Au Liban, l'émigration comme échappatoire

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Tous droits réservés Hussein Malla/Copyright 2020 The Associated Press. All rights reserved.
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Par Lea Fayad avec Olivier Péguy
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Usés par les crises, certains Libanais choisissent de quitter le pays.

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Il y a un peu plus d'un mois, la capitale libanaise était frappée par une double explosion. Bilan : 190 morts. Ce drame est venu s'ajouter à une grave crise économique et à des tensions politiques récurrentes.

Usés par tout cela, de nombreux habitants en sont venus à vouloir quitter le pays.

C'est le cas de Bernard et sa femme Doris. Cela faisait quelque temps qu'ils se posaient la question. L'explosion du port les a confortés dans leur décision de partir vivre à l'étranger.

« J'ai fait 15 ans d'études et de spécialisation, et aujourd'hui, je me retrouve sans revenus !, se désole Bernard, gynécologue. L'explosion, ça a été l'élément déclencheur qui nous a décidés à quitter le pays. »

A ses côtés, son épouse Doris, radiologue, en veut à la la classe politique libanaise. « Tous les politiciens libanais portent la responsabilité de ce qui s'est passé depuis 30 ans, assure-t-elle. Nous, ce qu'on veut, c'est que nos enfants grandissent dans un pays où ils se sentent en sécurité. »

"Remplir les formulaires pour émigrer"

D'après une étude locale, le nombre de Libanais quittant le pays a augmenté de 36% depuis l'explosion début août.

D'après les statistiques de Google, le mot "immigration" atteint un niveau de recherche inégalé au Liban depuis 10 ans.

« Je ne peux pas investir ici, c'est trop risqué, constate Rana, jeune designer d'intérieur. En plus, psychologiquement, c'est usant. Chaque matin, il y a un nouveau problème. Autour de moi, mes amis sont tous en train de remplir des formulaires pour émigrer. »

La pression de la France

Pour beaucoup de Libanais, la confiance est rompue avec une classe dirigeante jugée incompétente.

Lors de ses récentes visites au Liban, le président français Emmanuel Macron a bien tenté de faire bouger les choses. Il a lancé aux dirigeants libanais comme une injonction : mettez en œuvre les réformes structurelles, que ce soit au niveau de la banque centrale ou du secteur de l'énergie, et vous obtiendrez une aide financière internationale. Si vous ne le faites pas, on appliquera des sanctions. Le chef de l'Etat français a également fixé un ultimatum pour former un nouveau gouvernement.

Mais cette pression va-t-elle porter ses fruits ? Lamia Moubayed, politologue libanaise, s'interroge.

« _Le président Macron exige des résultats, s_ouligne-t-elle. Il a dit qu'il reviendrait en décembre. Il met son poids politique dans la balance. Il peut s'appuyer sur des diplomates français qui connaissent très bien le Liban et les Libanais. »

Fuite des cerveaux

On estime aujourd'hui que la diaspora libanaise est trois fois plus nombreuse que la population vivant au pays.

La statue de l'émigré, qui se dresse près du port de Beyrouth, rappelle combien l'histoire mouvementée du Liban s'est accompagnée de nombreuses vagues d'émigration.

La fuite des cerveaux prive le Liban des compétences dont il a pourtant besoin pour se reconstruire. Et si cette tendance se poursuit, disent les experts, cela risque d'assombrir un peu plus l'avenir du pays.

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