L'accord migratoire entre l'Italie et l'Albanie doit être conforme au droit européen et international, selon la Commission européenne

L'accord sur les migrations a été annoncé lundi par le premier ministre albanais, Edi Rama, et le premier ministre italien, Giorgia Meloni.
L'accord sur les migrations a été annoncé lundi par le premier ministre albanais, Edi Rama, et le premier ministre italien, Giorgia Meloni. Tous droits réservés TIZIANA FABI/AFP or licensors
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Par Jorge LiboreiroVincenzo Genovese
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Cet article a été initialement publié en anglais

La Commission européenne a réagi avec réserve concernant l'accord migratoire conclu entre l'Italie et l'Albanie. Elle se contente d'indiquer qu'il doit être conforme au droit communautaire et international.

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La Commission européenne veut se donner le temps d'analyser l’accord migratoire entre l’Italie et l’Albanie.

"Nous sommes en contact avec les autorités italiennes, car nous avons besoin de voir les détails. Nous demandons à recevoir des informations détaillées sur ce type d'accord", a souligné mardi une porte-parole de la Commission européenne.

L'accord, le premier du genre pour un État membre de l'UE, a été annoncé lundi par la Première ministre italienne, Giorgia Meloni, et son homologue albanais, Edi Rama, lors d'une réunion à Rome.

En vertu de cet accord, inattendu, l'Italie construira deux centres d'accueil dans le pays balkanique afin de traiter les demandes d'asile des migrants secourus en Méditerranée par les autorités italiennes, qui seront ensuite débarqués dans la ville côtière albanaise de Shëngjin.

Les centres auront la capacité d'héberger jusqu'à 3 000 migrants à la fois, a précisé Giorgia Meloni. L'objectif est de traiter 36 000 demandes par an. Les femmes enceintes, les enfants et les personnes vulnérables seront exclus du système.

L'infrastructure sera financée par Rome, tandis que Tirana s'est engagée à fournir des services de sécurité et de surveillance extérieure. Le lancement a été fixé au printemps 2024.

Les deux centres relèveront de la juridiction italienne, un point qui a soulevé des inquiétudes quant à l'application extraterritoriale du droit italien et européen dans un pays n'appartenant pas à l’UE.

"Les États membres ne sont pas empêchés en tant que tels d'adopter des mesures de droit national pour permettre aux personnes originaires de pays tiers de demander l'asile", estime la porte-parole de la Commission, "mais cela doit se faire sans préjudice de la pleine application des règles de l'UE en matière d'asile".

Un flou demeure sur le cas des expulsions des demandeurs d'asile déboutés. Les rapports initiaux suggèrent que cette tâche serait effectuée par Tirana, mais le Premier ministre albanais a déclaré qu'elle incomberait d'abord aux autorités italiennes.

L'accord a été conclu au niveau politique et doit encore être "suivi de toutes les dispositions réglementaires qui en découlent", a prévenu Giorgia Meloni.

Ce développement a immédiatement suscité des comparaisons avec l'accord migratoire controversé entre le Royaume-Uni et le Rwanda. Ce dernier prévoit le transfert de demandeurs d'asile du territoire britannique vers le pays africain pendant l'examen de leurs demandes. L'accord est toujours bloqué par les tribunaux britanniques et aucune expulsion n'a eu lieu.

Ylva Johansson, commissaire européenne chargée des Affaires intérieures, a déclaré l'année dernière que le plan britannique n'était pas "une politique migratoire humaine et digne". Toutefois, l'Autriche a récemment annoncé qu'elle était ouverte à l'examen d'un accord de type rwandais avec un pays non-membre de l'UE.

Interrogée sur la comparaison, la porte-parole de la Commission a nié la similitude, car le dispositif italo-albanais s'appliquerait à ceux qui n'ont pas encore atteint les côtes italiennes.

"Nous devons d'abord comprendre le cas italien avant de pouvoir entrer dans les détails. D'après les premières informations dont nous disposons, il ne s'agit pas du même cas. Mais là encore, nous aurons besoin d'informations détaillées", ajoute le porte-parole.

La nouvelle en provenance de Rome intervient alors que la réforme migratoire en cinq volets de l'Union européenne entre dans sa dernière ligne droite. Cette réforme comprend une "procédure frontalière" plus rapide pour examiner les demandes d'asile qui ne devrait pas durer plus de 12 semaines.

Parallèlement, les États membres s'efforcent de renforcer la "dimension extérieure" de l'immigration, un élément de langage pour les partenariats avec les pays non-membres de l'UE afin d'empêcher le départ des navires de demandeurs d'asile.

L'Italie, qui a vu cette année l'arrivée irrégulière de plus de 145 000 migrants, est devenue l'un des plus ardents défenseurs de cette nouvelle politique.

"Je pense que (l'accord) pourrait devenir un modèle de coopération entre les pays de l'UE et les pays tiers dans la gestion des flux migratoires", estime Giorgia Meloni dans une interview accordée à Il Messaggero, précisant qu'elle avait informé la Commission à l'avance et qu'elle n'avait reçu aucune réaction négative.

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"Je pense que cet accord témoigne d'un esprit européen audacieux".

Cependant, le résultat le plus tangible de la dimension extérieure - le protocole d'accord avec la Tunisie - est secoué par des désaccords, des revers et des remboursements controversés depuis sa signature en juillet.

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