La Commission européenne devrait présenter à la mi-novembre un paquet sur la mobilité militaire visant à simplifier les procédures et à faciliter les mouvements dans l'ensemble de l'Union.
Les autorités françaises demandent à l'UE d'identifier rapidement des corridors de mobilité pour les militaires et de mettre en place une autorité de coordination afin de garantir que les troupes et le matériel de l'ensemble de l'Union puissent se déplacer rapidement vers l'est si un conflit plus important éclate.
"La guerre d'agression menée par la Russie sur le territoire européen, sur le territoire ukrainien, rend probable, je dirais, que nos forces soient fortement engagées sur le territoire européen, sur notre continent", a déclaré récemment à la presse le général de brigade aérienne Fabrice Feola, qui commande le Centre d'opérations et de soutien au transport de l'armée française.
Actuellement, il faut parfois plus de dix jours à la France pour recevoir les autorisations nécessaires des autres États membres afin de déplacer du personnel ou du matériel militaire, alors que l'objectif européen est de cinq jours maximum, a indiqué le général.
La France dirige un bataillon multinational de l'OTAN en Roumanie, forme des soldats ukrainiens en Pologne dans le cadre de la mission EUMAM de l'Union européenne et fait don d'équipements militaires à Kyiv.
Les accords bilatéraux avec d'autres États membres qui réduisent ce délai ne couvrent que des types de convois standard, avec des limites imposées sur le nombre de troupes, de véhicules et le type d'équipement.
La Commission européenne devrait présenter un paquet sur la mobilité militaire à la mi-novembre afin de simplifier les procédures et de faciliter les mouvements dans l'ensemble de l'Union.
Pour le général Feola, l'accélération des délais d'obtention des autorisations de franchissement des frontières et la dématérialisation d'un certain nombre de documents douaniers sont à la fois "réalisables et à portée de main".
Mais l'UE doit aussi identifier d'urgence des corridors de mobilité dont les voies ferrées, les routes, les tunnels et les ponts peuvent supporter les contraintes de hauteur, de largeur et de poids des équipements militaires.
Il ne doit pas y avoir de discontinuité
Des discussions sur les corridors ont eu lieu au cours de l'été entre les États membres, les représentants de l'OTAN, ainsi qu'Andrius Kubilius, commissaire européen chargé de la défense et de l'espace, et Apostolos Tzitzikostas, commissaire chargé des transports.
Quatre de ces corridors ont déjà été établis et 500 projets prioritaires, allant du renforcement des ponts à l'élargissement des tunnels en passant par la construction d'embranchements ferroviaires, ont déjà été identifiés.
Kubilius a déclaré à Euronews au début de l'année (article en anglais) que l'Union européenne aurait besoin d'un investissement initial de 70 milliards d'euros pour adapter d'urgence ses corridors ferroviaires, routiers, maritimes et aériens afin de faciliter le déplacement rapide des troupes et des équipements à travers l'Union en cas de conflit.
Mais Feola a également estimé qu'"il est extrêmement important d'avoir une autorité unificatrice pour coordonner tous les efforts déployés afin de s'assurer que tout est cohérent d'un pays à l'autre".
"Il ne doit pas y avoir de discontinuité entre les corridors ou entre les routes. Il faut optimiser les efforts, je dirais, pour assurer la continuité", a-t-il ajouté.
Les gouvernements de l'UE doivent également préparer le terrain pour que les ministères commencent à travailler ensemble et à communiquer afin qu'en cas de conflit, il n'y ait pas de "concurrence interne" pour le transport des marchandises. La France, a-t-il dit, a réactivé une unité interministérielle de coordination logistique à cet effet.
"Je pense notamment à notre allié américain qui, en cas de déclenchement des plans de l'OTAN, débarquerait en masse sur la côte atlantique et aurait besoin de traverser notre pays pour rejoindre des positions plus à l'est. Cette notion de concurrence nous amène donc inévitablement à nous coordonner au niveau national afin d'utiliser au mieux les ressources dont nous disposons", a déclaré le général français.
La Commission européenne a déjà adopté en avril une nouvelle législation facilitant l'autorisation des wagons de transport de personnel pouvant être intégrés dans les trains de marchandises.
Les trains, selon Fabrice Feola, sont particulièrement pertinents dans le contexte européen et les militaires français ont affrété 150 voyages ferroviaires internationaux en 2024, ce qui représente un énorme bond par rapport à la "poignée - moins de cinq par an" qui étaient affrétés avant que la Russie ne lance son invasion à grande échelle de l'Ukraine en 2022.
Au-delà de la nécessité d'identifier les corridors de transport, le principal autre défi pour les forces armées en matière de mobilité internationale est que la grande majorité du transit des équipements se fait grâce à des ressources provenant du secteur privé.
En France, l'année dernière, 90 % du transport de fret militaire a été réalisé avec des ressources externes. Dans le cas des trains, l'armée française travaille désormais en étroite collaboration avec la société nationale des chemins de fer, la SNCF.