Visite exceptionnelle du site de production du lanceur Vega en Italie

En partenariat avec ESA - The European Space Agency
Visite exceptionnelle du site de production du lanceur Vega en Italie
Par Jeremy WilksStéphanie Lafourcatère
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Dans cette édition de Space, nous avons eu la chance de visiter le site de production du lanceur Vega. Occasion pour nous de découvrir son deuxième étage dont le cœur renferme de la fibre de carbone, une technologie prometteuse destinée notamment à accroître la compétitivité de Vega.

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Dans cette édition de Space, nous avons la chance de visiter le site de production de fusées d'Avio, au sud de Rome, où des ingénieurs développent la prochaine génération de lanceurs européens en fibres de carbone. Nous avons eu l'autorisation rare de filmer à l'intérieur.

C'est dans cette unité de production de fusées - l'une des rares en Europe - que le lanceur léger Vega est né et que ceux de demain sont actuellement en cours de construction.

"Ici, on fabrique en particulier, les coffrages des premier, deuxième et troisième étages du lanceur : ces coffrages constituent les structures porteuses des moteurs," précise Ettore Scardecchia, responsable de l'ingénierie produits chez Avio. "Dans ce bâtiment," nous montre-t-il, "on démarre avec les matières premières : le caoutchouc et la fibre de carbone. Et à la fin, les structures porteuses de la fusée sont prêtes à être chargées en combustible."

Bobinage de fibres de carbone

Le corps de la plupart des grandes fusées est métallique. Avio utilise de son côté, de la fibre de carbone pour Vega. Et l'entreprise italienne le fait grâce à une technologie de bobinage inédite et brevetée, l'objectif étant d'en avoir un maximum pour son argent...

"Le paramètre clé de cette méthode, c'est la légèreté," souligne Ettore Scardecchia. "Bien entendu, faire décoller une fusée nécessite beaucoup de puissance, mais elle doit aussi être la plus légère possible," insiste-t-il.

Il suffit de regarder un lancement pour se rendre compte de la puissance de Vega. Les fusées à propergol solide comme ce lanceur ne peuvent pas être stoppées une fois leurs moteurs allumés, mais leur poussée est énorme quand elles s'arrachent du pas de tir.

"C'est une fusée extrêmement rapide à faire décoller parce qu'elle est très légère, elle est relativement légère par rapport à la poussée qui lui est appliquée au décollage, donc on ressent vraiment quelque chose d'extraordinaire quand on voit cela," reconnaît Giorgio Tumino, responsable du programme de développement Vega à l'Agence spatiale européenne (ESA).

Les lanceurs Vega ont beau décoller en quelques secondes, leur construction n'en est pas moins longue et minutieuse. Il faut environ une année pour passer des matières premières au lancement. Et la première étape consiste à utiliser un moule géant en forme de tube appelé mandrin.

"Pour fabriquer un moteur de fusée en fibres de carbone, on commence avec cette pièce d'équipement qu'on appelle un mandrin," décrit Massimo Epifani, manager de production chez Avio. "Elle est faite à partir de nombreuses pièces métalliques assemblées ensemble et sur ce mandrin qui tourne, on tend notre ruban de carbone," poursuit-il.

"Quand il est en fonctionnement," renchérit-il, "un moteur atteint une température de plus de 3000 degrés : donc, pour protéger la structure de ces températures élevées, on fabrique cette isolation thermique qui est faite de ce caoutchouc très fin, c'est la première chose que l'on applique sur le mandrin."

"Ensuite," énumère Massimo Epifani, "on part de bobines de fibres de carbone pré-imprégnées avec de la résine époxy qui est un brevet d'Avio et grâce à ce matériau - en réalité à 5000 km de fils comme cela-, on réalise le bobinage des fibres de carbone sur notre mandrin," explique-t-il.

Premier essai statique réussi

Avio a justement utilisé ce procédé pour son P120C, le plus gros moteur solide monobloc au monde.

Un moteur important puisqu'il représente la première étape d'une nouvelle version plus puissante de Vega baptisée Vega C. Il vient de faire l'objet de son premier essai statique au centre spatial guyanais de Kourou.

Ce même moteur servira pour la prochaine Ariane 6. Cette évolution s'inscrit dans une démarche plus vaste qui vise à distancer la concurrence de l'Inde, de la Chine et des Etats-Unis.

"Nous essayons de manière offensive, de rendre nos concepts de plus en plus compétitifs," fait remarquer Giorgio Tumino de l'ESA. "C'est par exemple, le moteur commun que nous avons développé pour deux programmes : Vega C et Ariane 6 - le moteur à propergol solide P120C - : ce qui nous donne la possibilité d'harmoniser les ressources et d'avoir le même moteur pour le premier étage de Vega C et pour Ariane 6, dans les deux cas en tant que propulseur d'appoint," détaille-t-il.

Vega C

À l'approche du premier lancement de Vega C programmé en 2019, des efforts sont également menés pour perfectionner l'étage supérieur de la fusée : celui qui véritablement, vole dans l'espace et place les satellites sur les orbites demandées par les clients.

C'est le seul étage à propulsion liquide. Ce qui veut dire qu'on peut l'éteindre et le rallumer à la différence des moteurs à propergol solides.

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"Nous travaillons en particulier pour Vega C, sur le quatrième étage pour qu'il puisse transporter des satellites d'une masse beaucoup plus importante que dans la version actuelle de Vega," déclare Irene Cruciani, responsable ingénierie systèmes chez Avio. "Il est capable de redémarrer plusieurs fois : cela donne beaucoup de flexibilité au nouveau lanceur qui peut ainsi mettre en orbite toute une gamme de satellites : cela va de très petits "Cubesats" pesant à peine quelques kilos à ceux de deux tonnes et demi qui sont très gros pour notre lanceur," affirme-t-elle.

Avec le lanceur léger Vega, la fusée moyenne Soyouz et Ariane 5 en modèle poids lourd, la gamme de lanceurs de l'Agence spatiale européenne - l'ESA - peut aujourd'hui atteindre n'importe quelle orbite depuis la Guyane.

À chaque décollage du plus jeune membre de la famille - Vega -, c'est la même émotion pour ses concepteurs. "Son premier vol a été un succès inattendu parce que c'était pour nous tous, notre première expérience," se souvient Irene Cruciani. "C'était très surprenant et magnifique de voir cela. Dès le premier vol, ses performances ont été excellentes, donc c'était vraiment merveilleux," confie-t-elle dans un sourire.

Son collègue Ettore Scardecchia ajoute : "La puissance qui se dégage de l'intérieur du moteur, avec les flammes qui s'échappent de la buse et le bruit assourdissant qui entoure le lanceur et le moteur, c'est vraiment exceptionnel. Et la première fois que vous y assistez," estime-t-il, "c'est comme votre premier amour, vous ne l'oublierez jamais."

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