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Le PIB par habitant de l'Espagne dépasse celui du Japon, comment l'expliquer ?

Femme en voyage à Barcelone, Espagne
Femme en voyage à Barcelone, Espagne Tous droits réservés  Canva
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Par Doloresz Katanich
Publié le
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L'économie espagnole florissante, tirée par un essor mondial des services, dont le secteur du tourisme, a pris le pas sur les performances moroses de l'économie japonaise au cours de la dernière décennie.

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Tirée par une économie florissante, l'Espagne a, depuis deux ans, un PIB par habitant (36 190 dollars) plus élevé que celui du Japon (33 960 dollars), selon les données du Fonds monétaire international (FMI). C'est la première fois que Madrid dépasse Tokyo dans cet indicateur étroitement lié au niveau de vie.

En réalité, cela ne signifie pas que l'économie espagnole est plus importante que celle japonaise. Mais lorsque le PIB de l'Espagne est divisé par le nombre d'habitants du pays et converti en dollars américains, le PIB par habitant en prix courants s'avère plus élevé que celui du Japon.

En 2024, année durant laquelle le changement s'est opéré, le PIB par habitant espagnol (35 090 dollars) était déjà légèrement plus élevé que celui du Japon (32 500 dollars).

Alors que l'économie espagnole a été l'une des plus dynamiques ces dernières, "ce chiffre est également dû à un artefact statistique", a expliqué Ángel Talavera, responsable de l'économie européenne chez Oxford Economics à Euronews Business.

"Le yen japonais s'est déprécié de 40 % depuis 2021, ce qui signifie que même si le PIB japonais par habitant en monnaie locale reste inchangé, il est inférieur de 40 % lorsqu'il est mesuré en dollars américains", a-t-il ajouté. Cela signifie qu'un grand nombre de données économiques japonaises se sont considérablement détériorées ces dernières années lorsqu'elles sont mesurées en dollars américains, ce qui est nécessaire pour les comparaisons internationales.

Comment expliquer une telle croissance espagnole ?

L'Espagne, qui est sortie de la crise financière il y a un peu plus de dix ans, a vu son économie croître de 3,2 % en 2024, surpassant la France, l'Allemagne et l'Italie, les trois plus grandes économies de la zone euro. L'économie allemande, la plus importante du continent, s'est contractée de 0,2 %.

Le PIB de l'Espagne a ainsi été tiré vers le haut par une forte demande intérieure et un tourisme important, qui "a profité plus fortement qu'au Japon", a expliqué Matthieu Gertken, stratège géopolitique en chef de BCA Research.

Cette croissance peut également s'expliquer avec les services, qui représentent un peu plus des deux tiers de la production économique du pays. L'amélioration de ce secteur est ainsi l'une des principales raisons du succès espagnol.

En Espagne, la croissance a également été renforcée par une croissance démographique importante a également contribué à l'amélioration de la production.

La forte performance économique de l'Espagne au cours de la dernière décennie a aussi été soutenue par le gouvernement, via "des réformes brutales et un ajustement majeur des coûts de la main-d'œuvre dans le sillage de la crise de la dette souveraine européenne, qui ont stimulé sa compétitivité", a ajouté Matthieu Gertken. Le prix de l'énergie est également plus bas en Espagne que dans les autres pays européens.

Pendant la crise financière, le taux de chômage en Espagne était d'environ 25 %, l'un des plus élevés de l'UE. Les entreprises en difficulté avaient alors tendance à privilégier les contrats de travail temporaires, et l'Espagne a réagi en approuvant des réformes visant à assouplir la protection des salariés dans le cadre des contrats à durée indéterminée. La réduction des coûts de licenciement et des droits des travailleurs, entre autres réformes, a ainsi permis d'améliorer la mobilité de la main-d'œuvre, en aidant à faire coïncider les postes avec les travailleurs qualifiés, ce qui a conduit à une amélioration de la productivité.

L'économie japonaise freinée

Entre-temps, au Japon, "la productivité du travail est restée faible", a assuré stratège géopolitique.

Le Japon, quatrième économie mondiale, s'efforce de maintenir son rôle de leader dans l'économie mondiale, perdant sa place de troisième économie au profit de l'Allemagne l'année dernière. Les données du FMI indiquent qu'en 2025, le Japon devrait également être dépassé par l'Inde et tomber à la cinquième place en termes de PIB.

L'économie japonaise, axée sur la technologie, a à peine progressé au cours des trois dernières décennies et a été durement touchée par la pandémie de Covid-19. Son PIB a chuté de 4,2 % en 2020.

Le centre de recherche japonais Nikko Research Center a déclaré que le pays était en difficulté en raison du manque d'innovation. Le rapport note également qu'en 2000, le PIB par habitant du Japon était le deuxième plus élevé au monde après celui du Luxembourg. Il est, aujourd'hui, au 38e rang.

Mais les performances économiques actuelles du Japon ne laissent pas présager un redressement rapide. L'économie s'est contractée au premier trimestre, sous l'effet de la faiblesse des exportations. À cela s'ajoutent une demande intérieure atone, une inflation croissante et une production ralentie. Les tarifs douaniers américains nuisent aux exportations et à la production industrielle, ce qui alimente les craintes d'une récession de l'économie japonaise au deuxième trimestre.

La léthargie persistante de l'économie japonaise est également alimentée par le vieillissement de la population, qui entraîne une grave pénurie de main-d'œuvre et une augmentation des coûts de la sécurité sociale.

Pour tenter d'enrayer la machine, l'économie est soutenue par de nombreuses mesures de relance budgétaire, axées sur les subventions énergétiques, le soutien aux salaires et l'infrastructure numérique.

S'agit-il d'un succès éphémère pour l'économie espagnole ?

Les économies axées sur les services, telles que l'Espagne, devraient enregistrer de meilleures performances à l'avenir, car les tendances de consommation évoluent dans le monde entier.

Dans l'ensemble, la contribution des services aux économies mondiales a considérablement augmenté. Selon l'Organisation mondiale du commerce (OMC), la part du secteur des services dans le PIB mondial est passée de 53 % à 67 % entre 1970 et 2021.

Selon le FMI, le PIB par habitant de l'Espagne devrait donc rester supérieur à celui du Japon jusqu'à la fin des prévisions actuelles, en 2030. Le PIB par habitant de l'Espagne devrait dépasser les 42 300 dollars, tandis que celui du Japon restera aux alentours de 41 700 dollars, sur la base des tendances actuelles.

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