La pointeuse bientôt de retour dans les entreprises européennes ?

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Par Cecile Sauzay
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La CJUE a décidé que, pour faire appliquer la directive de 2003 sur le temps de travail, des systèmes de décompte du temps devront être rendus obligatoires. Mais que faire du télétravail ? est ce qu'un mail rédigé chez soi peut être comptabilisé ?

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C'est un simple arbitrage rendu mardi par la cour de justice de l'Union européenne, mais c'est un séisme qui se fera ressentir dans toutes les entreprises.

Cet arrêt signe le retour de la pointeuse, l'obligation de se doter d'un système "objectif, fiable et accessible à tous" pour mesurer à la minute près le temps de travail des employés.

Comisiones Obreras vs. Deutsche Bank

A l'origine de ce bouleversement, il y a un cas d'école. Le principal syndicat espagnol, les Comisiones Obreras (C.C.O.O) versus la Deutsche Bank. 

Devant la CJUE, la branche locale de la banque est accusée de ne pas respecter la directive européenne sur le temps de travail de 2003 et la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne, puisqu'il était impossible de vérifier précisément si les horaires de travail étaient respectés. Impossible également de savoir exactement combien d'heures supplémentaires avaient été effectuées par chaque salarié. Le syndicat, qui est l'équivalent de la CGT en France, a fait valoir que dans cette configuration, les employés ne pouvaient pas défendre leurs droits convenablement. 

Enfin, «s’agissant des coûts, mis en exergue par le gouvernement espagnol et le gouvernement du Royaume-Uni, que la mise en place d’un tel système pourrait impliquer pour les employeurs, il convient de rappeler (…) que la protection efficace de la sécurité et de la santé des travailleurs ne saurait être subordonnée à des considérations purement économiques», rappelle l'instance communautaire, citant au passage la directive sur le temps de travail.

Les partenaires sociaux allemands réagissent

En Allemagne, cet arrêt fait l'effet d'une bombe, et l'information fait la une de la presse nationale ce mercredi 15 mai. Comme c'est le cas dans tous les états membres, le Bundestag devra adapter son droit du travail pour faire appliquer la décision.

Immédiatement, l’Union fédérale des syndicats patronaux allemands (Bundesvereinigung der Deutschen Arbeitgeberverbände, BDA), déplore une mesure qu'elle juge rétrograde : "Nous, les employeurs, sommes contre la réintroduction de la pointeuse au vingt-et-unième siècle", a déclaré le syndicat au Süddeutsche Zeitung.

Les représentants du salariat, eux, se réjouissent de la décision. "La cour de justice met fin aux rémunérations forfaitaires", selon Annelie Butenbach, membre de la Confédération allemande des syndicats ( Deutscher Gewerkschaftsbund, DGB). "La flexibilité ne va pas en souffrir, bien au contraire : au lieu d'avoir une pointeuse classique, on pourrait très bien compter les heures de travail avec les smartphones et les applications"

Les parlements nationaux trancheront les questions clés

Plusieurs questions promettent de compliquer la tâche du législateur. Que faire d'un consultant, par exemple, qui a l'habitude de faire du télétravail ? est ce qu'un mail qu'on rédige rapidement chez soi peut être comptabilisé ?

Ces débats, les juges ne les ont pas tranché. Désormais, cette tâche incombe aux 28 parlements nationaux. La cour de justice de l'union européenne rappelle cependant que les états membres conservent une marge de manœuvre pour définir la future forme de ces pointeuses 2.0. Chaque pays pourra tenir compte des spécificités du secteur, ou de la taille de l'entreprise.

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