Il n'est pas nouveau que des musiciens fassent la une des journaux pour leurs opinions politiques, mais cette année, à Glastonbury, les concerts de Kneecap et de Bob Vylan ont mis les politiciens en colère, y compris le Premier ministre britannique Starmer. La police enquête sur ces deux concerts.
Glastonbury, le plus grand festival musical estival de Grande-Bretagne, qui attire chaque année quelque 200 000 fans de musique à Worthy Farm, dans le sud-ouest de l'Angleterre, s'est achevé cette année. Cette édition a été l'une des plus controversées de l'histoire récente.
Les rappeurs controversés de Belfast, Kneecap, et leur concert du week-end ont fait la une des journaux pendant la période précédant le festival, après que plusieurs députés, dont le Premier ministre Keir Starmer, ont demandé à Glastonbury de retirer le groupe de l'affiche, en raison de leur fréquentes remarques provocantes en soutien aux Palestiniens et de l'inculpation de Mo Chara, membre du groupe, pour un délit de terrorisme.
Le groupe a tout de même joué et a reçu le soutien d'Emily Eavis, co-organisatrice de Glastonbury, qui a déclaré que "tout le monde est le bienvenu".
Son père, Michael Eavis, fondateur du festival, a ajouté : "Les personnes qui ne sont pas d'accord avec la politique de l'événement peuvent aller ailleurs !"
Pourtant, la controverse était inévitable...
Kneecap fait du grabuge
Comme prévu, Kneecap a donné un concert incendiaire à Glastonbury, sur la scène West Holts, devant une foule immense agitant d'innombrables drapeaux palestiniens.
La BBC, le diffuseur partenaire du festival, a indiqué dans un communiqué, quelques heures avant que le groupe ne monte sur scène, que son concert ne serait pas diffusé en direct et qu'il serait plutôt disponible en version à la demande après la fin du concert.
Auparavant, Kemi Badenoch, cheffe du parti conservateur, avait déclaré que la BBC "ne devrait pas diffuser" la prestation de Kneecap au festival : "La BBC ne devrait pas diffuser la propagande de Kneecap. L'un des membres du groupe Kneecap, inculpé en vertu de la loi sur le terrorisme, est actuellement en liberté sous caution. En tant que plateforme financée par des fonds publics, la BBC ne devrait pas récompenser l'extrémisme".
Le trio, DJ Próvaí, Mo Chara et Móglaí Bap, est monté sur scène avec des écrans affichant leur message habituel : "Israël commet un génocide contre le peuple palestinien, avec l'aide du gouvernement britannique. Libérez la Palestine". Ce message a été galvanisé pendant le concert lorsque le groupe a déclaré : "On ne peut pas le cacher, Israël est un criminel de guerre."
"Glastonbury, je suis un homme libre", a également déclaré Chara, en référence à la libération sous caution sans condition de sa comparution pour terrorisme.
"Mo Chara était au tribunal ce mois-ci", a déclaré Bap. "Quelqu'un était-il présent ? Mo Chara est au tribunal pour une fausse accusation de terrorisme. Ce n'est pas la première fois qu'il y a une erreur judiciaire pour un Irlandais dans le système judiciaire britannique".
Chara a ensuite mentionné Keir Starmer, qui a affirmé qu'il n'était pas "approprié" que le groupe joue à Glastonbury : "Le Premier ministre de votre pays a dit qu'il ne voulait pas que nous jouions, alors allez vous faire f**tre, Keir Starmer".
Ils ont fait écho à ce sentiment lors de la présentation de leur chanson préférée "Get Your Brits Out", Chara déclarant à la foule : "Nous aimons le peuple anglais, c'est le gouvernement anglais que nous ne supportons pas. F*ck Keir Starmer".
Le groupe a terminé son concert en remerciant le festival de Glastonbury pour son soutien au groupe et à la Palestine, Bap déclarant : "Un jour, les gens qui n'ont pas parlé de la Palestine seront controversés", et Chara a abondé dans le même sens : "Souvenez-vous de ces c*nnards, nous nous souviendrons d'eux".
Cependant, leur set n'a pas été le seul moment controversé de cette édition hautement politisée... En fait, ils se sont peut-être fait voler la vedette par un autre groupe.
Bob Vylan : controverse avant le set de Kneecap
Avant le set de Kneecap, le duo rap-punk Bob Vylan a lui aussi fait polémique en entraînant la foule dans des chants : "Palestine libre, libre" et "Mort, mort aux FDI (Forces de défense israéliennes)".
La BBC a indiqué qu'elle avait émis un avertissement à l'écran à propos d'un "langage très fort et discriminatoire" pendant la retransmission en direct.
Mais ce n'est pas tout.
L'ambassade d'Israël au Royaume-Uni s'est déclarée sur les réseaux sociaux "profondément troublée par la rhétorique incendiaire et haineuse exprimée sur scène au festival de Glastonbury", tandis que la Campagne contre l'antisémitisme (CAA) a indiqué qu'elle porterait officiellement plainte auprès de la BBC pour sa "décision scandaleuse" de diffuser le spectacle.
Dans une déclaration, le Premier ministre Keir Starmer a déclaré : "Il n'y a aucune excuse pour ce genre de discours haineux épouvantable". Le Premier ministre a également réitéré son précédent argument selon lequel Kneecap aurait dû être retiré de la programmation : "J'ai dit que Kneecap ne devait pas avoir de tribune et que cela valait pour tout autre artiste proférant des menaces ou incitant à la violence. La BBC doit expliquer comment ces scènes ont pu être diffusées".
Même Emily Eavis a réagi à la prestation de Bob Vylan.
"Leurs chants ont dépassé les bornes et nous rappelons d'urgence à toutes les personnes impliquées dans la production du festival qu'il n'y a pas de place à Glastonbury pour l'antisémitisme, les discours de haine ou l'incitation à la violence", a-t-elle écrit.
Elle a ajouté que si "en tant que festival, nous nous opposons à toutes les formes de guerre et de terrorisme, nous croirons toujours en l'espoir, l'unité, la paix et l'amour, et nous ferons activement campagne en ce sens", ajoutant que les commentaires d'un artiste "ne devraient jamais être considérés comme une approbation tacite de ses opinions et de ses croyances".
Eavis a quand même relevé : "Avec près de 4 000 spectacles à Glastonbury 2025, il y aura inévitablement des artistes et des orateurs qui se produiront sur nos scènes et dont nous ne partageons pas les opinions".
La police britannique a déclaré qu'elle examinait les images du spectacle afin de déterminer si des infractions ont été commises.
Bob Vylan, c'est qui, c'est quoi ?
Bob Vylan est un duo punk-rap connu pour ses textes à forte charge politique qui s'attaquent au racisme, à l'homophobie, aux brutalités policières et aux politiques d'extrême droite.
Les deux membres gardent leurs vrais noms secrets et sont connus sous le nom de Bobby Vylan et Bobbie Vylan.
Formé à Ipswich en 2017, le groupe a sorti cinq albums - "Vylan" (2017), "Dread" (2019), "We Live Here" (2020), "Bob Vylan Presents The Price Of Life" (2022), et "Humble As The Sun", sorti l'année dernière.
Ils ont remporté plusieurs prix, dont celui du meilleur groupe alternatif aux MOBOs en 2022.
Comme Kneecap, le duo s'est exprimé ouvertement sur la guerre à Gaza.
Selon un rapport de l'ONU, les actions militaires d'Israël relèvent du génocide et au moins 56 000 Palestiniens ont été tués, d'après le ministère de la santé de Gaza.
Israël a toujours nié que ses actions en Palestine pouvaient être assimilées à un génocide et a affirmé qu'il n'avait participé à aucun crime de guerre.