L'Allemagne fait ses adieux émus à la houille et à ses "gueules noires"

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L'Allemagne a adressé vendredi un adieu plein d'émotion à ses "gueules noires" et à la houille, ancien moteur de croissance de l'économie devenu obsolète, tournant définitivement une page majeure de son histoire industrielle.

A la fin du service des derniers 1.500 employés de ce secteur, sept mineurs ont émergé une dernière fois de leur ascenseur de service avec un bloc "d'or noir", extrait à près de 1.000 mètres de profondeur.

Devant de nombreuses caméras et un public considérable, ils l'ont symboliquement remis au président allemand Frank-Walter Steinmeier.

"C'est un jour difficile ?", a demandé le chef de l'Etat à Jürgen Jakubeit qui a travaillé sous terre pendant plus de trois décennies. "Un jour très difficile", a répondu le mineur, casque sur la tête, visage sali par la houille, et regard plein d'émotions.

"C'est plus qu'un bloc de charbon, c'est une partie de l'Histoire", a jugé M. Steinmeier devant quelque 500 invités, dont le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, lors d'une cérémonie retransmise à la télévision.

"Sans le charbon et ceux qui l'ont extrait de sous la terre, l'Histoire de ce pays aurait été différente", a ajouté le président allemand avant que la chorale charbonnière de la Ruhr n'entonne le Steigerlied, l'hymne des mineurs.

"La houille a permis l'industrialisation de la région et la prospérité dans toute l'Allemagne", a jugé de son côté la chancelière Angela Merkel, citée par la porte-parole du gouvernement.

Les galeries creusées pendant 150 ans, soit six générations de mineurs, à la pioche puis à la foreuse, doivent désormais être scellées et progressivement noyées par les eaux de ruissellement.

Depuis onze ans déjà, les 1.500 salariés de la fosse de Prosper-Haniel se préparaient à cette fermeture annoncée, dans une Ruhr qui a compté jusqu'à 600.000 mineurs après la Seconde guerre mondiale.

- Usant et risqué -

Dès jeudi, les églises et cathédrales de la région ont organisé des messes dédiées alors que les clubs de football rhénans, Dortmund et Schalke en tête, ont rendu hommage avant les rencontres à leurs racines minières.

Car les hauts fourneaux qui se dressaient sur les collines rhénanes depuis le XIXe siècle et ces mines descendant jusqu'à 1.500 mètres sous terre représentaient bien plus qu'un outil de travail.

"Au fond", il y avait une société ouvrière et masculine avec son jargon, son entraide, ses échanges sans détour et sa passion pour le foot, qui se prolongeait à l'église et au comptoir des "Kneipe" (bistrots).

Mais derrière cette solidarité, il y avait aussi un labeur usant et risqué. Le "coup de grisou" dans une mine tchèque, qui a tué jeudi 13 mineurs, est venu à nouveau rappeler combien ce métier est dangereux.

- Soif de lignite -

Dans la Ruhr, déjà frappée par le déclin de son autre fierté industrielle, la sidérurgie, une difficile reconversion s'annonce, doublée d'une mise en valeur touristique des anciens sites.

Depuis que Berlin a programmé en 2007 la fermeture des houillères, les autorités rhénanes tentent de faire du bassin minier un pôle de compétitivité, dense en universités, centres de recherche et start-ups.

Et pour éviter un choc trop brutal, l'Allemagne a subventionné les mines, avec au total 40,15 milliards d'euros depuis 1989. 2,7 milliards supplémentaires sont prévus d'ici 2022 pour accompagner la transition.

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Mais l'adieu à la houille est toutefois loin de signifier l'abandon du charbon.

Près de 40% du mix électrique allemand repose encore sur ce minerai, sous ses deux formes: la houille importée et plus encore son cousin très polluant et bon marché, le lignite.

Le pays compte ainsi plusieurs immenses mines de lignite à ciel ouvert. Et les centrales au charbon venues d'Australie ou de Chine turbinent à plein régime, y compris dans la Ruhr.

La première économie européenne est en effet lancée dans une transition énergétique périlleuse, et a besoin du charbon pour accompagner la sortie du nucléaire, tandis que la montée en puissance des renouvelables pose des problèmes de transport et de stockage.

Pressé par ses engagements climatiques, le gouvernement dévoilera début février les grandes lignes de son plan d'abandon progressif du charbon, pour l'heure attendu à l'horizon 2050.

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