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Des décennies de déforestation ont fait des inondations en Asie un des pires drames météo de 2025

Un rescapé traîne un sac d'objets récupérés dans la boue, dans une zone touchée par une crue éclair à Aceh Tamiang, sur l'île de Sumatra, en Indonésie, jeudi 4 décembre 2025.
Un rescapé traîne un sac d’objets récupérés dans la boue, dans une zone touchée par une crue éclair à Aceh Tamiang, sur l’île de Sumatra, en Indonésie, jeudi 4 décembre 2025. Tous droits réservés  Copyright 2025 The Associated Press. All rights reserved.
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Par Liam Gilliver
Publié le
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Alors que de nouvelles pluies menacent d'aggraver encore les ravages dans plusieurs régions d'Asie, les appels à lutter contre la déforestation se font plus pressants.

Des tempêtes tropicales qui se chevauchent et des systèmes de mousson « intensifiés » ont semé la dévastation à travers l’Asie, tandis que les équipes de secours s’empressent encore d’atteindre des survivants isolés.

Plusieurs jours de pluies record et de surcotes ont déclenché la semaine dernière des inondations et des glissements de terrain catastrophiques au Sri Lanka, en Indonésie, en Thaïlande, en Malaisie et au Vietnam. Des milliers de maisons ayant été détruites et des routes se transformant rapidement en torrents de boue, des habitants ont été retrouvés agrippés à des toits ou à des arbres pour rester en vie.

Le bilan a désormais dépassé 1 600 morts, mais des centaines de personnes sont toujours portées disparues dans toute la région. Selon l’ONU, ce phénomène figure parmi les plus meurtriers qu’ait connus l’Asie du Sud et du Sud-Est depuis des années.

Si l’affrontement de trois systèmes météorologiques tropicaux, dont les cyclones Ditwah et Senyar, a été probablement alimenté par le changement climatique, les environnementalistes avertissent que c’est la déforestation « galopante » qui a aggravé la tragédie.

La déforestation est-elle responsable des inondations meurtrières en Asie ?

De nouvelles pluies sont attendues en Indonésie, l’un des territoires les plus touchés, dans les prochains jours, avec des effets probables sur le Sumatra du Nord, le Sumatra occidental et Aceh. Sur place, les habitants se remettent encore difficilement des crues, confrontés à de graves pénuries alimentaires et à l’accès à l’eau potable.

WALHI, la plus grande et la plus ancienne ONG de plaidoyer environnemental d’Indonésie, affirme que la catastrophe est due à une « vulnérabilité écologique croissante » liée aux changements dans des écosystèmes importants et qu’elle a été exacerbée par la crise climatique.

« Cette catastrophe n’est pas seulement un phénomène naturel, mais un désastre écologique produit par des politiques publiques négligentes et permissives », déclare Ahmad Soilhin, de WALHI Aceh.

« Ces inondations à répétition résultent de l’accumulation de la déforestation, de l’expansion de la production d’huile de palme et de l’orpaillage illégal, que l’on a laissé se déchaîner. »

La déforestation en Indonésie

Entre 2016 et 2025, pas moins de 1,4 million d’hectares à Aceh, au Sumatra du Nord et au Sumatra occidental ont été déboisés en raison des activités de plus de 600 entreprises.

Ces forêts ont été abattues pour une multitude de raisons, notamment des permis miniers, l’implantation de plantations de palmier à huile, ainsi que des autorisations de projets géothermiques, hydroélectriques et de micro-hydroélectricité.

À Aceh, on compte 954 bassins versants (une zone ou une ligne de crête qui aide à séparer les eaux s’écoulant vers différents fleuves, bassins ou mers). WALHI indique que 60 % d’entre eux se trouvent en zone forestière, et que 20 sont critiques.

Pourtant, la plupart ont connu une déforestation importante. Par exemple, le bassin versant de Krueng Trumon couvre plus de 50 000 hectares, mais ces dernières années, près de la moitié (43 %) a perdu son couvert forestier. Il en reste aujourd’hui moins de 31 000 hectares.

Comment les forêts peuvent-elles aider les pays à se protéger des inondations ?

Les forêts sont vitales pour la gestion des inondations, agissant comme d’immenses éponges qui ralentissent l’écoulement de l’eau et réduisent le volume du ruissellement.

Les arbres peuvent évaporer plus d’eau que toute autre forme de végétation et sont considérés comme l’une des meilleures défenses naturelles contre les crues. Des chercheurs de l’Université de la Colombie-Britannique affirment que la coupe à blanc (où tous les arbres sont abattus) ne fait pas qu’augmenter le risque d’inondation : elle peut l’amplifier de façon spectaculaire.

Dans une étude publiée plus tôt cette année, les scientifiques ont constaté que, dans certains bassins versants, les inondations devenaient jusqu’à 18 fois plus fréquentes et plus de deux fois plus sévères après une coupe à blanc. Ces effets peuvent durer plus de quatre décennies.

L’Indonésie sommée de « revoir la gestion des forêts »

Les inondations meurtrières en Asie ont entraîné une montée des appels pour que le gouvernement indonésien endigue la déforestation.

Rangga Adiputra, un enseignant de 31 ans dont la maison au Sumatra occidental a été emportée, vivait en périphérie de la ville de Padang. Les collines au-dessus de son village portaient les cicatrices de l’exploitation forestière illégale.

« Nous avons besoin que le gouvernement enquête et remette d’aplomb la gestion des forêts », a déclaré Adiputra à l’AP. « Nous ne voulons pas que cette catastrophe coûteuse se reproduise. »

Les environnementalistes affirment que la vue de souches d’arbres emportées par les rivières « renforce les soupçons » que les pratiques d’exploitation des forêts se poursuivent.

« À partir de ces faits, nous pouvons clairement voir que la catastrophe écologique actuelle est causée par des responsables de l’État et des entreprises », affirme Uli Arta Siagian, de WALHI National Forest and Plantation.

« Il incombe donc aux responsables publics d’évaluer tous les permis accordés aux entreprises en Indonésie, en particulier ceux qui concernent des écosystèmes importants et critiques. S’il faut révoquer des permis, il faut le faire. »

L’État est désormais sous pression pour traduire en justice les responsables de cette déforestation, les environnementalistes soutenant que les contribuables ne devraient pas avoir à supporter les coûts de la restauration des forêts dans les bassins versants.

« Ils ont engrangé d’énormes profits en exploitant la nature ; il est temps qu’ils assument aussi la responsabilité de sa restauration », ajoute Siagian.

Les autorités ont rejeté les accusations de coupes illégales.

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