Niger : les putschistes tiennent face à la pression régionale et internationale

Des partisans de la junte au pouvoir au Niger se rassemblent pour appeler à lutter pour la liberté du pays et à repousser l'ingérence étrangère à Niamey - 03.08.2023
Des partisans de la junte au pouvoir au Niger se rassemblent pour appeler à lutter pour la liberté du pays et à repousser l'ingérence étrangère à Niamey - 03.08.2023 Tous droits réservés Sam Mednick/ AP Photo
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Par Euronews avec AFP
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Au Niger, des milliers de personnes se sont rassemblées jeudi à Niamey pour soutenir les auteurs du coup d'Etat. A l’approche de la date limite du 6 août fixée par les pays voisins pour rétablir le président renversé, les putschistes sont sous pression.

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Des milliers de personnes ont manifesté dans le calme jeudi à Niamey en soutien au coup d'Etat au Niger qui a renversé le président élu Mohamed Bazoum, séquestré depuis huit jours et dont le président américain a exigé la "libération immédiate".

De plusieurs centaines au début du rassemblement sur la place de la Concertation (bien, place de la Concertation) à Niamey, les manifestants sont vite devenus des milliers, ont constaté des journalistes de l'AFP. Le rassemblement a pris fin à la mi-journée sans incident.

Les manifestants sont venus à l'appel du M62, une coalition d'organisations de la société civile "souverainistes", le jour de la fête des 63 ans de l'indépendance du Niger de la France, ex-puissance coloniale qui y dispose de quelque 1500 soldats pour aider à combattre les groupes armés jihadistes qui sévissent dans ce pays.

"A bas la France", "Vive la Russie, vive Poutine", scandaient notamment les manifestants.

Depuis le coup d'Etat du 26 juillet dans ce pays producteur de pétrole et d'uranium, les relations avec Paris se sont dégradées à la suite d'incidents dimanche lors d'une manifestation devant l'ambassade de France, qui ont entraîné l'évacuation de plus de 500 Français.

Jeudi, les accès à l'ambassade et à d'autres chancelleries proches, étaient bloqués par les forces de l'ordre nigériennes, ont constaté des journalistes de l'AFP. Avant la manifestation, Paris avait rappelé "que la sécurité des emprises et des personnels diplomatiques sont des obligations au titre du droit international".

"C'est seulement la sécurité qui nous intéresse", qu'elle soit assurée par "la Russie, la Chine, la Turquie, s'ils veulent nous aider", affirme un des manifestants, Issiaka Hamadou, jeune entrepreneur, qui ajoute: "Nous, on ne veut juste pas les Français qui nous pillent depuis 1960, ils sont là depuis et rien ne change! A quoi ils ont servi?".

Préserver "la démocratie"

Aux Etats-Unis, un des principaux partenaires du Niger avec la France et qui y déploie également un millier de militaires, le président Joe Biden a appelé "à la libération immédiate du président Bazoum et sa famille, et à la préservation de la démocratie conquise de haute lutte au Niger".

M. Bazoum, 63 ans, est retenu avec sa famille depuis le jour du putsch dans sa résidence présidentielle. L'électricité y a été volontairement coupée jeudi, a affirmé son parti.

La France a affrété cinq avions depuis mardi pour une opération d'évacuation dont le ministre français des Armées Sébastien Lecornu a annoncé jeudi qu'elle était terminée : 1.079 ressortissants français et étrangers, dont des Européens, "sont désormais en sécurité", a-t-il dit.

Les Etats-Unis et le Royaume-Unis ont successivement ordonné mercredi et jeudi l'évacuation du personnel non essentiel de leurs ambassades respectives à Niamey.

La situation est tendue avec les partenaires occidentaux et africains traditionnels du Niger depuis que l'ex-chef de la garde présidentielle, le général Abdourahamane Tiani, a pris le pouvoir.

Solidarité putschiste

La Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao), présidée par le Nigeria, a dit se préparer à une opération militaire même si elle a souligné qu'il s'agissait de "la dernière option sur la table".

S'exprimant devant la presse à Dakar, la cheffe de la diplomatie sénégalaise Aïssata Tall Sall a indiqué que son pays participerait à une éventuelle intervention si la Cédéao décide de cette dernière. Elle a invoqué les engagements internationaux de son pays envers la Cédéao et le fait qu'il s'agissait du "coup (d'Etat) de trop". "Les militaires sénégalais, pour toutes ces raisons, vont y aller", a-t-elle dit.

Les chefs d'état-major de l'organisation sont réunis à Abuja jusqu'à vendredi, deux jours avant l'expiration dimanche d'un ultimatum exigeant un retour de Mohamed Bazoum.

En ligne avec le blocus économique décidé dimanche, le Nigeria a coupé son approvisionnement en électricité au Niger, qui dépend énergétiquement à 70% de son voisin.

La Banque mondiale, qui a dépensé 1,5 milliard de dollars d'aides au Niger en 2022, a annoncé la suspension des versements "pour toutes ses opérations et jusqu'à nouvel ordre".

En face, le nouveau pouvoir à Niamey a envoyé un émissaire au Mali et au Burkina Faso, deux pays également dirigés par des militaires putschistes, confrontés à la violence jihadistes et solidaires de leur voisin.

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Ils ont affirmé que toute intervention armée serait considérée "comme une déclaration de guerre" à leurs deux pays et entraînerait leur retrait de la Cédéao.

A Niamey, le général Tiani a déclaré rejeter "en bloc les sanctions" et refuser "de céder à toute menace", dans un discours télévisé mercredi. "Nous refusons toute ingérence dans les affaires intérieures du Niger".

Il a assuré que les Français, "qui n'ont jamais été l'objet de la moindre menace", n'avaient "aucune raison objective de quitter le Niger".

La Russie, qui avait demandé lundi le "retour à la légalité, a elle appelé au "dialogue" pour éviter une "dégradation de la situation", estimant que la "menace de recourir à la force contre un Etat souverain ne contribuera(it) pas à désamorcer les tensions et à résoudre la situation dans le pays".

Pour l'instant, l'évacuation des soldats français et américains qui participent à la lutte anti-jihadiste n'est pas prévue.

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Washington ne parle pas de "coup d'Etat", estimant qu'il reste encore une "petite fenêtre" pour la diplomatie et le rétablissement du président Bazoum dans ses fonctions.

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