Election présidentielle au Kazakhstan après une année noire

Dans un bureau de vote à Almaty, le 20 novembre 2022
Dans un bureau de vote à Almaty, le 20 novembre 2022 Tous droits réservés Vladimir Tretyakov/NUR.KZ
Par Euronews avec AFP
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Le dirigeant sortant Kassym-Jomart Tokaïev devrait sans surprise être reconduit pour les sept prochaines années à la tête du Kazakhstan.

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Le Kazakhstan votait ce dimanche lors d'une élection présidentielle anticipée qui devait permettre au dirigeant sortant Kassym-Jomart Tokaïev de consolider son pouvoir, après une année noire marquée par des émeutes sanglantes et par une impitoyable lutte des clans.

Ex-république soviétique riche en ressources naturelles et située au carrefour d'importantes routes commerciales, le Kazakhstan a plongé dans le chaos en janvier lorsque des manifestations contre la vie chère ont dégénéré en émeutes, avant d'être brutalement réprimées, avec l'aide des troupes de l'Organisation du traité de sécurité collective, alliance dirigée par Moscou. Bilan : 238 morts.

Le pays reste traumatisé par cette crise et, signe que les tensions persistent, les autorités ont annoncé jeudi avoir arrêté sept partisans d'un opposant en exil accusés de fomenter un "coup d'Etat".

M. Tokaïev, qui a voté tôt dans la capitale Astana, devrait sans surprise être reconduit pour les sept prochaines années, avec face à lui cinq candidats quasi inconnus pour les près de douze millions d'électeurs.

Reste à savoir s'il récoltera plus de 71% des voix comme en 2019, un score sans appel mais bien loin des 98% obtenus par son prédécesseur Noursoultan Nazarbaïev en 2015.

"Coup d'Etat"

A Astana et Almaty, les deux plus grandes villes du pays, l'AFP a vu plusieurs votants se prendre en photo devant les bureaux de vote, nombre d'électeurs invoquant l'"obligation" de montrer lundi la photo sur leur lieu de travail.

Ce scrutin vise à tourner la page d'une année difficile, mais aussi à consacrer le règne du président Tokaïev, 69 ans, qui s'efforce depuis des mois de réduire l'influence du clan de son puissant prédécesseur et mentor Noursoultan Nazarbaïev, au pouvoir durant trois décennies.

Car cette année a aussi vu M. Tokaïev, un diplomate de formation, se muer en dirigeant implacable, faisant tirer sur les émeutiers en janvier, arrêtant des proches de M. Nazarbaïev et tenant tête au président russe Vladimir Poutine dont il désapprouve l'invasion de l'Ukraine en février.

Le président Tokaïev a fait campagne en portant son projet visant à créer un "Nouveau Kazakhstan", plus démocratique et moins inégalitaire. Mais les difficultés économiques persistent, tout comme les réflexes autoritaires.

Arrivé au pouvoir en 2019 après la démission surprise de l'omnipotent Nazarbaïev, M. Tokaïev a officiellement entrepris de couper le cordon à la faveur de la crise de janvier après avoir longtemps été considéré comme l'homme de main de son prédécesseur.

Diversifier les relations du Kazakhstan

Depuis le début de l'invasion russe de l'Ukraine, qui a choqué les anciennes républiques soviétiques, M. Tokaïev s'efforce de resserrer les liens avec la Chine, mais aussi avec l'Europe en contrepoids à l'influence russe.

Ces derniers mois, il a reçu la visite des chefs d'Etat russe, turc, chinois ainsi que de hauts responsables européens, et même du pape François.

"Compte tenu de la situation géopolitique difficile, je souhaiterais que la politique de notre État soit neutre explique" Aidreim, interrogée par Euronews après avoir voté à Astana. "Je souhaite que le principe de base du droit international, la non-ingérence dans les affaires des autres États, soit préservé".

"Notre État devrait avoir une politique multipolaire, avec l'Ouest et l'Est, avec tous les pays il devrait y avoir des relations égales" dit Makhambetov, électeur retraité.

Dias, âgé de 28 ans, résume son point de vue : "nous n'attaquons personne, donc personne ne doit nous attaquer, il faut la paix, la stabilité et le développement" dit-il.

L'opposition empêchée

Les promesses d'ouverture démocratique et de réformes économiques trouvent un écho dans l'électorat. "Depuis l'indépendance il y a trente ans, presque rien a changé, j'aimerais voir des changements significatifs", espère Nourlan N., colonel de police et soutien du président sortant.

Pour Mourzada Massalina, retraitée de 68 ans rencontrée à Almaty, "M. Tokaïev est le candidat adéquat car il a une grande expérience".

Mais cette élection censée ouvrir l'ère du "Nouveau Kazakhstan" donne un sentiment de déjà-vu, avec un paysage politique déserté, une opposition de façade et les pressions des autorités.

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De quoi laisser nombre de Kazakhs désabusés, comme Alia Bokechova, étudiante de 19 ans à Astana, qui n'ira pas voter. "C'est une perte de temps, nous savons déjà qui va gagner et on ne connait pas les autres candidats", dit-elle à l'AFP.

A l'approche du scrutin, le pouvoir a multiplié les avertissements, avec en point d'orgue l'annonce d'une "tentative de coup d'Etat" déjouée et l'arrestation de sept partisans de l'opposant en exil Moukhtar Abliazov.

Le président Tokaïev a aussi estimé "inacceptable de glorifier" ceux ayant pris part aux émeutes de janvier.

Les observateurs électoraux internationaux de l'OSCE ont regretté dans un rapport que leurs recommandations "relatives aux libertés fondamentales et aux conditions d'éligibilité et d'inscription des candidats" soient "restées sans suite".

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