Comment le Qatar place la durabilité au cœur de son économie

Comment le Qatar place la durabilité au cœur de son économie
Tous droits réservés euronews
Par Laila Humairah, Aadel Haleem & Didier Burnod
Partager cet article
Partager cet articleClose Button
Copier/coller le lien embed de la vidéo de l'article :Copy to clipboardLien copié

Nous découvrons les moyens mis en œuvre par le Qatar pour assurer un avenir durable aux générations futures, qu'il s'agisse d'un site de test de pointe pour l'énergie solaire ou d'initiatives de sensibilisation à l'environnement.

PUBLICITÉ

En contribuant à la lutte contre le changement climatique et en donnant aux générations futures, les moyens de prendre des mesures significatives, le Qatar place le développement durable au premier plan de sa stratégie de croissance économique. Les initiatives vont des investissements dans l'énergie solaire à la mise en place d'un approvisionnement durable en nourriture et en eau, en passant par des opérations de nettoyage qui préservent les sites patrimoniaux du pays tout en sensibilisant à l'environnement.

Perfectionner les technologies de l'énergie solaire

Le pays s'est notamment engagé à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 24% et à tirer 20% de son énergie du soleil d'ici à 2030. Mais comment un territoire aussi ensoleillé parvient-il à la transformer en électricité ? L'Institut de recherche sur l'environnement et l'énergie du Qatar (QEERI) s'est penché sur la question.

La centrale solaire de test du QEERI est un site tentaculaire. C'est là que Ben Figgis travaille tous les jours. Avec son équipe, il veille à toutes les recherches sur l'énergie solaire menées par le QEERI sur ce site, dans l'objectif de trouver les meilleurs moyens d'utiliser le soleil.

Euronews
Ben Figgis répond à Euronews sur le site de test du QEERIEuronews

"Il suffit d'exposer ces panneaux au soleil et les diodes au silicium commencent à produire de l'énergie toutes seules," décrit Ben Figgis. "C'est vraiment l'un des miracles de la science des matériaux," s'enthousiasme-t-il. "Ce que nous voulons, c'est tester toutes les technologies car leurs performances dans un climat donné peuvent être différentes de celles qu'elles auront dans un autre climat," fait-il remarquer.

L'industrie solaire du Qatar a connu une croissance rapide ces dernières années, encouragée par des milliards de dollars d'investissements dans les énergies renouvelables. Ces panneaux font partie d'une installation de 35 000 m², un banc d'essai pour ce qui contribuera à propulser l'économie du Qatar vers un avenir plus propre et plus vert.

La contrainte de la poussière

Le soleil brille toute l'année au Qatar, les mois d'été bénéficiant de 14 heures de lumière du jour. Mais cela ne signifie pas nécessairement que l'énergie solaire va de soi. 

"L'un des plus grands défis pour l'énergie solaire ici au Qatar et dans la plupart des régions désertiques, c'est la poussière," souligne le chercheur Ben Figgis. "Les mesures que nous avons réalisées montrent que si l'on ne nettoie pas les panneaux solaires tous les mois, ils perdront environ 15% de leurs performances, simplement à cause de la poussière," précise-t-il.

C'est là qu'interviennent des robots nettoyeurs. Tous les deux jours, ils dépoussièrent les panneaux sur le site de test. Lors de l'opération, des données sont collectées pour déterminer dans quelle mesure ils réussissent à maintenir le rendement de l'installation.

Mais même les robots font parfois des erreurs et peuvent rayer les panneaux en essayant de les nettoyer. C'est la raison pour laquelle les équipements intérieurs du QEERI sont tout aussi importants que son site extérieur.

Faire avec les rayures

Des tests de pression à la simulation de conditions météo extrêmes, les panneaux solaires sont soumis sur place à de multiples essais pour déterminer leur durabilité et leur rendement et contribuer au final, à leur mise sur le marché.

Juan Lopez-Garcia dirige l'unité de recherche du QEERI. Il nous explique en quoi ces tests de résistance sont essentiels au travail de son équipe. "L'un de nos projets consiste à étudier l'effet de cette abrasion - de ces rayures - sur le rendement," décrit-il. "La principale chose qui est affectée par ces rayures, c'est la lumière transmise par le verre," explique-t-il avant d'ajouter : "Sur le verre, s'il y a une rayure, cela peut diffuser et disperser la lumière, ce qui peut avoir un impact sur le rendement puisque l'on réduit la lumière."

La multitude de données recueillies par le QEERI dans les deux laboratoires rend encore plus prometteur, l'avenir de l'énergie solaire au Qatar.

Préparer un avenir durable

Earthna, le centre de recherche politique et de promotion de la Qatar Foundation, n'a été lancé que l'an dernier, mais il est déjà à l'origine d'avancées dans la recherche sur la durabilité et l'environnement. Son rôle est de tracer l'avenir durable du Qatar et il a ouvert le bal en organisant le premier Sommet Earthna, comme nous l'explique Gonzalo Castro de la Mata, directeur exécutif d'Earthna.

"Cela a été un premier événement formidable," dit-il. "C'était la première fois que nous organisions une réunion sur la durabilité dans les environnements chauds et arides," déclare-t-il. 

"Il faut savoir que la durabilité pour ces types de climats signifie quelque chose de très différent : il ne s'agit pas de pays tropicaux, ni de pays tempérés, nous n'avons pas de forêts ni d'eau, les effets du changement climatique seront donc très graves," fait-il remarquer. "Mais en même temps, ces pays font partie de la solution car bon nombre d'entre eux produisent des hydrocarbures qui font partie de la transition énergétique dont nous avons besoin pour atteindre les objectifs de l'Accord de Paris," estime-t-il.

Euronews
Gonzalo Castro de la Mata, directeur exécutif d'Earthna, répond à Qatar 365Euronews

Utiliser la technologie pour garantir la sécurité alimentaire

La sécurité alimentaire et la pénurie d'eau sont deux grands enjeux du développement durable que le Qatar réussit à gérer. Que peuvent apprendre les autres pays des régions chaudes et arides, des politiques du Qatar ? "La sécurité alimentaire est un immense défi et bien sûr, quand vous n'avez pas d'eau, c'est encore plus difficile," reconnaît Gonzalo Castro de la Mata.

"Le Qatar a introduit des technologies pour renforcer le recours à sa propre production alimentaire et de nombreux enseignements peuvent être tirés par d'autres pays," indique-t-il. "Mais les solutions doivent être adaptées à chaque écosystème et à chaque type de sols," poursuit-il. "Je pense qu'en ce sens, la sécurité alimentaire ne consiste pas seulement à faire pousser sa propre nourriture, mais aussi à pouvoir compter sur l'approvisionnement venant d'autres pays : par conséquent, les routes commerciales et la capacité à avoir des échanges commerciaux sont également très importantes pour la sécurité alimentaire," affirme-t-il.

Ces dernières années, nous avons vu un nombre croissant de jeunes se donner les moyens d'agir face à la crise climatique. De quelle manière Earthna les aide-t-il à se faire entendre ? 

PUBLICITÉ

"Lors du sommet, nous avons eu plusieurs sessions avec des jeunes et nous avons pu entendre ce qu'ils avaient à dire : ils ont été très catégoriques sur la manière dont ils veulent hériter de notre planète et sur les solutions qu'ils peuvent apporter," déclare le directeur exécutif d'Earthna. "Les jeunes font clairement partie de la solution, ils maintiennent la pression et je pense qu'il est très important pour la génération actuelle, celle qui dirige le monde, d'être à leur écoute," insiste-t-il.

Sensibiliser davantage au respect de l'environnement

Le Projet d'actions environnementales de Doha (Doha Environmental Actions Project ou DEAP) s'assure que les plages et les sites patrimoniaux du Qatar restent propres et préservés pour les générations à venir. Ses bénévoles jouent un rôle de premier plan dans la sensibilisation à l'environnement dans le pays.

Une centaine de personnes a récemment participé au nettoyage de la plage du site archéologique d'Al Zubarah.

"Cela fait 5 ou 6 ans qu'on fait cela et on a mobilisé 11 000 bénévoles, la majorité étant des élèves des écoles," indique Jose Saucedo, le directeur du DEAP. "Aujourd'hui, vous pouvez voir que des étudiants, des élèves d'école primaire, des familles et des entreprises se joignent à nous, tout le monde participe à ce grand mouvement que l'on a créé au fil des ans," se réjouit-il.

Euronews
Athba Al Bassam et sa fille, toutes deux participantes du nettoyage sur la plage à Al ZubarahEuronews

Athba Al Bassam et sa fille contribuent toutes les deux. "Aujourd'hui, il y a du vent," indique la mère de famille, "mais on voulait être là pour faire quelque chose pour l'environnement et nettoyer la plage," dit-elle.

PUBLICITÉ

Le projet DEAP rappelle que la pollution plastique est une préoccupation mondiale majeure. Chaque année, 11 millions de tonnes de déchets plastiques finissent dans les océans. L'espoir de l'organisation locale, c'est que chaque nettoyage de plage renforce la sensibilisation à l'environnement au Qatar. C'est pour cela qu'elle invite les bénévoles à laisser derrière eux uniquement des empreintes de pas.

"Nous avons collecté 180 000 kilos de déchets [depuis le lancement du projet]," précise Jose Saucedo. "Cela fait autant de détritus retirés de la nature au Qatar - des mangroves, de la route, de la plage, des sites patrimoniaux -," fait-il remarquer.

"C'est très facile pour les gens de comprendre," poursuit le directeur du DEAP, "une fois qu'ils sont sur un site en train de participer à un nettoyage, que le défi auquel nous sommes confrontés en matière de pollution plastique et de déchets est réel. C'est beaucoup plus facile que de les convaincre de la gravité de la situation sans qu'ils aient ce contexte en tête," insiste-t-il.

Transformer des déchets en art

L'art permet d'inciter à réfléchir aux manières de changer les choses. Certaines des bouteilles collectées lors des nettoyages précédents ont été utilisées lors des récents Doha Learning Days (les journées d'apprentissage de Doha) par des élèves de Qatar Academy Doha

Un ensemble d'objets collectés sur les plages à travers le Qatar a permis de créer deux œuvres collectives représentant un dugong et une tortue. Des réalisations porteuses d'un message, comme nous l'explique Elizabeth Kennedy, principale adjointe de l'établissement.

PUBLICITÉ

"Nos terres sont dégradées et cela a un impact sur les animaux que l'on trouve au Qatar," indique-t-elle. "Nous avons de magnifiques requins-baleines qui se regroupent ici, nos magnifiques dugongs, mais aussi nos tortues de mer qui nichent sur nos plages et parfois, quand elles voient des sacs plastiques flotter dans l'eau, elles les confondent avec des méduses," explique-t-elle. 

"Je pense qu'il est de notre devoir d'agir et de faire en sorte de laisser notre Terre dans un meilleur état," souligne-t-elle.

Une prise de position sur les plastiques à usage unique

Une préoccupation partagée : un groupe d'élève d'une dizaine d'années a lancé l'initiative "Activists in Action" qui vise à interdire les plastiques à usage unique au Qatar, une mesure appliquée depuis par toute leur école, Qatar Academy Doha.

"D'après les recherches qu'on a faites, l'interdiction des sacs en plastique est une étape très importante pour aller vers un environnement sain," indique la jeune Sara Aldosari, élève en 6ème année. "Si l'on veut un environnement sain, on ne peut pas l'obtenir en utilisant du plastique pendant 12 minutes, puis en le jetant au bout de 12 minutes," s'indigne-t-elle. "Il reste sur la planète bien plus longtemps qu'on ne l'utilise : ce n'est donc pas juste pour les autres personnes, ni même pour les animaux," dit-elle.

Euronews
Sara Aldosari, élève de 6ème année, lors des récents Doha Learning DaysEuronews

De retour à Al Zubarah, Ferhan Sakal est un habitué des nettoyages sur les plages. Il espère voir encore plus de nouveaux visages lors de la prochaine opération de ce type.

PUBLICITÉ

"C'est une très bonne initiative qui peut être encore plus développée au Qatar," estime le directeur des fouilles des Qatar Museums. "Nous avons atteint un objectif très intéressant en organisant de manière périodique, des opérations de nettoyage : ce qui permet de nettoyer les sites patrimoniaux, mais aussi de sensibiliser l'opinion publique au problème de l'environnement à l'échelle mondiale," dit-il avant de conclure : "Ce n'est pas un problème qatari, mais un problème mondial que nous devons résoudre."

Partager cet article

À découvrir également

Diversité et technologies : comment le Qatar réinvente l'éducation

Clubs de lecture, auteurs et éditeurs locaux : un regard sur le monde de la littérature au Qatar