Un professeur d’histoire a diffusé sur les réseaux sociaux une liste de personnalités juives en les qualifiant de “génocidaires à boycotter”. La Licra dénonce une “attitude ignominieuse”. De son côté, la direction de l’université Lyon 2 “condamne avec la plus grande fermeté”.
Une polémique secoue l’université Lumière-Lyon II, sur fond de guerre à Gaza. Tout commence le 19 septembre dernier, lorsque Le Figaro Vox publie une tribune signée par 20 personnalités intitulée "Monsieur le président, vous ne pouvez pas reconnaître un État palestinien sans conditions préalables", réclamant en particulier la libération des otages retenus à Gaza et le démantèlement du Hamas.
Le lendemain, Julien Théry, professeur d'Histoire et chercheur au CIHAM (Histoire, archéologie, littérature des mondes chrétiens et musulmans médiévaux) à l'université Lyon 2, relaie en ligne une liste de "génocidaires à boycotter en toutes circonstances".
Cette publication désigne les personnalités signataires de la tribune publiée dans Le Figaro, parmi lesquelles le présentateur Arthur Essebag, le président du Conseil représentatif des institutions juives de France Yonathan Arfi, l'auteur de bandes-dessinées Joann Sfar, ou encore le philosophe Bernard-Henri Lévy.
Cette liste avait à l'origine été publiée par Sophie Trégan, autrice de billets sur le Club Mediapart (section blog du site), et accompagnée d'un texte, sur la page Facebook intitulée "La Grande H. : Histoires & Idées".
Condamnations
Près de deux mois plus tard, le vendredi 21 novembre, la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra) dénonce sur X une "attitude ignominieuse". "On peut être professeur d’Histoire d’université, se croire progressiste, et faire des listes comme on en faisait sous l’Occupation. L’appel au boycott de personnes physiques, c’est de la provocation à la discrimination et à la violence", s’est insurgée l’association, expliquant se tenir "à la disposition de chacune des personnes diffamées pour les assister en justice."
Le lendemain, le président du groupe Droite républicaine à l'Assemblée nationale et ex-président de la région Auvergne-Rhône-Alpes pointe ce qui, selon lui, relève de "l'antisémitisme ordinaire d'extrême gauche dans nos universités".
L'université Lyon 2 a réagi dimanche via un communiqué, affirmant avoir pris connaissance "avec consternation" du post Facebook de l'enseignant.
"Nous condamnons avec la plus grande fermeté le contenu de cette publication, qui ne représente aucunement notre université ni les valeurs qu’elle défend et transmet, nous a répondu un représentant de Lyon 2. Tout en reconnaissant à ce collègue, qui n’exerce aucune fonction de représentation de notre établissement, un droit absolu d’expression à titre individuel et privé, nous n’en sommes pas moins très choqués par un procédé dont nous nous désolidarisons complètement." Avant de terminer : "Nous déterminerons dans les meilleurs délais les mesures qui s’imposent."
L'enseignant se défend dans un contexte houleux
Face à l’ampleur de la polémique, l’enseignant Julien Théry a réagi sur son profil Facebook, assumant ses propos. "Les petits fonctionnaires de la hasbara (technique de communication publique ou outil de propagande utilisé par Israël, ndlr) chassent en meute derrière la très mal nommée LICRA ! En confondant bien sûr "juifs" et "sionistes partisans du génocide en Palestine"... confusion typiquement antisémite", a-t-il souligné.
L'enseignant se dit victime d'une "campagne suscitée en rétorsion à (son) article "Antisémitisme de gauche ": la grande fake news", publié sur le site Hors-Série. Dans un message adressé au journal Le Progrès, il dénonce "une offensive maccarthyste contre la liberté de la recherche et de l’enseignement". Julien Théry n'a pas répondu aux sollicitations d'Euronews.
L'université Lyon 2 n'en est pas à sa première polémique. Fin mars, le cours d'un universitaire avait été interrompu par des manifestants propalestiniens. L'enseignant avait alors dénoncé un "entrisme islamiste" selon lui à l'œuvre à l'établissement. En mai, un vice-président de l'université avait démissionné après des prises de position sur la guerre entre le Hezbollah libanais et Israël.