Mondial-1998: vingt ans après, le mythe lointain du "black-blanc-beur"

Mondial-1998: vingt ans après, le mythe lointain du "black-blanc-beur"
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Vingt ans après le sacre du Mondial-98, que reste-t-il de la France "black-blanc-beur"? A l'aube de la Coupe du monde de football en Russie, le mythe peut sembler lointain et l'euphorie surtout conditionnée par les résultats des Bleus sur le terrain. La victoire sur le Brésil le soir du 12 juillet 1998 avait donné lieu à une liesse inédite, avec un million et demi de personnes descendant sur les Champs-Élysées pour célébrer cette équipe "multiculturelle", derrière ses héros Zinédine Zidane, Lilian Thuram ou Youri Djorkaeff. "Cette équipe donnait une nouvelle image de la France, métissée, talentueuse, avec une diversité qu'on découvrait en partie", souligne le sociologue du sport William Gasparini. "Cela a +déstigmatisé+ une certaine partie de la population, même si dans les faits, la société française peinait à intégrer ces jeunes issus de l'immigration dans l'économie", ajoute-t-il. Le parcours inattendu jusqu'à la victoire a donné lieu à plusieurs semaines "assez incroyables d'union nationale, où beaucoup ont eu la conviction de partager des moments essentiels ensemble", à l'instar d'événements historiques tels que la Libération de 1945, affirme pour sa part le sociologue Stéphane Beaud. Le terme "black-blanc-beur" peut sembler aujourd'hui "daté". Mais au-delà du football, ce "moment de grâce collective" coïncide avec une période d'embellie économique, ajoute-t-il: "Le chômage baisse, le gouvernement Jospin crée 500.000 emplois jeunes, tout cela s'est mêlé pour contribuer à ouvrir un temps des horizons à la jeunesse populaire". Le mythe s'est perpétué un temps avec la victoire à l'Euro-2000 mais il y a eu ensuite une "bascule", note M. Beaud. Marseillaise sifflée au Stade de France lors d'un match France-Algérie en 2001, fiasco du Mondial-2010 avec la grève des joueurs jusqu'à l'évocation par Karim Benzema d'un problème de racisme en France après le refus de Didier Deschamps de le sélectionner pour l'Euro-2016. De héros de l'intégration, les Bleus sont devenus des "traîtres à la nation", selon l'expression de M. Beaud. - "Structurant pour toute la société" - Dans le même temps, le climat s'est tendu avec le 11-Septembre et les attentats de Paris du 13 novembre 2015. Le Front national s'est par ailleurs hissé au second tour de la présidentielle en 2002 et en 2017 en fustigeant l'immigration. Suspicion sur les citoyens d'origine maghrébine d'un côté, tentation du "repli communautaire" de l'autre... A cela s'ajoute depuis 2015 une crise migratoire "qui peut jouer dans la perception que certains ont des migrants", estime M. Gasparini. Le paradoxe est que l'équipe de France "reste un lieu de visibilité de toute l'immigration française". Et s'il y a crispations d'un côté, "on a aussi une France qui intègre ses minorités, avec des avancées dans le monde politique, dans les entreprises... La société a changé depuis 1998", note-t-il. Redevenue plus populaire, l'équipe de France en 2018 consacre ainsi une "place importante aux joueurs d'origine africaine", note M. Beaud, pour qui "ça passe chez les aficionados, parce qu'il y a toujours une prime accordée à l'excellence footballistique". Alors, que reste-t-il de 1998? Symbole de cette équipe triomphante, Zinédine Zidane a regretté dans une interview à L'Equipe que l'élan populaire suscité à l'époque n'ait pas été suivi d'effets plus concrets "à tous les niveaux" de la société. Pour l'historien Yvan Gastaut, "on peut avoir plusieurs visions de cet épisode" qui reste "un moment historique". Soit "se dire que ce n'est plus possible, ou que ce n'est plus nécessaire, parce qu'il y avait besoin d'affirmer en 1998 des choses qui sont aujourd'hui actées" et que la question de l'intégration est "dépassée aujourd'hui" puisque "les combats sont ailleurs". Reste qu'"on est aujourd'hui à la recherche de fêtes de ce genre", car "un événement sportif de ce type peut être structurant pour l'ensemble de la société française", ajoute-t-il. Quant à savoir si l'euphorie peut revenir... "C'est possible. Il faut qu'il y ait les ingrédients pour que la France adhère à son équipe nationale", estime M. Gasparini. Et ceux-ci sont simples: "Des victoires, des héros positifs et des relais médiatiques".

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