Refusant de tirer sur leurs concitoyens, des policiers fuient la Birmanie

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Par Euronews avec AP et AFP
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"On nous a ordonné de tirer sur les gens, sur notre propre famille si elle n'est pas du côté de l'armée. [...] Mais nous ne pouvons pas faire du mal à notre propre peuple", témoigne un ancien officier de police birman, qui a fui dans l'Etat indien du Mizoram.

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Ils ne sont pas certains de pouvoir rentrer un jour chez eux, en Birmanie. 34 anciens policiers et un pompier ont décidé de fuir vers l'Etat indien voisin du Mizoram, après avoir défié l'ordre de tirer sur des personnes opposées au coup d'État de la junte militaire.

"On nous a dit de tirer sur notre propre famille si elle n'est pas du côté de l'armée. Nous ne pouvons pas faire de mal à notre propre peuple. C'est pourquoi nous sommes venus au Mizoram", témoigne un ancien officier de police de la ville de Tedim, qui préfère rester anonyme, par peur de représailles sur sa famille.

Certains ont pu emporter un téléphone portable, pour tenter de rester en contact avec leur famille, qu'ils ont dû laisser derrière eux. Mais il est difficile dans ces conditions d'obtenir des nouvelles de ses proches, comme le confirme un policier, qui a lui aussi préféré rester anonyme : "Nous ne pouvons pas joindre nos parents en raison de problèmes de connexion, mais ce que nous avons entendu, c'est qu'ils ont très peur de sortir de chez eux. J'espère qu'un jour nous nous reverrons."

Accueilli sur le territoire pour motif humanitaire, le groupe de policier est logés et nourris par des habitants du Mizoram. Mais tous les réfugiés birmans ne bénéficient pas de cet accueil. La semaine dernière, le ministère indien de l'Intérieur a demandé aux quatre États indiens limitrophes de la Birmanie de prendre des mesures pour empêcher les réfugiés d'entrer en Inde, sauf pour des raisons humanitaires. L'Inde n'est pas signataire de la Convention des Nations unies sur les réfugiés de 1951 ni de son protocole de 1967.

Exode des habitants de Rangoun

Les réfugiés birmans pourraient pourtant être nombreux dans les prochains jours et les prochaines semaines, dans tous les pays limitrophes de la Birmanie. Selon l'AFP, l'exode s'est intensifié ce vendredi à Rangoun, la capitale économique du pays, dont certains quartier sont sous loi martiale. L'un des principaux axes pour sortir de la ville était totalement congestionné de véhicules plein à craquer, les habitants entassant leurs affaires jusque sur les toits, d'après des images diffusées par un média local.

Je ne ne dors plus la nuit. Dans mon quartier, les forces de sécurité ont enlevé des gens et les ont torturés"
une habitante ayant fui Rangoun

"Je rentre chez moi dans l'Etat de Rakhine", dans l'ouest du pays, confie une jeune femme qui a décidé de prendre le bus. "Je ne ne dors plus la nuit. Dans mon quartier, les forces de sécurité ont enlevé des gens et les ont torturés".

Sur les réseaux sociaux, beaucoup d'internautes encourageaient la population à partir car "la situation dans la ville est effrayante", mais certains les imploraient de rester par "solidarité".

"C'était beaucoup trop stressant de vivre à Rangoun", raconte un jeune orfèvre ayant réussi à gagner Kyaukpyu, ville côtière située à plus de 600 kilomètres.  

Deux des cinq millions d'habitants de Rangoun, sont soumis à la loi martiale. Et certains quartiers sont tombés dans le chaos, des manifestants lançant des projectiles et des cocktails molotov sur l'armée et la police, qui tirent à balles réelles.

La Thaïlande se prépare

De l'autre côté de la frontière, les autorités thaïlandaises se préparent à recevoir un afflux de réfugiés. "Nous sommes en mesure d'en accueillir de 30 à 50 000", a indiqué le gouverneur de la province de Tak, Pongrat Piromrat. Quelque 90 000 réfugiés birmans vivent déjà le long de la poreuse frontière de 1 800 kilomètres séparant les deux pays, après avoir fui des décennies de guerre civile  entre l'armée et des factions rebelles.

7 semaines après le coup d'Etat militaire, la répression s'intensifie en Birmanie. Ce vendredi, au moins deux manifestants ont été abattus dans une petite ville du nord-est du pays, a indiqué un employé des pompes funèbres selon qui les morts sont plus nombreux. "Nous n'avons pas encore ramassé les corps car la fusillade continue", raconte-t-il. 

Une autre personne a été tuée dans l'Etat de Kayah lorsque les forces de sécurité ont ouvert le feu sur une manifestation, d'après un secouriste. 

Meurtres, tortures, destructions de maisons et autres biens privés, pillages : les tactiques déployées par l'armée sont de plus en plus violentes.
Association d'assistance aux prisonniers politiques

"Meurtres, tortures, destructions de maisons et autres biens privés, pillages : les tactiques déployées par l'armée sont de plus en plus violentes", déplore l'Association d'assistance aux prisonniers politiques (AAPP). Les militaires "insufflent un climat de peur et de subordination", ajoute l'ONG qui fait un point quotidien sur la situation. Des habitants sont aussi forcés, sous la menace d'armes à feu, de détruire les barricades de fortune érigées ces derniers temps par les manifestants contre les forces de sécurité, d'après plusieurs témoignages.

Et à Naypyidaw, la capitale, un journaliste birman du service local de la BBC est "porté disparu" après avoir été emmené par des hommes non identifiés, a annoncé la chaîne britannique, appelant les autorités "à nous aider à le localiser et à confirmer qu'il va bien". Un média local, Mizzima, a annoncé qu'un de ses reporters, Than Htike Aung, avait été "arrêté" en même temps qu'Aung Thura. Plus de 30 journalistes ont été arrêtés depuis le putsch.

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