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Fnac Darty : l’offensive du géant chinois JD.com qui fait trembler Paris

Les logos des enseignes Fnac et Darty
Les logos des enseignes Fnac et Darty Tous droits réservés  AP Photo
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Par Jean-Philippe Liabot
Publié le Mis à jour
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L’arrivée de JD.com au capital de Fnac Darty dépasse le simple mouvement capitalistique : elle ravive les craintes de Bercy face à la montée en puissance chinoise en Europe, entre risques sur les données, souveraineté culturelle et stratégie d’influence à long terme.

Vous ne le connaissez peut-être pas, mais après Shein, Temu, et Alibaba, voici JD.com un autre nom qui commence à faire parler de lui en France. Et pour cause, la société asiatique s'intéresse à un des fleurons de la culture et des produits technologiques en France, Fnac-Darty.

Fin octobre, le géant chinois du e-commerce avait déjà lancé sa plateforme de commerce JoyBuy, sur le marché français et dans quelques pays européens, pour concurrencer d'autres géants chinois et bien sûr l'américain Amazon qui domine sans le marché.

Qui est JD.Com ?

JD.com, appelé en Chine Jingdong, a été fondé en 1998 à Pékin par Liu Qiangdong, également connu sous le nom de Richard Liu. L’entreprise était à l’origine un magasin physique dédié uniquement aux produits électroniques.

Depuis ses débuts modestes, JD.com est devenu l’un des géants de l’e-commerce en Chine. En 2024, son chiffre d’affaires a atteint près de 160 milliards de dollars.

Actuellement JD.com est le numéro 3 de son secteur en Chine derrière les géants Alibaba et le propriétaire de Temu, PDD Holdings.

Des employés trient des colis dans un centre de distribution de la plateforme de commerce électronique JD.com, à Pékin.
Des employés trient des colis dans un centre de distribution de la plateforme de commerce électronique JD.com, à Pékin. Andy Wong/Copyright 2025 The AP. All rights reserved

Qui détient Fnac-Darty en 2025 ?

Vesa Equity Investment SARL du milliardaire tchèque Daniel Křetínský est le premier actionnaire, autour de 28,28 % du capital.

L’issue du dossier dépend largement de lui. Il est le principal contrepoids à l’arrivée de JD.com. Il se retrouve en position d’arbitre : soit il renforce sa participation pour préserver l’ancrage européen de Fnac Darty, soit il profite de l’intérêt du géant chinois pour céder une partie de ses parts et récupérer des liquidités.

Ceconomy AG, le groupe allemand propriétaire de MediaMarkt et Saturn est le deuxième actionnaire, avec environ 22% du capital.

D’autres actionnaires et plusieurs fonds d’investissement détiennent chacun quelques pourcents du capital. Une petite part des actions appartient aussi aux salariés et au groupe lui-même. Le reste est réparti entre de nombreux petits investisseurs en Bourse.

JD.com a lancé cet été une opération d’acquisition visant Ceconomy. En le rachetant le géant chinois prendrait de facto le contrôle de la participation détenue par Ceconomy dans Fnac Darty. Cette transaction, représenterait un montant estimé à 2,2 milliards d’euros. Elle est en cours de finalisation en Allemagne.

Principalement présent en France, Fnac Darty est également implanté en Espagne, au Portugal, en Belgique, en Suisse, au Luxembourg, en Tunisie, au Qatar, en Côte d’Ivoire, au Cameroun, au Congo, au Sénégal et en Arabie Saoudite.

Des clients entrant dans un magasin Fnac
Des clients entrant dans un magasin Fnac AP Photo

Le ministère de l'Économie sur le qui-vive

Les services de Bercy chargés de surveiller les investissements étrangers dans les sociétés françaises, scrutent toujours avec un peu plus d'attention les projets impliquant des entreprises chinoises. Cela ne se limite pas à mesurer l’impact économique direct : ils évaluent aussi les risques potentiels pour la souveraineté culturelle et la capacité de la France à garder la main sur la création et la diffusion de contenus de ce type.

Cette vigilance s’inscrit dans une logique plus large de protection des intérêts nationaux, où les industries culturelles sont désormais perçues par les autorités comme des secteurs stratégiques, au même titre que ceux de l'énergie ou des technologies dites sensibles.

Selon des sources proches du dossier, la direction de JD.com s'est entretenue avec le ministère de l’Économie pour tenter de rassurer Paris, en réaffirmant la volonté du groupe de respecter le cadre réglementaire français et de ne pas renforcer davantage sa participation au capital de la société. Le ministre de l'Économie Roland Lescure a confirmé récemment que des discussions étaient en cours.

Le ministère saisi par JD.com elle même d'une demande d'examen de l'opération, a entre un et trois mois pour rendre une décision.

Bercy, le Ministère français de l'Économie, des Finances et de l'Industrie
Bercy, le Ministère français de l'Économie, des Finances et de l'Industrie AP Photo

Dans le cas de JD.com, le problème de l'accès aux données des quelques deux millions de clients de Fnac-Darty par la Chine entre aussi en ligne de compte.

En cause, la loi chinoise sur le renseignement national adoptée en 2017, puis régulièrement amendée et élargie depuis, qui impose aux organisations et aux citoyens de coopérer avec les services de sécurité et de leur fournir les informations jugées utiles à leurs missions. Dans ce contexte, une société mère comme JD.com située en Chine pourrait être contrainte, au moins sur le plan légal, à communiquer des informations que détiendraient ses partenaires européens.

Et justement, Fnac Darty dispose d’un volume important d’informations sur les habitudes et les préférences culturelles et technologiques des consommateurs français et européens. Un véritable trésor de guerre pour la Chine, et un casse-tête sécuritaire pour les autorités préoccupées par la souveraineté numérique de la France.

Derrière l’opération, qui pourrait faire de JD.com le deuxième actionnaire de l’enseigne française, se dessine une question plus large : jusqu’où laisser la Chine prendre pied dans les infrastructures commerciales et numériques du continent, des entrepôts logistiques aux bases de données clients, sans perdre le contrôle de secteurs considérés comme stratégiques ?

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