Comment investir dans l'accès à l'eau peut transformer nos économies

La plus grande station d'épuration des eaux du Qatar est exploitée par une entreprise espagnole
La plus grande station d'épuration des eaux du Qatar est exploitée par une entreprise espagnole Tous droits réservés Euronews
Par Guy Shone & Laila Humairah
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Garantir l'accès à l'eau et l'assainissement est crucial alors que plus de deux milliards de personnes en sont privées dans le monde. Un enjeu humanitaire, mais aussi économique car on estime que chaque dollar investi dans ces ressources en génère quatre.

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À l'approche de la Journée mondiale de l'eau le 22 mars, The Exchange évoque le défi de la sécurisation de l'approvisionnement en eau et de l'accès à l'assainissement alors que plus de deux milliards de personnes en sont privées dans le monde. Un enjeu humanitaire, mais aussi économique car on estime que chaque dollar investi dans ces ressources en génère quatre.

Dans les pays occidentaux, rares sont ceux qui réfléchissent à l'économie de l'eau. Les coûts pour les consommateurs sont relativement bas et l'approvisionnement n'est quasiment jamais coupé, à l'exception des interdictions d'arrosage pendant les périodes de sécheresse. Toutefois, cette situation est de plus en plus menacée par le changement climatique et l'augmentation constante de notre consommation d'eau, en particulier dans l'agriculture.

Selon l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), 60% de la population mondiale pourrait être confrontée à des problèmes d'eau d'ici à 2050, les familles à faible revenu étant les plus touchées par cette crise.

Dans certaines régions, la pénurie d'eau pourrait entraîner une baisse de la croissance économique pouvant aller jusqu'à 6% du PIB.

"Les robinets doivent passer avant les fusils"

Actuellement, plus de deux milliards de personnes dans le monde n'ont pas accès à l'eau potable et à l'assainissement, ce qui constitue un obstacle majeur au développement. Investir dans ces ressources aurait un impact considérable.

Les familles consacreraient moins de temps et d'argent à se procurer de l'eau, libérant davantage de ressources pour l'éducation et le travail et contribuant ainsi à les sortir de la pauvreté. L'état de santé des populations s'en trouve globalement amélioré, les coûts en matière de soins étant eux réduits.

Yirmiyan Arthur/Copyright 2020 AP - Tous droits réservés
Une femme s'approvisionne en eau auprès d'un camion dans le nord de l'IndeYirmiyan Arthur/Copyright 2020 AP - Tous droits réservés

Selon Water.org, l'accès universel à l'eau et à l'assainissement de base se traduirait par des retombées économiques de plus de 17 milliards d'euros, rien qu'en raison de la diminution du nombre de décès. On estime que, globalement, chaque dollar investi dans l'eau et l'assainissement génère un rendement économique de 4 dollars grâce à la baisse des coûts de santé, à la hausse de la productivité et à la diminution du nombre de décès prématurés.

Pourtant, les politiques ne s'emparent pas suffisamment de ce sujet, estime Loïc Fauchon, président du Conseil mondial de l'eau, qui appelle à ce que cela change. "Partout, l'eau exige des réponses politiques, c'est notre principal mot d'ordre," souligne-t-il. "Nous disons aux dirigeants politiques à travers le monde : Cessez d'ignorer l'eau ! Les robinets doivent passer avant les fusils !" lance-t-il. "Vous pouvez aisément comprendre ce que cela veut dire très concrètement pour le budget des États et à tous les niveaux, international, national et local," renchérit-il.

La solution du Qatar : technologies et partenariats public-privé

Si, dans les pays occidentaux, les ressources en eau ne sont pas toujours une question évoquée au plus haut niveau, dans les régions plus arides, elles constituent depuis longtemps, une priorité politique de premier plan.

Le Qatar qui depuis longtemps, est confronté à la rareté de l'eau, utilise de plus en plus la technologie pour créer des solutions durables en la matière.

Manu Fernandez/Copyright 2022 AP - Tous droits réservés
Le Qatar fait face à un climat chaud et aride, ce qui l'oblige à innover pour assurer son approvisionnement en eauManu Fernandez/Copyright 2022 AP - Tous droits réservés

Il s'est associé avec l'entreprise espagnole spécialisée dans la gestion de l'eau Aguas de Valencia, une société primée et pionnière à l'échelle mondiale en matière de systèmes numérisés dédiés. Cette dernière exploite la plus grande installation de traitement des eaux du pays, à l'ouest de la capitale Doha. 

Les eaux usées à l'état brut passent par plusieurs étapes de filtration biologique et d'assainissement à haute pression, avant de devenir de l'eau suffisamment propre pour pouvoir être utilisée dans l'irrigation des cultures et des parcs dans l'ensemble du Qatar, et ce de manière adaptée."Nous optimisons tous les besoins en eau pour utiliser la quantité d'eau très précise requise selon les plantes, en fonction de la météo, des prévisions," explique Enrique Fernandez, directeur général Moyen-Orient de Aguas de Valencia. 

D'autres efforts sont faits dans la récupération de l'eau de pluie. Le Qatar s'équipe aussi en technologies pour tirer parti de cette précieuse ressource. "Au Qatar, quand il pleut, la quantité de pluie est très importante en très peu de temps," fait remarquer Enrique Fernandez. "Nous devons donc être prêts à traiter et à conserver pendant un certain temps, ce volume de pluie maximal et ainsi, traiter 100% de l'eau," dit-il.

À mesure que nos conditions météorologiques deviennent plus extrêmes et moins prévisibles, le recyclage de l'eau, comme le fait le Qatar, deviendra de plus en plus important.

"Les approches de l'économie circulaire pourraient combler les failles"

Avec l'incertitude que suscite le changement climatique et d'autres conflits potentiels sur les ressources en eau, la gouvernance de l'eau est appelée à évoluer dans les années à venir, selonOriana Romano, cheffe de l'unité Gouvernance de l'eau et Économie circulaire à l'OCDE.

"Il n'y a pas assez d'eau sur cette planète pour la considérer comme acquise, nous devons donc économiser chaque goutte afin de la gérer efficacement," fait-elle remarquer. 

"Nous devons être plus intelligents, suivre les cadres et les approches de l'économie circulaire qui pourraient combler les failles dans le domaine de l'eau," poursuit-elle. "Enfin, il est important de penser en termes de systèmes, de considérer l'eau comme un bien et de la relier à d'autres politiques ou secteurs qui ont un effet direct ou indirect sur l'eau : par exemple, l'énergie, les déchets ou le développement urbain et régional," énumère-t-elle.

Ces pistes sont des opportunités aussi bien humanitaires qu'économiques. L'accès universel à l'eau potable et à l'assainissement aide non seulement les plus pauvres, mais il apporte aussi une impulsion économique de plusieurs milliards de dollars.

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