Le Front national, une entreprise familiale qui ne connaît pas la crise

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Par Christelle Petrongari
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Comment le Front national s‘est transformé, d’un parti d’extrême droite pur et dur, nationaliste, xénophobe, antisémite, négationniste, lorsqu’il était dirigé par Jean-Marie Le Pen, en

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A 87 ans, Jean-Marie Le Pen ne boude pas son plaisir. Le score du parti qu’il a créé il y a 43 ans le rend enthousiaste mais “La partie n’est pas encore gagnée. Elle dépend de la mobilisation de nos militants, mais aussi de nos électeurs, a-t-il remarqué au lendemain du résultat du premier tour des régionales. Il faut qu’ils s’engagent dans la bataille de façon à remporter la victoire, qui est méritée.“

Une entreprise familiale

Ancien parachutiste pendant les guerres d’Indochine puis d’Algérie, Jean-Marie Le Pen débute sa carrière politique dans les courants poujadistes en étant élu député de la Seine en 1956. Dès 1962, il se fait remarquer en déclarant aux médias “Je n’ai rien à cacher. Nous avons torturé parce qu’il fallait le faire.“ Ce fils de pêcheur de Bretagne, né à la Trinité-sur-Mer, fonde le Front national en 1972. Ses thèmes de prédilection : immigration, chômage et corruption des élites.

A la présidentielle de 1974, il obtient 0,75% des voix. En 2002, contre toute attente, il crée la surprise en se retrouvant au second tour face à Jacques Chirac. C’est à cette époque qu’il met en avant sa fille. Marine Le Pen apparaît sur les plateaux de télévision et se fait très vite remarquer comme “bonne communicante” : “Marine, ce sont les médias qui l’ont faite“, dit son père.

Avocate de formation, elle est chargée en 2005 de la communication et de la formation des cadres du FN, elle commence sa stratégie de “dédiabolisation” du parti. Elle écarte petit à petit la vieille garde. En 2006, elle choisit une jeune femme maghrébine pour poser sur une affiche de campagne électorale et provoque la contestation au sein du parti mais maintient son choix.

En 2007, Marine Le Pen s’installe à Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais ), une commune ouvrière de l’ancien bassin minier : elle cite régulièrement Jean Jaurès, capte les classes populaires, les chômeurs, et même d’anciens communistes ou militants syndicaux.

Elue présidente du Front national en janvier 2011, elle continue d’infléchir son discours, notamment sur l’antisémitisme. Si son programme inclut des éléments empruntés à la gauche (questions économiques, laïcité, mœurs), son fonds de commerce principal reste l’immigration. Elle réalise un an plus tard le meilleur score du FN à une présidentielle, 18% des voix.

Point d’orgue de la “dédiabolisation” du parti: l’exclusion de son père le 20 août 2015. Elle a le soutien des sympatisants FN qui approuvent à 53% sa décision. Condamné plusieurs fois pour des propos antisémites, notamment “Les chambres à gaz sont un détail de l’Histoire“, Jean-Marie Le Pen le répète en avril dernier, ce qui déclenche le processus de son exclusion.

De succès en succès

Depuis que Marine Le Pen est à la tête du parti, jamais le Front national n’a réalisé de si bons scores électoraux. Les attentats du 13 novembre dernier à Paris et à Saint-Denis se sont traduits dans les urnes par une forte poussée du FN. La sécurité et la crise des migrants en Europe semblent plus préoccuper les électeurs français que les problèmes régionaux. Le conflit entre le père et la fille Le Pen, pourtant virulent et spectaculaire, n’a apparemment pas refroidi les sympathisants. Résultat, le FN est en tête au premier tour dans six régions, soit presque la moitié (Il y en a 13 en métropole) avec 28% ; à titre de comparaison, en 2010, le score du FN était de 11, 4% aux élections régionales.

Le parti d’extrême droite pourrait l’emporter dans au moins deux régions au second tour, le 13 décembre prochain : Nord-Pas-de-Calais-Picardie, où Marine Le Pen est tête de liste, et Provence-Alpes-Côte d’Azur, où Marion Maréchal-Le Pen mène le Front. Louis Aliot, vice-président du FN et compagnon de Marine Le Pen, crie victoire : “Plus personne ne pense que nous sommes des fascistes, des nazis, des racistes, personne ! On a gagné la bataille des idées“

Un enjeu encore plus fort

C’est la première élection pour des régions beaucoup plus grandes et fortes économiquement grâce à la réforme territoriale de décembre 2014. Les futurs présidents de ces régions auront à gouverner chacun entre 5 et 6 millions d’habitants, le double – 12 millions de personnes – pour la région Ile-de-France. Ils auront donc un rôle économique crucial.

La droite pensait reconquérir de nombreuses régions dirigées par la gauche (elle en détenait 22 sur 23 avant ce scrutin), mais le FN l’affaiblit : l’alliance droite-centre-droit est en tête dans seulement quatre régions. A gauche, le Premier ministre, Manuel Valls, s’était positionné comme le “guerrier” le plus acharné contre le Front national, il avait notamment déclaré : “Aujourd’hui, il y a trois dangers, le climat, l’Etat islamique et le FN“ mais il a dû calmer le jeu à la suite des attentats.

De plus en plus d’inquiétude

Le journal du nord de la France “La Voix du Nord” avait écrit en Une, le 30 novembre dernier, son inquiétude si Marine Le Pen venait à prendre la tête de la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie. C’est très rare qu’un quotidien régional prenne ainsi une position politique.

La Une courageuse de La Voix du Nord aujourd'hui #FNpic.twitter.com/S34ChviMgr

— Luc Bronner (@lucbronner) 30 Novembre 2015

Autre intervention exceptionnelle, celle du patron du Medef. Pierre Gattaz a pris la parole exprès pour souligner le danger, selon lui, que représente pour la France le programme économique du FN.

Le Crif (Conseil représentatif des institutions juives de France) a insisté sur son “rejet de l’extrême droite, dont les valeurs sont contraires au pacte républicain“. “Il se peut qu’une infime minorité de Français juifs soient séduits par le discours du Front national, notamment sur l’islam“, a déclaré Elie Benarroch, le président du Fonds social juif unifié (FSJU), “mais les représentants de la communauté juive estiment qu’en aucun cas, il ne faut se jeter dans ses bras.“

Avant le premier tour des élections régionales, Marine Le Pen prédisait l’apocalypse : “Si nous échouons dans la guerre contre les jihadistes, la charia remplacera notre constitution, l’islam radical se substituera à nos lois, nos bâtiments seront détruits, la musique sera prohibée, il y aura une épuration religieuse avec son cortège d’horreurs“.

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Posted by euronews on�Monday, December 7, 2015

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