu lieu dans la nuit du 26 avril, à savoir la désactivation des équipements de protection d’urgence et le non-respect des règles opérationnelles. Ces manquements ont pour incidence une explosion de vapeur sous pression dans le cœur du réacteur, un terrible feu de graphite et une fusion du cœur du réacteur.

Pictures from Chernobyl exclusive zone

Contamination

Tchernobyl comme Fukushima sont considérés comme des accidents nucléaires de niveau 7, soit le plus haut niveau sur l‘échelle de l’AIEA. Les deux catastrophes ont relâché beaucoup de matériaux radioactifs dans l’atmosphère, entrainant de graves effets sur la santé des populations et sur l’environnement.

Si la catastrophe de Fukushima a été terrible, l’accident de Tchernobyl reste le pire accident nucléaire de l’Histoire.

Du fait de sa position, l’explosion à Tchernobyl a causé une contamination importante dans les pays voisins de l’Ukraine, tels que le Belarus et la Russie, qui étaient tous des républiques soviétiques à l‘époque. Toute l’Europe fut touchée à divers degrés, à l’exception du Portugal.

Les radiations de Fukushima continuent de s’infiltrer dans le sol, vers l’océan via les pluies, le ruissellement et les nappes souterraines. Si des radio-isotopes issus de la centrale ont été retrouvés dans les eaux de l’Océan Pacifique, les risques de contamination pour les autres pays seraient « négligeables ». De plus, un système de réfrigération, un “mur de glace”, qui doit encercler les quatre réacteurs les plus endommagés et empêcher les contaminations par ruissellement est en train d‘être mis en place.

De l’eau partiellement nettoyée issue des réacteurs sera aussi relâchée dans l’océan fin 2016.

Réactions gouvernementales

Le 28 avril 1986, un fort taux de radiation est détecté dans une centrale nucléaire en Suède. Le personnel de la centrale réalise très vite que l’origine de cet incident n’est pas locale. Les soupçons se portent sur l’URSS : quelque chose vient de se produire derrière le rideau de fer. A Moscou, « Vremia » (le Temps), le journal télévisé de la première chaîne publique soviétique, consacre un reportage de 20 secondes à Tchernobyl.

« Un accident a eu lieu dans la centrale nucléaire de Tchernobyl. Un des réacteurs de la centrale est endommagé. La situation est sous contrôle. Des équipes de secours ont été envoyées sur place pour prêter assistance aux personnes touchées par cet incident. Une commission d’enquête a également été mise en place. »

A Pripiat, une ville fondée dans les années 70 pour héberger les employés de la centrale, la vie suit son cours comme si de rien n’était. Les habitants de cette localité située à quelques kilomètres de Tchernobyl ne seront évacués qu’à partir du 27 avril.

A Kiev, les traditionnelles parades du 1er mai sont maintenues. Des écoliers défilent dans les rues, sans se douter de quoi que ce soit. La ville ne se trouve pourtant qu’à moins de 130 kilomètre de la centrale, où la situation est totalement hors de contrôle.
Le doute s’installe peu à peu. Les Ukrainiens se tournent vers les médias internationaux pour tenter de comprendre le drame qui est en train de se jouer.

Le Japon ne semble pas avoir tiré toutes les leçons de la catastrophe de Tchernobyl. En effet, si Tokyo a rapidement fait évacuer les zones autour de Fukushima, le gouvernement nippon n’aura reconnu qu’au bout de deux mois et demi la fusion d’un des cœurs des réacteurs de la centrale.

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Aujourd’hui, sur le terrain

Des zones d’exclusion ont été mises en place sur les deux sites : 30 km autour de Tchernobyl et 20 km autour de Fukushima, avec une possibilité d’extension de 10 km supplémentaires.

Concernant la population, des centaines de milliers d’habitants ont dû être déplacées en raison de ces deux catastrophes. Au Japon, des sources officielles font état de pratiquement 300 000 personnes qui ont quitté leur lieu de résidence. En Ukraine, Biélorussie et en Russie, elles sont plus de 350 000 à avoir tout laissé derrière elles.

Les évacués

Cinq ans après la tragédie de Fukushima, nombreux sont les évacués qui doivent se résoudre à vivre dans des logements temporaires. Quelques villes sont redevenues « officiellement habitables » comme Nahara en septembre dernier. Mais des autorisations spéciales sont nécessaires pour se rendre quelques heures dans d’autres zones où l’ordre d’évacuation n’est pas encore levé.

Loneliness, split families, health risks. Japanese towns still struggle 5yrs post-#Fukushimahttps://t.co/vBniS9yG05pic.twitter.com/kDeADsauSR

— Greenpeace (@Greenpeace) April 10, 2016

En Ukraine, plus de 1 000 personnes seraient retournées chez elles, dans des localités situées dans la zone d’exclusion, en toute illégalité. Ces « revenants » sont essentiellement des personnes âgées et originaires de la campagne et vivant grâce à leurs lopins de terre. Mais sur place, ils font face à un environnement sans structure et sans transports. Aujourd’hui, 30 ans après la catastrophe, moins de 200 « samosely » vivraient encore dans la zone interdite.

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